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"Ferme à vendre": à l'approche de la retraite, les agriculteurs français peinent à trouver des repreneurs

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- - Guillaume Souvant- AFP

Alors que la moitié des exploitants agricoles va partir à la retraite dans les dix prochaines années, la transmission de la terre et de l'exploitation est un enjeu majeur pour le monde rural. Au risque de voir des fermes disparaître.

Les éleveurs français, dont beaucoup sont proches de la retraite, peinent souvent à transmettre leurs fermes à un jeune agriculteur. Francis Vaudoux, éleveur à Montreuil-le-Henri (Sarthe), a eu de la chance. Il n'est pas allé "le chercher loin" son repreneur: "Ce sera sans doute mon futur gendre, Aurélien", dit-il, au cours d'un débat au Space, le salon international de l'élevage à Rennes.

"Il va avoir une grosse charge financière au départ mais je vais rester un ou deux ans comme salarié. Il sait que j'ai les compétences et que si je partais tout de suite, il n'y arriverait pas", raconte l'éleveur de poules et de porcs. "On a beaucoup de métier dans les mains: on est éleveur, vétérinaire, mécanicien, plombier... Même si on n'est que des paysans, on a quand même une multitude de métiers".
Franck Houssais, qui élève des vaches laitières et des cochons à Domalain (Ille-et-Vilaine), n'a lui pas encore trouvé la perle rare. "On gagne moins que certains mais on vit dans un sacré confort.....", vante-t-il pourtant. "Bien sûr qu'il y a du mal dans les exploitations mais on peut vivre heureux". Mais cet "idéal n'est pas forcément celui de mes enfants. Ils ne l'ont pas si bien vécu que moi et ne veulent pas travailler le samedi et le dimanche", raconte-t-il.

Un âge moyen de plus de 49 ans

La transmission des fermes est un enjeu majeur pour le monde rural alors que la moitié des exploitants agricoles va partir à la retraite dans les dix prochaines années, selon la Mutualité sociale agricole. L'âge moyen des chefs d'exploitation ou d'entreprise agricole dépassait 49 ans en 2017, selon la même source.

Yvon Boutier, éleveur de vaches laitières de 61 ans, à Kerien (Côtes d'Armor) n'a lui non plus pas pu transmettre sa ferme à ses trois enfants: "Aucun ne souhaitait reprendre". "Notre volonté, c'était d'installer, on avait ça à coeur. On a volontairement baissé notre prix de vente" pour laisser de la "marge de manoeuvre" au jeune repreneur, explique le Breton. Locataire d'une partie de ses terres, il les a achetées pour pouvoir les louer à son successeur. "Sinon, y avait pas d'installation derrière. C'est pratiquement impossible au niveau financier", souligne-t-il.

Des prix en très nette hausse

A 5990 euros l'hectare en moyenne en 2018, le prix des terres et prés libres a presque doublé en 20 ans, même si les terres d'élevage sont moins chères (4.580 euros par hectare).

"Le gros point noir, c'est le foncier", souligne aussi Bastien Dutertre, 27 ans, un fils d'ouvriers, en cours d'installation en Mayenne. "En concurrence avec un voisin qui voulait s'agrandir", il a été aidé par d'autres agriculteurs qui ont acheté les terres pour les lui louer et ainsi lui permettre de s'installer. "C'est un projet de vie", dit-il. "Ma conjointe a dû changer de métier et de département pour me suivre."
Des repreneurs potentiels, Michel, éleveur de vaches laitières et de porcs à Martigné-Ferchaud (Ille-et-Vilaine) en a vu très peu lorsqu'il a cherché à préparer sa retraite. Il a fini par se tourner vers des voisins qui souhaitaient s'agrandir. "Malheureusement", regrette-t-il. Car "garder un tissu d'exploitants, je trouve ça vachement important".
Pascal Pommereul, 59 ans, éleveur laitier en Ille-et-Vilaine n'aura lui rien à transmettre quand il partira en retraite. Son nouveau propriétaire veut transformer son exploitation en parc d'attraction "Mon exploitation ne vaut plus rien", confie-t-il. "C'est encore une ferme sacrifiée sur l'autel de la bétonisation".
C.C avec AFP