La banque qui ne savait pas dire comment ses clients s'enrichissent
Cela paraît cocasse mais pour ce géant bancaire il s'agirait d'une mauvaise habitude tenace. À savoir manquer de rigueur quant aux informations anti-blanchiment de ses clients.
- Publié le 16-09-2019 à 17h02
- Mis à jour le 16-09-2019 à 17h38
Cela paraît cocasse mais pour ce géant bancaire il s'agirait d'une mauvaise habitude tenace. À savoir manquer de rigueur quant aux informations anti-blanchiment de ses clients.
Les régulateurs bancaires de Dubai viennent de publier les résultats de deux années d'audit de l'enseigne britannique Standard Chartered. Il ressort que la division banque privée ne dispose pas des informations les plus élémentaires pour pouvoir documenter les sources de richesse de ses clients, parfois pas même une simple adresse civile ou un numéro de téléphone, rapporte Bloomberg.
Des manquements similaires auraient été détectés dans ses principaux bureaux de Singapour, Hong Kong et Londres, impliquant près de 8.000 comptes clients qu'une enquête interne doit passer au crible pour en assurer la conformité avec les réglementations AML.
Les autorités de nombreux pays exigent des banques privées qu'elles vérifient comment leurs clients fortunés façonnent leur patrimoine pour prévenir la corruption, les transferts de fonds frauduleux ou encore le financement du terrorisme.
Divers dirigeants de Standard Chartered prendront ainsi part à des auditions face aux régulateurs émiratis plus tard ce mois-ci. Et le groupe bancaire doit désormais s'imposer l'intervention de consultants externes indépendants de Deloitte pour remédier à cette situation problématique.
Le coup de la valise
Ce n'est pas la première fois que ce genre de défaillances administratives est pointé du doigt. Les amendes s'accumulent d'ailleurs depuis plusieurs années pour Standard Chartered. Or, circonstance aggravante, sa banque privée accompagne des "personnes politiquement exposées", des clients qui occupent des fonctions de premier rang à l'instar de membres des familles royales au Moyen-Orient, ou autres hauts dirigeants d'Asie et d'Afrique.
En avril dernier, la Financial Conduct Authority (FCA), le gendarme anglais, avait encore justement infligé une amende de 102 millions de livres sterling (115 millions d'euros) après avoir constaté "des lacunes graves et persistantes dans les mesures anti-blanchiment en matière de contrôle préalable de la clientèle et de surveillance continue".
Des lacunes exposant Standard Chartered au risque accru de "recevoir ou blanchir les produits du crime". La banque avait notamment péché par laxisme en ouvrant un compte à un client sans aucune enquête sur l'origine des fonds et sur base uniquement d'une valise contenant 3 millions de dirhams émiratis (560.000 euros).
À décharge, relativise Bloomberg, il n'est pas si aisé de mettre les comptes de banque privée en conformité avec tous les prescrits réglementaires. Dans le cadre de leur travail, les private bankers doivent parfois demander à des clients de longue date de fournir des documents datant parfois de plusieurs décennies (fiches de paie, documents de successions, actes de structure d’entreprise, etc.). Autant de documents qui ne sont pas systématiquement produits par les administrations publiques dont est originaire cette clientèle particulière.