Nantes : un lieu inédit pour accueillir les femmes victimes de violences

Dès novembre, Citad'elles permettra aux victimes d'être prises en charge 24 heures sur 24 et de réaliser leurs démarches à un seul endroit.

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Dans ce centre unique en France, les femmes victimes de violences pourront réaliser la plupart de leurs démarches sans avoir besoin de courir aux quatre coins de la ville.

Dans ce centre unique en France, les femmes victimes de violences pourront réaliser la plupart de leurs démarches sans avoir besoin de courir aux quatre coins de la ville.

© Thibaut Déléaz / Le Point

Temps de lecture : 5 min

« C'est une première en France. » Ce mardi 3 septembre, alors que le gouvernement ouvrait le Grenelle contre les violences conjugales, la maire (PS) de Nantes, Johanna Rolland, présentait aux associations et à la presse Citad'elles, un centre d'accueil des femmes victimes de violences installé sur l'île de Nantes, près du CHU et du centre-ville.

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Dès le 25 novembre, les femmes victimes de violences conjugales et/ou sexuelles pourront venir gratuitement, 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24, trouver une main tendue dans ce centre, où elles pourront réaliser la quasi-totalité de leurs démarches. L'idée d'un tel lieu, venue de quatre associations – Question confiance, SOS Inceste et violences sexuelles, Solidarité femmes et L'Oasis –, avait été reprise par Johanna Rolland, qui en avait fait l'un de ses engagements de campagne en 2014.

<p>La maire de Nantes Johanna Rolland (à gauche) et son adjointe à l'égalité et à la lutte contre les discriminations Aïcha Bassal (à droite), ont visité « Citad'elles » mardi 3 septembre.</p><section class=
© Thibaut Déléaz / Le Point">

La maire de Nantes Johanna Rolland (à gauche) et son adjointe à l'égalité et à la lutte contre les discriminations Aïcha Bassal (à droite), ont visité « Citad'elles » mardi 3 septembre.

© Thibaut Déléaz / Le Point

Coordinateur de parcours

Là où les femmes victimes de violences doivent aujourd'hui naviguer entre différents locaux d'associations ou d'administrations pour réaliser chacune des démarches nécessaires, Citad'elles entend simplifier leur parcours. Dès leur arrivée, elles seront prises en charge par un coordinateur de parcours, à qui elles pourront raconter leur histoire une bonne fois pour toutes, sans avoir besoin de reprendre à zéro à chaque nouvelle démarche. « C'est important, car certaines en viennent à renoncer à leurs démarches parce qu'elles n'ont plus l'énergie de tout raconter à nouveau », souligne la maire.

Sur place, elles pourront aussi rencontrer un travailleur social, un psychologue, une sage-femme, recevoir des conseils juridiques… Plusieurs institutions se sont jointes à l'initiative : la CAF mettra, par exemple, un travailleur social à disposition une demi-journée par semaine et des avocats volontaires du barreau de Nantes viendront tenir des permanences. À terme, les victimes pourraient même déposer une plainte dans le centre, sur le même principe que les plaintes à l'hôpital que le gouvernement veut généraliser. Des discussions en ce sens sont en cours avec la direction départementale de la sécurité publique.

<p>Une salle avec des jeux a été aménagée pour que les victimes puissent venir avec leurs enfants si elles en ont.</p><section class=
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Une salle avec des jeux a été aménagée pour que les victimes puissent venir avec leurs enfants si elles en ont.

© Thibaut Déléaz / Le Point

Les mamans pourront également être reçues avec leurs enfants : une salle avec des jeux pour les petits et des fauteuils avec prises pour les smartphones des ados a été aménagée dans ce but. « Les enfants sont souvent les covictimes de ces violences, rappelle Johanna Rolland. Et comment demander à ces femmes de quitter le domicile conjugal si elles n'ont nulle part où les faire héberger ? » Accessible « de manière inconditionnelle et gratuite », insiste l'élue, ce centre pourra aussi accueillir des femmes après la crise traversée. « Ça peut très bien être une femme qui a subi des violences il y a cinq ans et qui ressent aujourd'hui le besoin d'en parler », assure Aïcha Bassal, son adjointe chargée de l'égalité et de la lutte contre les discriminations.

Lire aussi Violences conjugales : les premières annonces du gouvernement

Sécurisant et sécurisé

Un soin tout particulier a été porté à l'aménagement et à la décoration des lieux, qui dénotent avec la froideur habituelle des locaux d'administrations et l'aseptisation des lieux de soins. Mobilier moderne, lustres design au plafond, larges baies vitrées, murs décorés avec des miroirs ou des bandes lumineuses… « Tout a été pensé pour en faire un lieu sécurisant », explique Johanna Rolland.

Jusque dans les moindres détails, comme ces coussins disposés dans toutes les pièces que les victimes pourraient serrer contre elles en cas de besoin, une demande formulée par le planning familial. « Même l'acoustique a été travaillée pour réduire les bruits et créer une sorte de cocon », abonde Aïcha Bassal.

<p>Le centre a été pensé dans les moindres détails pour être le plus accueillant possible, et permettre aux victimes de trouver un peu de repos.</p> ©  Thibaut Déléaz / Le Point

Le centre a été pensé dans les moindres détails pour être le plus accueillant possible, et permettre aux victimes de trouver un peu de repos.

© Thibaut Déléaz / Le Point

Sécurisant, le centre Citad'elles sera aussi très sécurisé. L'accès au septième et dernier étage de l'immeuble, où il sera installé, sera filtré par des vigiles et des systèmes de sécurité. Les vitres seront teintées et occultées par des stores la nuit. C'est là aussi l'utilité de regrouper les démarches en un même lieu : chaque moment dans la rue pour passer d'un local à un autre est un moment où la victime est vulnérable et pourrait être de nouveau prise à partie par l'agresseur. Une salle pour fumeuses a même été installée pour leur éviter de quitter le centre.

Lire aussi Violences faites aux femmes : « Notre justice est encore trop patriarcale »

Clé de voûte

Pour mettre sur pied un tel endroit, il a fallu regrouper tous les acteurs autour d'une même table pour les faire travailler ensemble. « Ce projet n'est pas celui de la ville de Nantes, c'est celui d'un collectif », rappelle la maire, saluant le travail des associations qui ont été étroitement associées à la création de Citad'elles. « Cet équipement n'est pas une brique de plus, c'est plutôt une clé de voûte », résume le président du département de Loire-Atlantique Philippe Grosvalet.

Difficile d'estimer combien de femmes passeront par ce lieu d'accueil chaque année. « Environ 20 000, si on s'en réfère aux statistiques nationales », estime Johanna Rolland, rappelant qu'« une femme sur deux victimes de violences n'entreprend jamais de démarche ». Une proportion que Citad'elles espère bien voir grandir à Nantes. La ville, aidée notamment du département, a investi 1,8 million d'euros dans ce centre, dont le fonctionnement coûtera par la suite 1,76 million d'euros par an. Un effort nécessaire pour que les choses bougent, estime la maire de Nantes. « Le temps n'est plus aux mots : le temps est à l'action. »

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Commentaires (9)

  • Laréalité777

    Il s'agit de neutraliser ces brutes minables, pas de se cacher d'eux !

  • Opéra-18-32

    Pourquoi ne pas accueillir les hommes battus en effet, moins nombreux mais hélas existant tout autant que les femmes ? La raison en est qu'un certain féminisme a tellement battu la chaussée qu'il tient le haut du pavé, et pratique sans retenue la misandrie la plus échevelé... Dommage, bien dommage que la brave Johanna, pure produit de la société politique traditionnelle comme l'indique sa fiche Viki, n'ait pas vu plus loin que le bout de son nez. Du dévouement et de la bonne volonté, pas de vision pointue hélas.

  • vivenoux

    Effectivement ce n'est pas la femme victime d'une brute qui doit laisser le domicile conjugal, surtout si il y a des enfants, mais bel et bien le compagnon violent. Le munir ensuite d'un bracelet qui renseignera en temps réel sur sa position par rapport à sa victime et donnera l'alarme le cas échéant, cela existe ailleurs, l'Espagne entres autres. Il semble que le matériel adéquat existe dans nos tribunaux, mais que nos juges répugnent à l'utiliser ? Pourquoi ? Défense là encore des droits de l'homme ? Peur d'attenter au respect dû à la personne ? Changeons nos règlements et lois et soyons intraitables avec les bourreaux. Et avec tous les perturbateurs divers qui empoisonnent la vie quotidienne de la majorité de nos concitoyens.
    Bien sûr des hommes sont également victimes de leur compagne, mais à mon avis ils sont plus en mesure de leur riposter et leur tenir tête, par cette force qui justement provoque chez nous un feminicide tous les 3 jours. Combien de morts chez les compagnons battus ?