Près de 40 % des investissements directs étrangers faits à des fins d'optimisation fiscale
Selon une étude menée par le Fonds monétaire international, une grande partie des investissements directs à l'étranger sont des capitaux « fantômes », passant à travers des « sociétés vides » ou n'ayant pas de « réelles activités commerciales ». L'étude apporte une nouvelle pierre à l'édifice aux gouvernements souhaitant mettre à plat la taxation internationale.
L'attractivité d'un pays se mesure-t-elle à son environnement fiscal avantageux ? Il n'y avait déjà que peu de doutes là-dessus, mais l'étude menée par le Fonds monétaire international (FMI) et l'Université de Copenhague, vient soutenir un peu plus l'idée. Selon elle, en effet, près de 40 % des investissements directs étrangers (IDE) dans le monde sont réalisés à travers des « sociétés vides » sans « réelles activités commerciales ».
En clair, une grande partie de ces stocks sont constitués de capitaux « fantômes », conçus pour « minimiser la facture fiscale des multinationales », indiquent les chercheurs Jannick Damgaard, Thomas Elkjaer et Niels Johannesen, interrogés par le « Financial Times » . En 2017, cette part d'IDE dédiée à l'optimisation représentait 38 % et en 2010, 31 %.
Le Luxembourg en tête de liste
Selon les chercheurs, près de la moitié de ces IDE « fantômes » étaient basés au Luxembourg et aux Pays-Bas. Suivent des pays d'Outre-mer comme les Iles vierges britanniques ou encore les Bermudes. « Apple ne produit, ni ne conçoit, ni ne développe ses iPhone et ses systèmes d'exploitation en Irlande, pourtant, l'un des investissements directs étrangers les plus importants des Etats-Unis est la participation d'Apple dans sa filiale irlandaise », indique Brad Setser, économiste au « Council on Foreign Relations » de New York. Ainsi, près de deux tiers des investissements étrangers en Irlande sont considérés comme « fantômes ».
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Dans certains pays, la part de ces investissements a grimpé de façon fulgurante. Au Royaume-Uni, par exemple, alors qu'ils représentaient 3 % en 2009, ils atteignent désormais 18 % en 2017.
Du grain à moudre
L'étude vient mettre du grain à moudre dans les discussions mondiales. Au G7 à Biarritz, outre le sujet écologique , le sujet était l'un des principaux à l'ordre du jour. Et l'idée d'une taxation internationale fait (de nouveau) son chemin. « On a fait une avancée, maintenant on doit la mettre en oeuvre concrètement », avait indiqué Emmanuel Macron en marge du sommet d'août.
L'initiative française visant à taxer les grands groupes technologies mondiaux a accru la pression, le but étant de faire en sorte que ces investissements aillent le plus possible au financement d'activités de production. Dans le « Financial Times », Alex Cobham, responsable d'une organisation militante pour la justice fiscale, pointe cependant le fait que les initiatives des dix dernières années visant à réduire les transferts de profits vers des pays à faible taux d'imposition entraînaient des comportements plus agressifs. L'IDE à des fins d'optimisation passant ainsi de marginal à systémique.
Jean-Philippe Louis