Avec ses centaines de start-up biotech et medtech et ses grands groupes pharmaceutiques, la France est l’un des pays en tête de peloton dans la course à l’innovation qui agite le secteur de la santé. Des nanotechnologies aux thérapies cellulaires, en passant par l’injection d’intelligence artificielle dans les dispositifs médicaux, les néo-entrepreneurs français, souvent issus de centres de recherche publics (Inserm, etc.), veulent être les premiers à lancer les produits qui, demain, permettront aux patients de mieux affronter les maladies dont ils souffrent.

L’excellence de la recherche publique est un atout incontestable, mais le niveau moyen des levées de fonds en capital-risque, inférieur à nos voisins européens, reste une faiblesse. Encore un effort, il ne faudrait pas que, faute de moyens, trop de nos jeunes pousses prometteuses s’essoufflent ou se fassent rafler par des géants venus d’ailleurs!

De l’encre cellulaire pour fabriquer vos cheveux

Imaginez-vous dans quelques années en train de raconter à vos enfants, ou petits-enfants, l’époque où vous étiez chauve. «C’était avant 2025, avant qu’on ne m’imprime ces nouveaux cheveux si abondants et si soyeux… » Bref, avant que les imprimantes 3D de Poietis ne se mettent au boulot pour redonner une tignasse sexy à tous ceux qui en rêvaient. Aujourd’hui la start-up de bioprinting basée à Pessac, qui commercialise déjà de la peau humaine imprimée, travaille à fabriquer des cheveux grâce à ses imprimantes 3D alimentées en encre cellulaire.

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Pour le moment, les tissus de peau génériques et reproductibles sortis de ces machines sont destinés à servir d’éléments de test, notamment pour des géants de la cosmétique comme L’Oréal, qui a d’ailleurs signé un accord de recherche avec la start-up pour développer ces cheveux high-tech. La technique de bio-impression se fait par dépôts successifs de microgouttes d’encre biologique contenant quelques cellules, couche par couche, par un balayage du faisceau laser.

D’ici cinq à dix ans, le Graal serait évidemment de prélever les cellules d’un patient, de les multiplier afin de les utiliser comme matière première dans une cartouche d’encre cellulaire pour l’imprimante 3D. Le marché? Il est immense. 30% des hommes âgés de moins de 30 ans présentent des signes de calvitie précoce. Et ils n’attendront pas d’être chauves pour se faire une «petite impression».

Un exosquelette pour faire marcher les handicapés

En 2025, croisera-t-on des hémiplégiques allant chercher leur baguette à la boulangerie du coin grâce à leur exosquelette? C’est le pari de Mathieu, Nicolas et Alexandre, trois jeunes polytechniciens fondateurs de Wandercarft, une start-up tricolore qui travaille à la mise au point d’un exosquelette taillé pour aider les handicapés à marcher. Animé par une dizaine de petits moteurs électriques, il est contrôlé par un algorithme de robotique dynamique. Pas besoin de manettes ni de joystick pour le piloter, au contraire de certains de ses rivaux américains ou japonais.

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Pas besoin non plus de béquilles pour le patient qui l’utilise: comme on le fait avec un Segway, il suffit de pencher le buste pour avancer, de se redresser pour s’arrêter, etc. La start-up a obtenu le marquage CE à la fin de l’an dernier, ce qui lui permet de commercialiser la première version de cet exosquelette. «Elle est destinée aux centres de soins et de rééducation et concerne les patients tétraplégiques. Mais nous visons d’ici la fin de l’année une homologation pour les patients hémiplégiques qui peuvent espérer récupérer une partie de leurs capacités motrices en s’entraînant à remarcher», indique Matthieu Masselin, l’un des fondateurs.

>> En vidéo - Comment fonctionne un exosquelette ?

En parallèle, une autre équipe s’active sur un projet d’exosquelette personnel qui pourrait être disponible d’ici cinq ans. Une version plus légère, que les gens pourraient ramener chez eux et qu’ils pourraient utiliser dans leur vie quotidienne pour descendre… chercher leur baguette. «C’est en fait notre véritable objectif, un dispositif qui pourrait remplacer un fauteuil roulant et permettrait aux gens de monter un escalier, franchir un trottoir et marcher, sans limite.»

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Des nanoparticules pour mieux cibler les cancers

Les nanotechnologies arrivent sur le front du combat contre les cancers. La medtech française Nanobiotix, fondée par Laurent Lévy, un docteur en physique-chimie, a mis au point une nouvelle approche pour mieux cibler les tumeurs. On sait qu'environ 60% des patients atteints d’un cancer sont traités par radiothérapie. Problème: les rayons traversent des tissus sains qu’ils peuvent endommager du fait de la répétition des séances.

La solution de Nanobiotix, l’un des pionniers mondiaux de la nanomédecine? Injecter à l’aide d’une seringue, directement dans la tumeur, des nanoparticules qui vont décupler la force des rayons X, tandis que les autres tissus «non marqués» ne recevront que la dose standard. Les chances de succès pour une radiothérapie d'un sarcome des tissus mous seraient ainsi multipliées par deux.

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Nanobiotix a obtenu en avril le feu vert pour commercialiser son premier produit, baptisé «Hensify», dans toute l’Europe. D’ici cinq ans, il espère pouvoir proposer ses nanotechs pour traiter les cancers du poumon, du foie et de la prostate.

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Un jumeau numérique pour faciliter les interventions cardiovasculaires

Chaque année, en France, plus de 100000 chirurgies endovasculaires de l’aorte sont réalisées, avec leur lot de complications (20%) et de réinterventions. Comment réduire le nombre de ces complications? La start-up PrediSurge, née de la collaboration d’ingénieurs de l’Ecole des mines et de Jean-Noël Albertini, un chirurgien cardiologue du CHU de Saint-Etienne, a conçu un logiciel qui permet de fabriquer un jumeau numérique du patient et de simuler l’opération en amont.

Concrètement, les images médicales obtenues par scanner sont fusionnées pour reproduire l'anatomie du patient en 3D, en l’occurrence la partie de l’aorte concernée par l’anévrisme. «Avec cette technique de simulation numérique, le chirurgien peut choisir la prothèse qui s’insérera le mieux dans l’aorte et prévoir son comportement. Il peut même la dimensionner et la personnaliser», explique David Perrin, fondateur et CEO de PrediSurge.

Marché visé? Les fabricants de prothèses européens, américains et japonais intéressés par ce nouveau service qu’ils pourraient intégrer à leur offre. «D’ici cinq ans, on estime que la plupart des opérations concernant l’anévrisme aortique seront ainsi simulées en amont», indique David Perrin. L’équipe travaille déjà sur une version 2 qui pourrait être utilisée en cours d’opération, en projetant les images en 3D du jumeau numérique et de la prothèse sur grand écran afin d'aider le chirurgien à travailler encore plus précisément.

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Des lunettes électroniques pour libérer les presbytes

Porterez-vous bientôt des lunettes électroniques qui ajusteront automatiquement des verres variables en temps réel pour voir de près ou de loin sans rupture de qualité? L’ambition de Bruno Berge, le physicien fondateur de cette start-up baptisée Laclarée, est en tout cas de mettre ces lunettes sur le marché dès 2022 pour aider les presbytes qui supportent difficilement ou pas du tout les verres progressifs.

La technologie de ces lunettes électroniques repose sur trois modules: des verres à focales variables intégrant une membrane déformable coincée entre deux lames de fluide, un système de transmission électronique inséré dans la branche des lunettes et un système de détection de la distance de mise au point. L’idée est de reproduire le mouvement naturel de la lentille du fond de l’œil lorsque celle-ci ne fait plus son boulot.

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La distance de la vision est évaluée par le capteur infrarouge inséré dans la lunette. Celui-ci envoie le message au système, qui va courber la membrane déformable pour ajuster la correction en moins d’une seconde. Les premiers modèles pourraient arriver sur le marché à un prix entre 800 et 1200 euros.

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Une imprimante 3D pour personnaliser vos médicaments

Est-ce qu’en 2025 un patient prendra encore des comprimés pour se soigner ou ingérera-t-il des «imprimés»? Jean Alié, un chercheur qui travaille au centre de R & D de Sanofi à Montpellier est persuadé qu’il faudra trouver une nouvelle appellation pour qualifier la petite révolution concoctée dans son labo: des médicaments à dosage personnalisé fabriqués à la demande sur une imprimante 3D.

Pour quoi faire? «Le problème aujourd’hui est que l’on fabrique des comprimés en masse avec des dosages définis pour le plus grand nombre alors que l’on aurait besoin de dosages personnalisés, notamment pour les enfants et les personnes âgées. C’est ce que tentent de faire les pharmaciens en découpant les comprimés ou en les broyant», rappelle Jean Alié. Alors, avec son équipe, il travaille depuis deux ans à mettre au point l’impression en 3D de médicaments à dose personnalisée. Les molécules actives et les excipients se présentent sous la forme d’une bobine de filaments qui alimente l’imprimante afin de créer le médicament par dépôts successifs de couches de matière.

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Aujourd’hui, les chercheurs de Montpellier savent produire un comprimé par minute avec une imprimante Ultimaker 2 modifiée. «Nous devrons développer une machine aux normes de qualité pharmacie avec l’aide d’un fabricant», souligne Jean Alié. Il est convaincu que, d’ici cinq ans, on pourra trouver ces futures imprimantes dans les hôpitaux et les officines de ville. Le chercheur envisage même de pouvoir combiner plusieurs médicaments différents dans un seul «imprimé». Avantage? Cela réduirait le nombre de prises, les risques de confusion et les surdosages.

Des téléconsultations pour éviter les salles d’attente

Retourner chez votre médecin juste pour renouveler votre ordonnance? Patienter deux heures dans la salle d’attente simplement pour lui montrer l’évolution de cette rougeur sous votre bras? Demain ce ne sera plus qu’un mauvais souvenir, grâce à la téléconsultation depuis votre canapé. Cela fait des années qu’on en parle, mais le géant mondial de la prise de rendez-vous Doctolib a décidé de se lancer dans la bataille.

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Son obsession? Inventer le cabinet médical du futur. Avec ses 30 millions de visites de patients par mois sur ses sites et applis, ses 80000 médecins et 1400 hôpitaux et cliniques partenaires en France et en Allemagne, il veut accélérer le mouvement. «C’est un service additionnel que nous proposons. Depuis janvier, 1000 médecins se sont lancés et 20000 téléconsultations ont été réalisées ainsi, soit 85% du total déclaré en France», indique Philippe Vimard, le directeur général adjoint de la licorne française qui est valorisée à plus d’un milliard en bourse. Trois médecins sur quatre estiment déjà que la téléconsultation fera partie de leur quotidien d’ici dix ans.

Le fonctionnement est simple: lorsqu’il prend rendez-vous sur Doctolib, le patient peut cocher la case consultation vidéo (lorsqu’elle est disponible). A l’heure dite, le patient qui se connecte avec son smartphone se retrouve dans une salle d’attente virtuelle. Le médecin, averti de la connexion, démarre la consultation vidéo.

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En fin de séance il peut délivrer une ordonnance électronique avant de facturer ses honoraires (les mêmes que pour une consultation classique) et transmettre la feuille de soins à la Sécu. A terme, Doctolib imagine pouvoir intégrer d’autres fonctionnalités pour suivre l’équipement des médecins et des patients en objets médicaux connectés.

Un minipancréas artificiel pour gérer son diabète

Les diabétiques en rêvaient, Diabeloop est en train de l’inventer. Fini les contrôles de glycémie au bout des doigts, les piqûres trois fois par jour, les angoisses au moment du calcul de la dose d’insuline à s’injecter, la crainte de l’hypoglycémie qui vous entraîne vers un malaise, voire un coma, ou celle, à l’inverse, des hyperglycémies qui détruisent lentement vos terminaisons nerveuses.

D’ici cinq ans, des dizaines de milliers de patients devraient être équipés d’un minipancréas artificiel muni d’un algorithme malin qui gérera tout seul leur maladie. L’ensemble est léger et quasi imperceptible quand on le porte. Ce pancréas high-tech est constitué d’un petit capteur qui mesure le glucose, d’une minipompe à insuline et d’un terminal qui a l’aspect d’un smartphone.

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Le fonctionnement est très simple. «Le système est capable d’apprendre, c’est-à-dire que l’intelligence artificielle contenue dans le terminal s’adaptera au comportement de l’individu et à ses réactions aux doses d’insuline», assure Marc Julien, l’un des membres de l’équipe Diabeloop. Il sera dans un premier temps destiné aux diabétiques de type 1 insulinodépendants (ils sont 200000 en France) et prescrit par un médecin. Une version 2, déjà en cours de développement, visera spécifiquement le public des enfants. Puis viendra le tour des autres diabétiques (3 millions au total en France).

A terme, d’ici cinq à dix ans, l’arrivée de nouveaux types d’insuline à action ultrarapide et l’évolution des algorithmes permettront une gestion encore plus fine et automatisée du système, qui pourra gérer seul les périodes d’alimentation et d’activités des patients, tandis que pompe, capteur et terminaux seront miniaturisés et pourquoi pas intégrés en un seul objet.

Aux Etats-Unis, les chercheurs de Medtronic ont développé un produit semblable à celui de Diabeloop, qui a, lui, obtenu le feu vert de la Food and Drug Administration (FDA) pour être commercialisé dans le pays. La course ne fait que commencer.

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©Diabeloop

Comment fonctionne-t-il ?

Toutes les cinq minutes, le capteur placé sur l’abdomen envoie un résultat de glycémie au terminal via bluetooth. Puis l’algorithme développé par les chercheurs de Diabeloop analyse ces données en temps réel et calcule la dose d’insuline à administrer au patient, en prenant en compte ses paramètres personnalisés et les informations qu’il aura transmises (repas, activité physique, etc.). Le terminal envoie l’info à la pompe implantée sur le bras du patient, qui délivre la dose d’insuline nécessaire. Le tout prend quelques secondes.