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« Nous, citoyennes et citoyens marocains, déclarons que nous sommes hors la loi »

Contre le contrôle des mœurs, et pour la légalisation de l’avortement, plus de 470 Marocains signent une tribune, rédigée par la romancière Leïla Slimani et la réalisatrice Sonia Terrab, pour encourager leurs dirigeants à ouvrir un débat sur les libertés individuelles et la dépénalisation des relations sexuelles hors mariage.

Publié le 23 septembre 2019 à 09h01, modifié le 13 février 2024 à 16h08 Temps de Lecture 6 min.

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Des militants marocains manifestent en signe de solidarité avec Hajar Raissouni, journaliste inculpé de fornication et d’avortement, lors d’une manifestation organisée devant le tribunal de Rabat, au Maroc, le 9 septembre 2019.

Tribune. [Elles sont chefs d’entreprise, universitaires, femmes de ménage, artistes, professeures de lycée, mères de famille, banquières, etc. Ces femmes marocaines signent ensemble, et avec des hommes, un texte écrit en réaction au récent durcissement de la répression sexuelle dans leur pays. Ainsi la journaliste Hajar Raissouni fait actuellement l’objet de poursuites pour relations sexuelles hors mariage. Une ressortissante suédoise et son amant marocain ont également été arrêtés début septembre et risquent deux ans de prison pour adultère. En juillet, la presse révélait que l’actrice Najat El Ouafi avait été arrêtée pour le même motif. Contre le contrôle des mœurs, et pour la légalisation de l’avortement, ce collectif demande aux législateurs et aux gouvernants marocains d’ouvrir un débat sur les libertés individuelles et la dépénalisation des relations sexuelles hors mariage.]

Nous, citoyennes et citoyens marocains, déclarons que nous sommes hors la loi. Nous violons des lois injustes, obsolètes, qui n’ont plus lieu d’être. Nous avons eu des relations sexuelles hors mariage. Nous avons subi, pratiqué ou été complices d’un avortement. Nous avons appris à feindre, à composer, à faire semblant. Pour combien de temps encore ?

Chaque jour, chaque heure, en secret, en cachette, des femmes comme moi, des hommes comme toi, conservateurs ou progressistes, personnalités publiques ou anonymes, de tous les milieux et de toutes les régions, osent et s’assument, jouissent et existent par eux-mêmes, brisent des chaînes et bafouent des lois. Parce qu’ils aiment.

Chaque jour, je me rends coupable d’aimer et d’être aimée. Chaque fois qu’une femme est arrêtée, je me rends complice. Je me dis : ça aurait pu être moi… Puis je me tais, je passe mon chemin, je m’efforce d’oublier… Mais je n’y arrive plus. Je n’en peux plus. Car mon corps m’appartient, il n’appartient ni à mon père, ni à mon mari, ni à mon entourage, ni aux yeux des hommes dans la rue, et encore moins à l’Etat.

Je ne veux plus avoir honte

Aujourd’hui, je ne veux plus avoir honte. Moi qui aime, avorte, ai des relations sexuelles sans être mariée. Moi qui me cache. Moi qui risque le déshonneur, l’infamie, la prison. Cette culture du mensonge et de l’hypocrisie sociale génère la violence, l’arbitraire, l’intolérance. Ces lois, liberticides et inapplicables, sont devenues des outils de vengeance politique ou personnelle. C’est une épée de Damoclès qui nous menace et nous rappelle que notre vie ne nous appartient pas. Comment l’accepter ? Pourquoi l’accepter ? Encore et encore…

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