Edgar Degas en cinq oeuvres-d'art

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Edgar Degas en cinq oeuvres-d'art

Par
Le Tub, Le Foyer de la danse, Le Défilé
Le Tub, Le Foyer de la danse, Le Défilé
- Edgar Degas

L'antisèche . Longtemps considéré comme "le peintre des danseuses", Edgar Degas a pourtant eu une carrière bien plus diverse. Plongée dans l’œuvre de cet artiste aux multiples facettes, de la peinture à la sculpture, en passant par le dessin.

Il y a cent ans, le 27 septembre 1917, mourait le peintre Edgar Degas. Si l’on retient volontiers de lui qu’il était “le peintre des danseuses”, sa carrière a en réalité été bien plus vaste, de la peinture à la sculpture, en passant par le dessin et la photographie. Dans un documentaire diffusé dans l'émission "Une Vie Une Œuvre" le 23 septembre 2001, Luc Ponette retraçait la vaste carrière de cet artiste aux multiples facettes. A travers cinq de ses œuvres, revisitez une vie faite de multiples tentatives artistiques, à l’image de ces mots qu’il adressait au marchand Ambroise Vollard : "J'ai passé toute ma vie à essayer".

Edgar Degas (Une Vie Une Oeuvre, 23.09.2001)

1h 29

(Durée : 1h29)

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1. Le Foyer de la danse : la fascination pour l'Opéra de Paris

Le foyer de la danse, 32 x 43 cm
Le foyer de la danse, 32 x 43 cm
- Edgar Degas

C'est une petite toile (32 x 46 cm) peinte par Edgar Degas en 1872 dans le foyer intimiste de l'Opéra de Paris, encore situé rue Le Peletier à cette époque-là (avant le déménagement au Palais Garnier en 1875). Avec ce tableau, le peintre nous plonge dans la vie quotidienne de l'Opéra et des répétitions du ballet.

De la préparation des danseuses en coulisses à la scène, Edgar Degas a consacré une large partie de son œuvre aux danseuses, montrant aussi bien la fatigue du corps à l'épreuve de la danse que la danseuse immatérielle en scène. Cette passion pour le ballet lui avait valu l'épithète de "peintre des danseuses" , déjà, de son vivant, comme le souligne l'historien Henri Loyette au début du documentaire du Luc Ponette :

"Longtemps Degas a été le Degas des années 1870 et des années 1880 : un portraitiste, le peintre des danseuses. De son vivant-même, cet épithète de "peintre des danseuses" lui collait à la peau et était en quelque sorte un peu réducteur. Ce n'est que très récemment que l'on s'est aperçu de l'ampleur de sa carrière, et du fait qu'il y avait, de l'extrême début (c'est-à-dire le milieu des années 1850), jusqu'à l'extrême fin (aux alentours des années 1910), une même trajectoire, une même ligne mélodique. Je pense qu'il y a peu d'artistes qui ont ainsi tenu la longueur avec une telle rigueur et sans jamais faillir."

À écouter : Dansez avec Degas
La Grande table (1ère partie)
28 min

2. L'Autoportrait : les débuts du peintre

Autoportrait, huile sur papier (81 x 64 cm)
Autoportrait, huile sur papier (81 x 64 cm)
- Edgar Degas

Degas a très tôt ressenti la vocation de la peinture. Après de furtives études de droit, pour satisfaire ses parents, il décide finalement de se consacrer entièrement à la peinture et entre dans l'atelier du peintre Louis Lamothe en 1855. C'est ici la tradition ingresque qui intéresse Degas : Lamothe a en effet été l'élève de Flandrin, qui lui -même a été élève d'Ingres.

Lorsqu'Edgar Degas réalise cet autoportrait en 1855, il est alors âgé de 22 ans. C'est l'une de ses premières toiles, directement en écho à l'autoportrait d'Ingres peint en 1804. Il se présente ici sous un jour bourgeois et sérieux, alors qu'Ingres avait de son côté valorisé davantage la vision de l'artiste.

3. Le défilé : la modernité du cheval

Le Défilé, 46 x 81 cm
Le Défilé, 46 x 81 cm
- Edgar Degas

Loisir bourgeois à la mode, autant que l'occasion de réfléchir à la représentation du mouvement, le cheval est un thème récurrent de l’œuvre de Degas que l'on trouve dans ses carnet dès les années 1850. Anne Roquebert l'explicite dans cette archive "Une Vie Une Œuvre" : "C’est par le cheval que Degas entre dans la modernité."

Dans ce tableau Le défilé, aussi appelé Chevaux de courses devant les tribunes, peint entre 1866 et 1868, Degas insiste sur le caractère vivant de la scène pour traduire l'ambiance du champ de course. Anne Roquebert souligne d'une part la grande fluidité du tableau réalisé avec de la peinture à l'huile diluée avec de l’essence de térébenthine, et d'autre part sa précision et la maîtrise du motif. Les chevaux sont en effet dessinés au crayon puis à la plume, avant d'être peints.

4. La petite danseuse de quatorze ans : sculpture et célébrité

La petite danseuse de 14 ans
La petite danseuse de 14 ans
- Edgar Degas / M.T. Abraham Center, Wikicommons

Cette passion pour la précision et la forme est précisément ce qui va amener Degas à la sculpture, comme le souligne l'historienne Anne Pingeot :

"Il se rend compte que pour arriver à comprendre une forme, il fallait qu'elle soit en trois dimensions. Il l'a raconté à Thiebault Sisson. [...] Il explique que la sculpture, ce n'est qu'un moyen en soi pour sa peinture. Ce n'est pas une fin en soi. Nous nous considérons que sa sculpture est une fin en soi [...] mais pour lui, c'est vraiment obtenir plus de précisions."

Fasciné par le mouvement, Degas aborde la sculpture en choisissant un cheval pour premier modèle. L'artiste expérimente, invente, sculpte avec de la cire. Outre les chevaux, il sculptera aussi des danseuses. L'une des plus célèbres étant La petite danseuse de 14 ans. Derrière cette sculpture se cache une histoire bien réelle, celle de Marie, qui fut modèle de Degas et à laquelle la romancière Camille Laurens a récemment consacré un ouvrage qui porte le même titre que cette sculpture, La petite danseuse de quatorze ans. Née à l'époque dans l'un des quartiers les plus pauvres de Paris, la jeune Marie est entrée avec ses deux sœurs l'Opéra de Paris, suite à un engagement de groupe obtenu par la mère. Un jour qu'elle est sur scène, Degas est présent dans le public. La fascination opère. Cette statuette, dont le bronze a été réalisée à titre posthume, est aujourd'hui l'un des plus connues de Degas. "Parce qu'elle est profondément actuelle", soulignait Martine Kahn dans le documentaire radiophonique.

"Cent Merveilles" par Sacha Guitry
7 min

5. Le Tub : l'intimité du nu

Le Tub, 60 x 83 cm
Le Tub, 60 x 83 cm
- Edgar Degas

Le Tub, œuvre au pastel réalisée en 1886 par Degas, a déconcerté ses contemporains. Autant par la perspective que par l'intimité de la scène, comme le soulignait Anne Roquebert :

"La critique de l'époque a été extrêmement virulente contre ses tableaux, et en particulier contre celui-là, en parlant de batracien. Degas disait lui-même que, contrairement au nu traditionnel, qui était toujours prévu en fonction du public, cherchant plus ou moins un effet, au contraire ses personnages étaient comme vus à travers le trou de la serrure. Ce côté intimiste de la scène a probablement dérangé ses contemporains. Et sa réputation de misogyne est partie de ce type de peinture, orchestrée par une critique un peu hostile."

Qu'il s'essaye au pastel, au dessin ou encore à la sculpture, c'est toujours pour Degas l'occasion de se perfectionner. Mais toujours pour mieux revenir à la peinture. Ce qui faisait dire au peintre Gilles Sacksick devant Le Tub : "C'est un pastel, et pour moi c'est une peinture. Degas est quelqu'un qui peint, même quand il dessine."

51 min