Les plus de 60 ans se sentent plus seuls dans les quartiers et les petites villes

La disparition des services et des commerces de proximité favorise l’isolement des 17,5 millions de seniors.

 Des trottoirs plus larges agrémentés de bancs dans les villes périphériques et les banlieues, des transports à la demande en zones rurales, préconisent les Petits frères des pauvres.
Des trottoirs plus larges agrémentés de bancs dans les villes périphériques et les banlieues, des transports à la demande en zones rurales, préconisent les Petits frères des pauvres. AFP/Olivier Morin

    Selon l'endroit où l'on vit, on n'est pas égaux devant la solitude quand on vieillit. Ce constat ressort d'une étude CSA (*), publiée ce dimanche par l'association Les Petits frères des pauvres, qui appelle au maintien des services et commerces de proximité dans ces territoires.

    Parmi les plus de 60 ans, ils sont 27 % à dire souffrir de la solitude. Mais cette proportion monte à 32 % dans les « quartiers prioritaires de la politique de la ville » (QPV), et à 31 % dans les petites agglomérations de 2 000 à 20 000 habitants. C'est donc que le sentiment de solitude touche davantage les personnes âgées dans les quartiers dits « sensibles » et dans les petites villes, voire les villages.

    Certes, relève l'association, les habitants des zones rurales bénéficient de « solidarités plus fortes », mais ils pâtissent par ailleurs d'un « manque de services du quotidien et de transports qui renforce l'isolement ».

    En banlieue, une « perception négative de l'environnement »

    Pour les aînés installés dans les petites et moyennes villes, c'est la double peine : ces territoires cumulent les désavantages des zones rurales - comme la « raréfaction des services publics et des services de proximité » - avec ceux des grandes zones urbaines, où les relations de voisinage et la solidarité sont plus faibles. En outre, les seniors installés dans les banlieues ont une « perception négative de leur environnement » qui renforce leur « sentiment de solitude et d'isolement » - lequel atteint d'ailleurs 45 % des résidents de HLM âgés de 60 ans et plus.

    Dans les quartiers prioritaires, comme ailleurs, la population vieillit, mais là « les aînés sont tout simplement en train de devenir les grands oubliés », dénonce l'association qui regrette que les politiques de la ville se focalisent essentiellement sur les plus jeunes.

    Ce constat est d'autant plus triste que d'autres études récentes montrent que les seniors ne se sentent pas « vieux » et qu'ils ne manquent d'énergie ni pour s'occuper de leurs petits-enfants ni pour veiller sur leurs propres parents.

    Faciliter les mobilités de proximité

    En 2019, l'Insee recense 17,5 millions de plus de 60 ans, soit 26,2 % de la population totale. Dans la « Silver économie », la filière des « cheveux blancs », les entreprises rivalisent d'innovations pour aider une population vieillissante à rester en bonne santé, si possible à domicile et avec la capacité de se déplacer. L'an dernier, une étude du Laboratoire de la mobilité inclusive montrait que 36 % des plus de 60 ans, renonçaient à se déplacer faute de transports adaptés.

    Les Petits frères des pauvres constatent la même chose puisqu'ils préconisent des politiques facilitant les mobilités de proximité, en aménageant l'espace public par des bancs ou des trottoirs mieux adaptés aux personnes à mobilité réduite, et en développant les transports à la demande.

    Mais les innovations pour repousser l'âge de la dépendance ne peuvent pas toutes reposer sur les collectivités et ont un coût, que tous les aînés ne peuvent pas se permettre. Ainsi l'association dénonce-t-elle l'apparition d'une « industrie de la compagnie », qui propose des « prestations commerciales promettant de lutter contre l'isolement de nos aînés », par des parties de cartes ou des visites « de courtoisie »… payantes. « Retisser des liens dans la durée repose à l'évidence sur des rencontres profondes et sincères, sans contrepartie d'ordre commercial », estiment les « Petits frères ».

    (*) Enquête réalisée auprès d'un échantillon représentatif de 1.503 personnes âgées de 60 ans et plus (méthode des quotas).