Les objectifs climatiques de l’aviation menacent… trois millions d’hectares de forêts tropicales

Pour atteindre des objectifs de réduction de CO2, l’industrie aéronautique pourrait faire appel à des agrocarburants à base d’huile de palme.

 La demande d’huile de palme pour l’aviation serait de 35 millions de tonnes supplémentaire par rapport aux 70 millions de tonnes produites actuellement
La demande d’huile de palme pour l’aviation serait de 35 millions de tonnes supplémentaire par rapport aux 70 millions de tonnes produites actuellement AFP

    Les objectifs climatiques affichés par l'industrie aéronautique pourraient entraîner une perte de 3,2 millions d'hectares de forêts tropicales, selon une étude réalisée par Rainforest Foundation Norway.

    Alors que l'Assemblée générale de l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) se réunit à Montréal, ce rapport passe en revue les objectifs que l'industrie aéronautique s'est fixés en matière de carburants de substitution. Or, il montre à quel point le développement de l'utilisation de biocarburants dans l'aviation risque de provoquer une véritable catastrophe écologique.

    L'équation sur la table est la suivante : le secteur de l'aviation s'est fixé pour objectif de réduire ses émissions de CO2 de 50 % en 2050 par rapport à 2005 et ce malgré le doublement de la flotte aérienne dans le monde d'ici 2038.

    Or pour tenir cette ambition, les experts de la fondation estiment qu'il faudrait remplacer presque intégralement les combustibles fossiles (kérosène) par des biocarburants alternatifs. Actuellement, la solution la moins coûteuse et la plus facilement disponible pour opérer cette mutation est d'utiliser de l'huile de palme.

    Proposer de nouvelles solutions

    Le rapport estime que d'ici 2030, la demande d'huile de palme serait de 35 millions de tonnes supplémentaire, de 3,5 millions de tonnes de sous-produits de l'huile de palme mais aussi de 35 millions d'huile de soja. Aujourd'hui, la production annuelle mondiale d'huile de palme avoisine les 70 millions de tonnes. Ce scénario aurait pour conséquence la destruction de l'équivalent de la superficie de la Belgique de forêts tropicales…

    « L'industrie aéronautique risque de devenir une menace majeure pour les forêts tropicales humides du monde. Bien que l'utilisation proposée par l'OACI de carburants d'aviation de remplacement vise à réduire les émissions, elle risque en réalité de provoquer des émissions massives résultant de la destruction des forêts tropicales et des tourbières, ainsi que de la perte de biodiversité et des violations des droits des peuples tributaires de la forêt », a expliqué Nils Hermann Ranum de Rainforest Foundation Norway. Il demande à l'industrie aéronautique de proposer de nouvelles solutions technologiques plus durables et aux politiques d'en prendre conscience.

    D'autres pistes sont envisagées. À commencer par des avions moins polluants. Dans ce domaine des progrès ont été réalisés. Depuis 2005, la consommation moyenne des avions de ligne a diminué de 24 %.

    Cela pourrait aussi passer par une nouvelle organisation du trafic aérien notamment en Europe qui permettrait aussi d'éviter des retards, des temps de roulage sur les pistes trop long…

    Enfin, l'Union européenne avait tenté d'imposer en 2012 un système de compensations sous la forme de permis d'émissions (ETS) payés par les compagnies. Sauf que cette initiative unilatérale européenne reste pour le moment cantonnée aux vols intra-européens.