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En Hongrie, à un jour des élections législatives, le nom du grand vainqueur ne fait plus guère d'illusion. Le Premier ministre Viktor Orban (déjà en poste de 1998 à 2002) et son parti conservateur, Fidesz, s'apprêtent pour la seconde fois consécutive à ravir ce scrutin après leur impressionnant score de 52,7 %, obtenu en 2010.
Dans tous les sondages, et ce depuis plusieurs mois, Fidesz laisse peu d'espoir aux autres forces politiques. L'institut hongrois de référence, Median, crédite ainsi la formation de droite d'une confortable avance dans les intentions de vote (47 %). Bien loin devant la coalition de gauche - rassemblant socialistes et libéraux - qui parvient difficilement à rassembler 23 % des voix, talonnée de près par la formation d'extrême-droite Jobbik qui pointe à 21 %. Seule incertitude persistant donc: quelle sera l'ampleur du raz de marée électoral?
Une opposition hagarde
En effet, face à Fidesz, la principale force d'opposition de gauche fait quelque peu pâle figure, explique Antonela Capelle-Pogacean. Pour la chargée de recherche au Sciences Po-CERI, la coalition a commis l'impair "d'avoir voulu faire de ces législatives un vote de défiance face au pouvoir en place, sans proposer de réel programme alternatif crédible". Le nom même de la coalition, "Changer de gouvernement", met à lui seul en lumière l'absence de projet politique durable. D'autant que la gauche et ses leaders portent le fardeau du "désastreux bilan des années de gouvernance (entre 2006 et 2010, NDLR), marquées par les scandales de corruption, le creusement de la dette et l'appauvrissement du pays" explique-Catherine Horel, historienne et directrice de recherche au CNRS.
Et à l'approche du scrutin, le pouvoir n'a rien fait pour faciliter la tâche de l'opposition. Fidesz, majoritaire au Parlement, a fait récemment passer une loi électorale qui simplifie "la création de partis politiques financés par de l'argent public", rappelle The Economist. Une promotion de la démocratie, justifie-t-on côté conservateur ; un moyen de troubler les électeurs et ainsi de morceler l'opposition, dénonce-t-on dans les rangs adverses.
Le pouvoir législatif a également décidé de diviser de moitié le nombre de députés - passant de 386 à 199 - siégeant à la Diète hongroise (Parlement). Une réduction - voulue pourtant par l'ensemble du corps politique - qui a engendré par la suite un redécoupage de la carte électorale du pays, au grand dam de l'opposition. En effet, beaucoup de circonscriptions, dominées par la coalition de gauche (ou parfois par Jobbik) ont été ainsi fragmentées, puis noyées dans des bastions du Fidesz.
Une refonte globale de la Hongrie
Face à cette opposition hagarde, la majorité sortante s'engage dans la campagne forte d'un bilan "pas si mauvais que cela", estime Catherine Horel. Viktor Orban a - timidement - fait repartir la croissance (+ 1,1 % en 2013), stoppé l'envolée du chômage et est même parvenu "à maintenir le déficit en dessous des 3 % imposés par l'UE et ce sans procéder à de lourdes coupes budgétaires à l'instar d'autres pays européens comme l'Espagne ou la Grèce", analyse l'historienne.
Une relance économique qui s'est accompagnée d'une refonte globale de l'état hongrois. Le leader politique "a voulu, au travers de sa politique, refaçonner le pays, sa constitution, son administration" et rompre ainsi avec l'ère socialiste et en partie postcommuniste, analyse Antonela Capelle-Pogacean de Sciences po-CERI. Pour cela, il a progressivement pris le contrôle des différentes institutions du pays (Parquet général, commission électorale, Banque centrale, organes de presses etc.) en imposant à leur tête "des fidèles", explique Catherine Horel. Donnant à la Hongrie, selon les détracteurs du Premier ministre, des airs d"'Orbanistan".
Malgré ces dérives parfois autoritaristes et un culte de la personnalité notoire, Viktor Orban a su gagner la confiance des Hongrois, notamment en séduisant une partie conséquente des indécis - mal électoral récurrent dans le pays - grâce à plusieurs mesures populaires. "Le Premier ministre s'est en effet engagé à baisser de près de 20 % les prix de l'énergie en 2013. Une dépense importante dans les budgets des foyers hongrois", rappelle Antonela Capelle-Pogacean. Autre fait d'arme médiatique du leader du Fidesz : avoir su jouer avec la fibre patriotique de la population, en offrant par exemple le droit de vote à plusieurs centaines de milliers de Hongrois de souche, vivant hors du pays des Magyars.
Les dérives populistes du Fidesz
Et pour asseoir un peu plus son pouvoir, Viktor Orban n'a également pas hésité à flirter avec le populisme.Dans les premières années de son second mandat, en vue de siphonner les voix du parti d'extrême-droite Jobbik, qui a le vent en poupe, "Viktator" s'en prend à la minorité rom (7 % de la population hongroise), épineux sujet dans le pays. Le Premier ministre décide ainsi d'abaisser drastiquement les aides sociales, vitales pour une communauté où un Rom sur deux est au chômage.
L'homme envisage même d'imposer aux bénéficiaires des travaux d'intérêt général sur des grands chantiers en échange de leurs minimas sociaux. Une idée directement puisée dans le programme du Jobbik. "Des discours et des pratiques mis en sommeil par le gouvernement depuis, suite aux pressions de l'UE et les réticences d'une part importante de la population hongroise", rappelle Catherine Horel.
Une volte-face qui en dit long sur le "pragmatisme politique" de ce fin tacticien, rappelle l'historienne. Il aurait d'ailleurs fait un "excellent" entraineur de football, ironise Zoltan Somogyi, analyste pour le Think Tank Political Capital, cité par The Guardian. Avant de se raviser : "Orban aime trop changer les règles du jeu. Il voudrait avoir au moins quatorze joueurs sur le terrain dont deux gardiens et que l'arbitre soit aussi son meilleur ami".
L'Europe accepte, insidieusement, que cette graine de dictateur prospère sur le lit du néo-libéralisme.
Inexorablement le totalitarisme grandit et confrontés á la paupérisation galopante de nos états-nations, mis á sac, par la grande entente bancaire mondiale. Progressivement les consciences en viennent á comprendre que voter pour les partis xénophobes, est compréhensible, excusable, comme une sorte d'égarement momentané !
C'est un tournant, et il serai bien que notre vigilance devienne opérationnelle.
En d'autres mots, Viktor Orban se préoccupe de ce que sa population veut et délivre des résultats.
De telles méthodes politiques, quelle horreur !
Il n'est pas si loin le temps où ce même Orban était voué aux gémonies par la bienpensance européenne. Oh ! Certes, tout n'est point parfait, mais il apparait, en effet, que ce dirigeant ne réussit pas trop mal. C'est en tous cas ce que semble penser une grande majorité de hongrois.