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CHRONIQUE «LE FIL VERT»

Météo France : «Une de nos missions est de conserver la mémoire du climat»

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Anne Debar, directrice générale adjointe à Météo France, détaille comment son organisation est de plus en plus amenée à lier prévisions météorologiques et recherche sur le dérèglement climatique.
par Aude Massiot
publié le 8 octobre 2019 à 6h23

 Tous les jours, retrouvez le fil vert, le rendez-vous environnement de Libération. Aujourd’hui, c’est la règle de trois : trois questions à un acteur de la transition écologique pour décrypter les enjeux environnementaux.

Anne Debar est directrice générale adjointe à Météo France. Lors d'une réunion du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (Giec), à Toulouse fin août, elle a expliqué à Libération comment son organisme doit s'adapter à l'évolution du changement climatique.

Comment gère-t-on à Météo France le lien de plus en plus fort entre météorologie et climatologie ?

Une de nos missions est de conserver la mémoire du climat et de suivre son évolution. Météo France a été un des premiers services météorologiques créés dans le monde. Nous avons des bases très riches de données enregistrées par nos stations depuis plus d’un siècle. Une autre de nos missions, plus connue, est la prévision du temps et de mettre en alerte les autorités et la population sur la venue potentielle d’événements dangereux. Or nous voyons clairement des relations entre ces phénomènes météorologiques ponctuels et les résultats de recherche que nous avons sur l’évolution du climat passé et futur.

Sur certains paramètres comme les températures estivales, il y a une corrélation totale. C'est moins clair pour, par exemple, les précipitations qui varient beaucoup d'une année à l'autre. Sur la question des cyclones, il n'y en aura pas forcément plus mais il est probable qu'ils soient de plus forte intensité. Il n'y a qu'à voir ceux qui ont frappé les Antilles et les Caraïbes ces dernières années. Parce qu'on a cette double casquette, on a un rôle important à jouer pour aider à la décision d'un ensemble d'acteurs de l'adaptation au changement climatique.

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Pour la canicule de fin juin, Météo France a prévenu plusieurs jours à l’avance. Est-ce une leçon apprise de celle de 2003 ?

On adapte en permanence le dispositif de vigilance qui est piloté par les ministères de l’Environnement et de l’Intérieur, parce que les attentes de la population évoluent aussi. On gagne de plus en plus de temps dans l’anticipation. Certains phénomènes sont plus ou moins faciles à prévoir parce que l’atmosphère reste quelque chose de chaotique. Les canicules sont relativement vues en avance, alors que les orages, par exemple, sont plus difficiles à anticiper et à localiser. Pour aider les acteurs publics et économiques à anticiper et limiter les dommages, on essaye de mettre de plus en plus à disposition nos données, notamment celles transmises par les satellites.

Pour les canicules de juin et juillet, vous avez rapidement attribué la probabilité de ces phénomènes au dérèglement climatique…

Nos modèles de projection scientifiques permettent de comparer un événement à ceux du passé et, ainsi, de le qualifier par rapport au changement climatique. Pour les canicules, on peut déterminer qu’elles deviendront plus intenses et plus fréquentes dans les décennies à venir. Aujourd’hui, nos moyens de calcul apportent des informations plus fines et plus riches à l’échelle du kilomètre. Pour le grand public, on doit travailler sur la manière dont sont perçues les informations. Par exemple, on entend dire qu’il y a trop souvent de la vigilance orange et que cela devient difficile d’évaluer la gravité du phénomène. On fait très attention. Météo France est évalué par des organes ministériels sur les fausses alertes et la non-détection.

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