«Ces campements de migrants au nord de Paris sont d’une indignité incroyable»

Dominique Versini, adjointe à la maire de Paris, s’inquiète des conditions de vie des réfugiés qui s’entassent au nord de la capitale et dénonce un durcissement de l’Etat sur le sujet.

 Dominique Versini (à droite), adjointe de la Ville en charge des réfugiés, au côté de la maire de Paris, Anne Hidalgo.
Dominique Versini (à droite), adjointe de la Ville en charge des réfugiés, au côté de la maire de Paris, Anne Hidalgo. LP/Delphine Goldstejn

    Alors que doit se tenir le débat sur la « politique migratoire de la France » à l'Assemblée nationale, ce lundi 7 octobre, Dominique Versini, adjointe à la maire de Paris chargée des solidarités, de la lutte contre l'exclusion et des réfugiés, s'alarme de la surpopulation et des conditions de vie dans les camps de migrants installés au nord de la capitale. Ils sont désormais entre 2500 à 3000 à s'entasser sous des tentes, entre les portes de la Chapelle (XVIII e ) et d'Aubervilliers (XIX e ).

    Quel regard portez-vous sur la situation des migrants, dans le nord-est parisien ?

    Dominique Versini. C'est très inquiétant et la position du gouvernement à ce sujet s'est durcie. Depuis cinq ans, la Ville pousse l'Etat à avancer sur la gestion de la crise migratoire, mais il y a des divergences politiques. Ces personnes vivent dans des conditions d'une indignité incroyable. Un enfer. Et lorsqu'on les accueille dans une halte humanitaire, l'Etat répond que nous créons un appel d'air… Comme si des gens venaient du Somalie pour bénéficier d'un repas et de sanitaires porte de la Chapelle! Nous ne faisons que tenter de répondre à des besoins fondamentaux, vitaux.

    /
    / LP/Delphine Goldstejn

    Quelles sont les actions de la Ville pour les aider ?

    Nous offrons 23 000 places d'hébergement à l'année. Un accueil humanitaire a également été créé avec la ville de Saint-Denis (Seine-Saint-Denis) en mai dernier et nous continuons à mettre à la disposition de l'Etat des bâtiments municipaux. Nous venons encore de faire de nouvelles propositions, qui sont en stand-by.

    Par ailleurs, nous finançons, à parts égales avec l'Etat, la maraude de France Terre d'Asile qui s'attache à repérer les personnes les plus vulnérables, et à les conduire vers l'un des lieux d'accueil. Celui du boulevard Henri-IV, notamment, financé à 100 % par la Ville.

    Paris, le 25 septembre 2019. Tous les soirs, devant le centre Rosa Parks (XIXe), des familles de migrants sont redirigées vers des hébergements d’urgence.LP/Arnaud Dumontier
    Paris, le 25 septembre 2019. Tous les soirs, devant le centre Rosa Parks (XIXe), des familles de migrants sont redirigées vers des hébergements d’urgence.LP/Arnaud Dumontier LP/Delphine Goldstejn

    Sur ces campements, qu'est ce qui vous semble le plus préoccupant actuellement ?

    Le nombre de familles, d'enfants. Depuis la fermeture en avril 2018 de la « bulle », la structure d'accueil modulaire que nous avions installée durant 18 mois à la Chapelle, elles se retrouvent sur les trottoirs.

    J'étais récemment à la caserne Exelmans (XVI e ), que la Ville a rachetée et mise à disposition de l'association Aurore pour y accueillir des migrants. Une jeune Somalienne, qui doit accoucher très prochainement, m'a expliqué avoir vécu des mois sur le campement de la Chapelle, dans la terreur, enceinte, avec son fils de 9 ans et son mari, malgré son statut de réfugiée politique. Alors que les exilés continuent d'affluer dans la capitale, la mise à l'abri de chacun doit être inconditionnelle.