L'Inde en guerre contre la tuberculose

Patients dans un centre de soins de la tuberculose à New Delhi, le 26 septembre 2019 ©AFP - Money Sharma
Patients dans un centre de soins de la tuberculose à New Delhi, le 26 septembre 2019 ©AFP - Money Sharma
Patients dans un centre de soins de la tuberculose à New Delhi, le 26 septembre 2019 ©AFP - Money Sharma
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La conférence de reconstitution du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme se poursuit à Lyon. L'Inde compte 1/4 des cas de tuberculose estimés dans le monde. De nouveaux médicaments voient le jour pour traiter des cas extrêmes de résistance aux antibiotiques.

Ce jeudi, se poursuit à Lyon une importante conférence internationale du Fonds mondial contre le sida, la tuberculose et le paludisme où les chefs d’Etats et de gouvernements doivent s’engager à augmenter le financement de la lutte contre ces trois maladies. L’une d’entre elles est généralement oubliée : la tuberculose. Elle est perçue dans les pays occidentaux comme un mal d’un autre temps. Pourtant, la tuberculose est depuis trois ans la maladie infectieuse la plus meurtrière du monde, devant le sida : 10 millions de personnes sont infectées chaque année, et 1 million 600 000 en meurent. Un pays est particulièrement dévasté par ce fléau : l’Inde. Il compte 1/4 des cas de tuberculose estimés dans le monde. Les autorités se sont lancées dans une course infernale pour réduire son impact et lutter contre une forme encore plus dangereuse de tuberculose : celle qui résiste aux antibiotiques traditionnels. Par chance, de nouveaux médicaments viennent de voir le jour et les associations se battent pour que les patients les obtiennent avant de mourir.

Reportage du correspondant de RFI et Radio France en Inde, Sébastien Farcis.

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Un traitement gratuit dans les hôpitaux publics

Bharti Kapar vit avec sa famille dans une toute petite maison du bidonville de Narela, en banlieue nord de New Delhi. Cette femme de 24 ans a souffert de toux aiguës et d’infection aux poumons pendant un an, avant qu’on lui offre le bon diagnostic. Elle avait la tuberculose

J’ai vu 4 docteurs privés différents, qui disaient tous que j’avais la typhoïde. J’ai été hospitalisée trois fois. Mais au bout d’un an, je n’allais toujours pas mieux. Je ne pouvais quasiment plus bouger. C’est alors qu’on a entendu parler de la tuberculose. J’ai suivi un traitement de six mois et maintenant je vais mieux. Mais je reste faible. Je ne peux pas lever d’objets lourds et je m’essouffle rapidement.

Le traitement de la tuberculose dans les hôpitaux publics est gratuit en Inde, mais ses structures sont souvent bondées et peu hygiéniques. La majorité des Indiens vont d’abord voir des médecins privés moins bien formés, ce qui ralentit la détection de la maladie. 

Or la situation est grave : l’Inde compte 1/4 des cas de tuberculose estimés dans le monde et plus de 400 000 Indiens en meurent chaque année

Des membres de l'Association indienne de la tuberculose (TB) lors d'un rassemblement de sensibilisation organisé lors de la Journée mondiale de la tuberculose à Hyderabad (sud de l'Inde), le 25 mars 2019.
Des membres de l'Association indienne de la tuberculose (TB) lors d'un rassemblement de sensibilisation organisé lors de la Journée mondiale de la tuberculose à Hyderabad (sud de l'Inde), le 25 mars 2019.
© AFP - Noah Seelam

Objectif : éradiquer la tuberculose d'ici 2025

En 2017, le gouvernement décide donc d'accroître ses efforts. Il double le budget de la lutte contre la tuberculose, avec comme objectif d’éradiquer cette maladie d’ici à 2025, en insistant sur la prévention. Kuldeep Singh Sachdeva est le directeur adjoint du programme national contre la tuberculose :

La malnutrition est l’une des causes principales de l’infection. Le gouvernement indien offre donc maintenant une aide alimentaire de 500 roupies par mois à chaque patient. Nous offrons également un traitement préventif aux malades du sida, qui sont très vulnérables, et aux enfants de moins de 5 ans dont un proche a la tuberculose.

Cette nouvelle politique n’a pas encore permis de réduire le nombre de malades mais a contribué à mieux les identifier. Le défi est maintenant de les soigner correctement. Car le traitement de la tuberculose est long et compliqué : le patient doit prendre au minimum 4 médicaments par jour, pendant au moins six mois. Or beaucoup abandonnent en cours de route, soit parce que les doses prescrites sont trop fortes, soit car leur corps ne supporte pas le traitement. Le patient n’est ainsi pas guéri et développe une résistance à ces antibiotiques. Il devient alors encore plus difficile de combattre cette maladie, comme en témoigne Nandita Venkatesan, journaliste de la classe moyenne de Bombay :

J'ai survécu à deux tuberculoses aux intestins. Pour guérir, j'ai dû subir 6 opérations chirurgicales. J’ai aussi perdu une partie de mon audition à cause des injections de kanamycine. C'est un vieux médicament, très nocif, qui entraîne beaucoup d'effets secondaires. Si je vous parle aujourd’hui, c'est grâce à un appareil auditif. 

Selon l’OMS, moins de la moitié des patients multirésistants aux antibiotiques peuvent être guéris en Inde. Mais cela pourrait bientôt s’améliorer, car pour la première fois depuis cinquante ans, deux nouveaux médicaments ont été inventés pour traiter ces cas extrêmes : le bédaquiline et le delamanid. Ces antibiotiques sont chers et jusqu’à présent un nombre limité d’Indiens y ont accès. Cependant, pour la première fois, le gouvernement prévoit d’acheter du bédaquiline. Ce qui permettrait de mieux lutter contre la forme la plus agressive de tuberculose. 

© AFP - John Saeki

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