Le Musée d’art moderne de la Ville de Paris retrouve ses couleurs

Après un an de travaux, le Musée d’art moderne de la Ville de Paris rouvre avec une nouvelle entrée et des salles toutes neuves. Redécouverte.

 Pierre Bonnard (1867-1947). "Le déjeuner". Huile sur toile, vers 1932. © Musée d’Art Moderne de Paris/Roger-Viollet © ADAGP
Pierre Bonnard (1867-1947). "Le déjeuner". Huile sur toile, vers 1932. © Musée d’Art Moderne de Paris/Roger-Viollet © ADAGP

    De tous les musées gratuits de la Ville de Paris - pour les collections permanentes, les expositions temporaires étant payantes - c'est le plus grand, et celui qui offre les plus belles vues sur la Seine et la tour Eiffel à travers ses immenses baies vitrées. Comme des tableaux vivants. Le musée de la Ville de Paris fait peau neuve et a ouvert vendredi après une fermeture partielle d'un an, pour des travaux liés à une meilleure accessibilité de tous les publics. Si 537 0000 personnes l'ont visité en 2018, un chiffre correct mais loin des millions des grands musées de peintures dont il se rapproche, c'est peut-être parce que ces collections permanentes gratuites - 500 œuvres du XXe siècle, peintures, sculptures, mobilier, céramiques, bijoux… - on n'en voyait pas l'entrée.

    On ne pourra plus les ignorer, maintenant que le plancher du hall d'accueil a été percé de manière spectaculaire pour offrir une entrée directe vers ces salles tout en bas, presque invisibles, loin des expositions. Un escalier vers la grande peinture du XXe siècle.

    De Bonnard à Vuillard

    L'architecture art déco du monument raconte le Paris d'avant-garde début de siècle : nulle part ailleurs, on ne peut voir l'immense tour Eiffel colorée de Robert Delaunay avec la vraie en arrière-plan, à travers les baies. Fabrice Hergott, le directeur du musée, a ressorti des toiles qui n'avaient parfois presque jamais été exposées depuis la création du musée en 1937 : par exemple, dans un magnifique ensemble Dufy, ce portrait d'une femme pas spécialement jolie, mais cernée dans sa présence pure, avec un chemisier aux plis d'une virtuosité et d'une luminosité qui signent le grand art.

    Stéphane Chalmeau
    Stéphane Chalmeau

    C'est le musée des chefs-d'œuvre - de Bonnard à Vuillard - et d'histoires incroyables. Fabrice Hergott consacre, pendant quelques mois, toute une salle à un artiste totalement inconnu. « Il faut montrer une histoire plus ouverte », dit-il. Un double cadeau : Peng Wan Ts fête ses 80 ans. Ce Chinois installé en France est célébré par un ensemble de toiles, et il en offre une au musée. La reconnaissance d'un homme à la technique étourdissante qui n'a presque jamais voulu montrer ses toiles, certaines dérangeantes, bébé hurlant, bourgeois corrompus, d'autres d'une force poignante, un enfant joyeux, l'autre triste, devant leur mère.

    Hans Hartung à découvrir

    Cinq cents œuvres gratuites donc. Et si vous êtes fou de pure peinture, dépensez quand même 13 € (ou rien si vous avez moins de 18 ans), pour l'exposition inaugurale Hans Hartung (1904-1989), un géant de l'abstraction en France. Mais géant, on l'ignorait avant.

    On connaissait quelques toiles un peu stéréotypées vues dans de grands musées. On le voyait sec. Ses couleurs acryliques à la bombe sont au contraire d'une douceur d'un autre monde, ses roses et ses bleus, parfois jetés sur la toile à l'aide de branches plutôt que de pinceaux, pour provoquer des accidents magnifiques. Une peinture méditative dans d'immenses formats qui donnent envie de s'asseoir et de rester là, à prendre un bain chaud de couleurs.

    Musée d'Art moderne de la Ville de Paris, 11, avenue du Président-Wilson, Paris XVIe. De 10 heures à 18 heures, et jusqu'à 22 heures le jeudi. Fermé lundi.

    Robert Delaunay (1885-1941). « Tour Eiffel ». Huile sur toile, 1926. Paris, musée d’Art moderne. null ADAGP, Paris, 2019
    Robert Delaunay (1885-1941). « Tour Eiffel ». Huile sur toile, 1926. Paris, musée d’Art moderne. null ADAGP, Paris, 2019