En 2013, quand le notaire de Pierre-Louis Gilbert, mort le 11 juin 2011 à l’âge de 86 ans, le contacte pour lui annoncer que la commune de Châteauneuf-sur-Cher était bénéficiaire d’un legs testamentaire d’environ 300 000 €, William Pelletier, son maire, a marqué « un temps d’arrêt ». L’effet de surprise fut d’autant plus grand que le retraité, veuf et sans enfants, avait déjà, de son vivant, offert 150 000 francs pour aider ce village de 1 450 habitants, étranglé financièrement, à se relever.

Élu municipal depuis 1995, le maire n’était pas un intime de Pierre-Louis Gilbert, qui résidait dans sa commune natale, située à douze kilomètres de Châteauneuf-sur-Cher. En 1996, connaissant la situation économique du village, qui est passé tout près d’une mise sous tutelle par la préfecture du Cher, ce dernier était venu le voir pour lui proposer son aide sans « demander de contrepartie, sinon celle que, le moment venu, la mairie entretienne sa sépulture ». William Pelletier reste encore étonné et ému par ce geste « citoyen et désintéressé d’un homme discret, qui a travaillé toute sa vie aux établissements militaires de Bourges, et qui avait un solide noyau familial et amical dans la commune ».

Testament contesté

Pierre-Louis Gilbert, qui a passé les dernières années de sa vie dans une maison de retraite de Bourges, avait passé sous silence ses dispositions testamentaires. Né à Trouy, une commune voisine, l’homme n’a jamais caché son attachement pour Châteauneuf-sur-Cher, d’où venait sa maman. « Elle a vécu ici jusqu’à la fin de sa vie », témoigne William Pelletier, ancien infirmier libéral, qui a longtemps soigné la famille. Cette proximité pendant plus de quarante ans avec la population locale lui a permis de tisser des liens « de confiance, parfois d’amitié » avec ses patients. C’est sans doute ce qui explique que la commune a, au cours des deux dernières décennies, bénéficié de deux biens immobiliers, légués par des habitants sans descendants, souhaitant marquer leur attachement au village.

Le souhait de Pierre-Louis Gilbert n’a toutefois pas fait que des heureux. Ses héritiers – des cousins – ont contesté le testament, ce qui a donné lieu à trois ans de bataille juridique, jusqu’à ce que le tribunal de grande instance de Bourges ordonne le versement à la mairie de 288 788 €, auxquels s’est ajoutée « une somme de près de 15 000 €, qui correspond à la souscription d’une assurance-vie en notre faveur », précise le maire.

Remises à flot après dix années d’effort, les finances de la commune ont permis, depuis quelques années déjà, d’investir dans de nouveaux équipements publics comme un stade d’eau vive pour 25 millions d’euros, qui « génère de l’activité économique et touristique », et d’entretenir la basilique Notre-Dame-des-Enfants.

Apport « providentiel »

Grâce à cet apport « providentiel », William Pelletier a pu aller plus loin, faisant voter le ravalement de la façade de la mairie, la rénovation de la place de la Poste, la modernisation du système d’alimentation électrique de la basilique, le renouvellement de la signalétique des bâtiments et sites communaux et la réalisation de travaux d’accessibilité pour les personnes à mobilité réduite au centre socioculturel, à la mairie ainsi qu’au cabinet paramédical.

Une grande partie des 300 000 € reçus en 2017 a surtout été allouée à des projets dédiés à la jeunesse, « sans avoir à augmenter les impôts ». Le legs a ainsi permis d’engager la construction d’un gymnase et d’ajouter un skatepark. Inauguré en décembre, cet équipement, qui a trouvé sa place dans l’ancienne caserne des sapeurs-pompiers, redonnera du lustre au quartier, quelque peu laissé à l’abandon.

L’élu aimerait maintenant que l’un de ces bâtiments publics porte un jour le nom de ce « bienfaiteur pour la commune ». Il laisse néanmoins le conseil municipal choisir « de la forme que prendra cet hommage mérité ».