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Le cri d’alarme des journalistes européens contre la volonté hégémonique de Google

Le logo de la marque Google devant ses bureaux à Pékin, en Chine. Thomas Peter/REUTERS

TRIBUNE - Le géant d’internet détourne la directive sur les droits voisins dans le but de ne pas rémunérer la presse. Un scandale que dénoncent plus de 600 journalistes* et artistes.

Ce jeudi 24 octobre aurait pu être un grand jour dans l’histoire de l’Europe et d’internet. Avec l’entrée en vigueur en France de la directive européenne sur les droits voisins, la presse devait, pour la première fois sur notre continent, commencer à percevoir une rémunération sur les contenus qu’elle produit et qui sont diffusés sur Google, Facebook et autres plateformes.

Des journalistes, photographes, reporters de l’Union européenne, mais aussi les artistes se sont longtemps battus pour ce texte.

Parce que l’information de qualité coûte cher à produire. Parce que la situation actuelle, qui voit Google capter l’essentiel des recettes publicitaires générées par les informations que le moteur ratisse, est intenable. Et plonge chaque année la presse dans une crise plus profonde.

Le Parlement européen a voté la directive au printemps, le Parlement français l’a transposée en droit français à la quasi-unanimité cet été. Pourtant ce texte tant attendu risque d’être vidé de toute portée avant même sa mise en œuvre. Et cela pourrait s’étendre à toute l’Europe.

C’est un nouveau bras d’honneur à la souveraineté nationale et européenne. Google veut faire la démonstration d’une impuissance publique à réguler les plateformes

Refusant toute négociation, Google a offert aux médias un cynique choix de dupes.

Soit ils signent un blanc-seing à Google en renonçant à rémunération, et le modèle actuel à base de gratuité perdure. C’est la mort lente, qui a commencé de vider les salles de rédaction en Europe comme aux États-Unis.

Soit ils refusent, continuant d’espérer une rémunération. Et on leur promet de redoutables représailles: la visibilité de leurs contenus sera réduite à sa plus simple expression. Plus de photo, plus de textes, un bout de titre, rien de plus, apparaîtra quand les internautes feront des recherches sur une information.

Un suicide pour la presse. Car avant d’arriver sur un site de média, la porte d’entrée des internautes, c’est Google. Les autres moteurs de recherche pèsent trop peu. Les éditeurs le savent: ils n’ont pas les moyens financiers de supporter la chute vertigineuse de trafic sur leurs sites que cette mesure entraînera.

» À voir aussi - Droits voisins: faut-il faire payer les GAFA?

Droits voisins : faut-il faire payer les GAFA ? - Regarder sur Figaro Live

Google bafoue la loi. Il en exploite les subtilités en détournant son esprit. Comme le géant américain a si bien su le faire avec les montages fiscaux qui lui ont permis de faire de l’évasion fiscale à l’échelle planétaire.

C’est un nouveau bras d’honneur à la souveraineté nationale et européenne. Google veut faire la démonstration d’une impuissance publique à réguler les plateformes, entend faire plier les médias et les forcer à accepter un modèle économique assis sur la non-rémunération par principe des contenus. En mettant en avant, magnanime, le financement qu’il a bien voulu donner pour des projets innovants dans le domaine des médias: une diversion, une aumône pour un groupe qui pèse 140 milliards de dollars de chiffre d’affaires.

Nous appelons à une contre-attaque des décideurs publics. Ils doivent muscler les textes pour que Google ne puisse plus les détourner.

Alors que les campagnes de désinformation envahissent internet et les réseaux sociaux, que le journalisme indépendant est attaqué dans plusieurs pays de l’Union européenne, renoncer serait catastrophique.

Nous appelons à une contre-attaque des décideurs publics. Ils doivent muscler les textes pour que Google ne puisse plus les détourner, utiliser tout l’arsenal des mesures qui permettent de lutter contre l’abus de position dominante.

De notre côté, nous, journalistes, photographes, journalistes reporters d’images (JRI) et artistes, en appelons à l’opinion publique et mènerons ce combat car ce qui est en cause, c’est la survie de médias indépendants et pluralistes, et in fine la vitalité de notre démocratie.

*Dont Alexis Brézet, directeur des rédactions du «Figaro» ; Laurence de Charette, directrice de la rédaction du figaro.fr ; Guillaume Roquette, directeur de la rédaction du «Figaro Magazine» ; Anne-Florence Schmitt, directrice de la rédaction de «Madame Figaro» ; et la Société des journalistes du «Figaro». La liste complète des personnalités signataires de la tribune est à retrouver sur le site https://open-letter-october-2019.frama.site.

Le cri d’alarme des journalistes européens contre la volonté hégémonique de Google

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166 commentaires
  • edgar19

    le

    Cela ne me choque pas davantage que lorsque mes propos sont rejetés sans raisons valables ...

  • error 404 brain not found

    le

    Je riz de me voir si belle dans ce miroir dit la société Chinoise.....
    J'ai bien riz , je vais tout racheter, sauf le petit personnel répond le Coréen.
    Pendez-les tous haut et court ces communistes crie l'Américain.
    Voilà, pas de bras,pas de chocolat,pas de c---lles, pas de nouilles.

  • PGMN

    le

    Demander aux élus de muscler les textes? J'imagine que les arguments de Google et de son lobby pour ne pas le faire sont plus incitatifs et sonnants que ceux des journalistes

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