En France, certaines entreprises emploient des réfugiés pour des postes de soudeur ou de mécanicien. Crédit : Reuters
En France, certaines entreprises emploient des réfugiés pour des postes de soudeur ou de mécanicien. Crédit : Reuters

Même si la France possède l’un des plus forts taux de chômage de l’Union européenne (8,7% en avril 2019), des entreprises recrutent, en particulier dans certains secteurs professionnels (BTP, mécaniciens, tractoristes...). Comme les Français et autres résidents, les réfugiés sont éligibles à ces emplois, mais cela implique parfois qu’ils apprennent un nouveau métier.

Trouver un emploi. C'est le plus grand défi que doivent relever les réfugiés une fois leur statut obtenu. Quand leur situation est régularisée, une période de trois mois - renouvelable une seule fois - s'ouvre pendant laquelle un réfugié est logé. Pendant ce laps de temps, il doit trouver à la fois un emploi et un logement. Rare sont ceux dont le niveau en langue française ainsi que la formation initiale leur permettent de décrocher un travail dans leur domaine de compétence.

Ainsi, comme l’écrit l'ethnologue Anne-Céline Leh dans une étude pour le Lab’Ho, un think-tank spécialisé dans les questions d'emploi, les réfugiés sont fréquemment confrontés au déclassement professionnel : "Il semble qu’il leur soit plus systématiquement proposé de repartir de zéro et d’apprendre un autre métier plutôt que de suivre des modules légers d’adaptation." Ce phénomène s’explique également par la barrière de la langue. "Quand ils obtiennent l’asile, les réfugiés n’ont pas encore un niveau de français et de qualification suffisants pour être employables. Ils doivent passer par des formations de langue, ce qui retarde davantage leur intégration", affirme à InfoMigrants Didier Leschi, directeur général de l’Office français de l'immigration et de l’intégration (Ofii).

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Miser sur les secteurs professionnels qui recrutent

Autant d'obstacle pour les réfugiés qui viennent s'ajouter à la situation difficile de l’emploi en France qui a l’un des plus forts taux de chômage de l’Union européenne (8,7% en avril 2019), encourageant d’autant plus les réfugiés à accepter ce qu’ils trouvent : le plus souvent un métier dans un secteur dit "en tension".

Aide à la personne, restauration, bâtiment, agriculture… Certains domaines offrent donc des emplois, et des qualifications spécifiques sont même activement recherchées par les recruteurs, comme les ouvriers tractoristes, les coffreurs bancheurs ou les mécaniciens. "Aujourd’hui, plusieurs secteurs d’activités ont du mal à recruter et à identifier les candidats qui pourraient répondre à leurs besoins", explique à InfoMigrants Hildegard Mbianda, chargée de mission spécialisée en ressources humaines pour le Fonds d’assurance formation du travail temporaire (FAF.TT), l’un des partenaires du programme d’insertion des réfugiés Hope.

Mis en oeuvre par l’État en 2017, le programme Hope fait partie des dispositifs phare en matière d’intégration professionnelle des réfugiés. Les participants apprennent le français et un métier en alternance; et ils bénéficient également d’un accompagnement global (administratif, social, médical). Parmi les 1 000 réfugiés de la première promotion, 44% d’entre eux se sont orientés vers le BTP, 38% vers les services et 18% vers l’industrie.

L’industrie, les transports et la logistique sont aussi des secteurs porteurs. Hildegard Mbianda souligne toutefois le fait que "les métiers pour lesquels nous avons de gros besoins sont principalement destinés à un public masculin. Mais, concernant notre programme [Hope], nous comptons diversifier les offres et les adapter à des profils plus féminins". 

Des formations dans le cadre d'un accompagnement sont également mis en place par les départements, à l’instar du Val d’Oise, en région parisienne. Dans le cadre de son projet "Emploi et Toit", des formations en français, des intégrations en entreprises avant embauche et des accès au logement en Île-de-France sont notamment proposés à une centaine de réfugiés. "Ce projet innovant vise à les former à des métiers précis, notamment de l’industrie agroalimentaire", se réjouit Kelim Belheine, chef de projet chargé de l’intégration des réfugiés à l’Ofii. Dix participants seront formés pour ensuite exercer un métier du secteur.

Valoriser les compétences artisanales

Certains réfugiés souhaitent toutefois pouvoir mettre à profit des compétences particulières, notamment dans le domaine de l'artisanat. En France, certaines initiatives existent précisément pour cela. Le projet Refugee food festival, né il y a quelques années, met ainsi en relation des restaurateurs français et des cuisiniers réfugiés, avec à la clé formation et soutien pour le lancement de leur propre activité. Autre exemple, l’association La fabrique nomade, qui aide les réfugiés à valoriser leurs compétences dans l’artisanat, a notamment permis, en 2018, à sept de ses adhérents, de trouver un travail. "Les réfugiés n’ont que peu de moyens pour faire reconnaître leurs compétences. C’est un sujet qui commence à être regardé de plus près, y compris par les institutions", précise Inès Mesmar directrice de l’association La fabrique nomade.

En outre, le lancement, par l’État, d’un appel à projets pour l’intégration professionnelle des réfugiés, en octobre 2018, a permis de soutenir tout ces dispositifs, à la fois nationaux et locaux. Dix-huit lauréats l’ont finalement remporté. C’est le cas de Kokido, une association qui met en relation des réfugiés et des salariés ou encore d’Action emploi réfugiés, connue pour sa plateforme en ligne d’annonces d’emplois.

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