L’appel de rescapés des attentats de Paris : «Nous devons notre paix au combat des Kurdes»

Dans une tribune que publie le Parisien, des survivants des attentats du 13 Novembre alertent sur le risque d’évasion des djihadistes dans le nord de la Syrie et se mobilisent pour les Kurdes attaqués par la Turquie.

 Qamishli (Syrie), le 9 février. Les Forces démocratiques syriennes, dont les bataillons de femmes du YPJ (ici lors des funérailles de l’une des leurs), estiment avoir perdu plus de 11 000 combattants contre Daech.
Qamishli (Syrie), le 9 février. Les Forces démocratiques syriennes, dont les bataillons de femmes du YPJ (ici lors des funérailles de l’une des leurs), estiment avoir perdu plus de 11 000 combattants contre Daech. AFP/Delil souleiman

    À quelques jours de l'hommage anniversaire aux victimes des attentats de Paris, et alors que depuis trois semaines l'offensive turque déstabilise le nord de la Syrie, 44 rescapés de la folie islamiste du 13 Novembre, regroupés en collectif, prennent la plume et signent une lettre ouverte dans Le Parisien-Aujourd'hui en France : un appel « aux populations du monde » pour qu'elles se mobilisent, « aux chefs d'Etat » pour qu'ils agissent. Voici leur texte.

    L’appel du Collectif des 44

    Ce que disent ces survivants du terrorisme islamique est simple : leur effroi face au réveil de cellules du groupe Etat islamique, la crainte que les populations de la région du Rojava et les forces qui ont combattu Daech ne soient abandonnées après nous avoir protégés.

    Sur la menace djihadiste, la mort le week-end dernier de Baghdadi et d'un de ses bras droits, dans une opération conjointe des forces spéciales américaines avec le renseignement kurde des FDS, ne peut masquer que de nouvelles exactions sur place ont déjà repris. À ceci, il faut ajouter qu'une centaine de djihadistes prisonniers ont réussi à s'évader selon le dernier décompte rendu public par l'émissaire américain pour la Syrie.

    « Tout cela m'a pris aux tripes, je pense à mes enfants, s'inquiète une des signataires, qu'est-ce que c'est que ces dizaines de terroristes qui s'échappent ? » Une anxiété soulignée par Me Gérard Chemla, l'avocat de certains signataires, parties civiles dans le dossier judiciaire en cours : « L'opération turque déstabilise la région, certains djihadistes ont pris la fuite, il y en aura certainement d'autres. La France doit absolument faire quelque chose. C'est pourquoi j'avais demandé qu'ils soient ramenés en France et jugés ici. »

    Écho à d'autres mobilisations

    Ce qui a décidé les « 44 » à prendre la parole, c'est aussi, et surtout, « la dette inestimable » que les pays occidentaux doivent aux 11 000 morts qui se sont battus pour terrasser Daech, dette à laquelle nos pays, disent-ils, font défaut. Une défaillance dans la reconnaissance et le soutien dus à ces communautés qui ont inventé dans une région minée par les troubles un espace pacifique aux valeurs universelles. « Pourquoi nous avoir sauvés, nous, si c'est pour les abandonner, eux », explique un des signataires à l'origine de l'appel.

    Cette mobilisation inédite fait écho à d'autres. Il y a une semaine, 31 parlementaires femmes de tous les partis ont posté un texte de soutien aux femmes kurdes, sur le Huffington Post : « Nous, parlementaires françaises, souhaitons apporter notre soutien plein et entier aux femmes kurdes qui, au Rojava, […] se sont battues pour les principes universels que nous défendons. » Et les élues de demander « une zone d'exclusion aérienne et la mobilisation d'une force sous l'égide de l'ONU ».

    Ce jeudi soir, c'est le site Libération qui publie une tribune signée du Collectif des Combattantes et Combattants francophones du Rojava (CCFR). Intitulée « Français, nous avons combattu aux côtés des Kurdes du Rojava », elle accuse le gouvernement français de « trahison ».

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    La veille, l'Assemblée nationale avait voté, là encore tous groupes confondus, une résolution demandant au gouvernement d'« adopter toutes les mesures à même de soutenir ses amis et alliés kurdes, protéger les populations civiles, restaurer la stabilité dans le Nord-Est syrien ». Et samedi, ce seront des rassemblements de soutien qui devraient se tenir dans de nombreuses villes en France.