Députée LREM des Yvelines, présidente de la commission des lois du Palais-Bourbon - deuxième femme à occuper ce poste -, Yaël Braun-Pivet est la cible de multiples attaques sexistes depuis le début de son mandat. L'illustration d'une survivance qu'elle tient à dénoncer.

ELLE. À quelles formes de sexisme êtes-vous confrontée ?

Yaël Braun-Pivet. Sur les réseaux sociaux, j'ai lu des remarques comme « Dans députée, il y a pute. » Récemment, après l'audition du ministre de l'Intérieur, un homme m'a envoyé ce mail : « J'ai été frappé par votre comportement et vos réactions physiques, êtes-vous la maîtresse en titre ou potentielle de Castaner ? » C'est ahurissant. On est sans cesse ramenée à sa féminité, voire à sa sexualité.

ELLE. Qu'en est-il au sein de l'Assemblée ?

Yaël Braun-Pivet. Certains députés ont pu me dire « Ne faites pas votre maîtresse d'école », ou « Merci pour vos réflexions quasi maternelles », alors que je faisais un rappel au règlement dans le cadre de ma fonction. D'autres entrent dans mon bureau en me demandant si je suis fatiguée, si je m'en sors. Ces questions ne sont jamais posées aux hommes.

ELLE. Faisiez-vous face à de telles remarques en tant qu'avocate ?

Yaël Braun-Pivet. Jamais. J'ai découvert ce phénomène avec l'exercice du pouvoir. Pendant la campagne des législatives, en 2017, mon adversaire m'avait laissé entendre que j'étais incapable de devenir députée parce que j'étais mère, qui plus est d'une famille nombreuse, et parce que je n'avais pas d'expérience. Les premiers articles de presse me concernant étaient sur le même ton.

ELLE. Comment combattre ces pratiques ?

Yaël Braun-Pivet. Tous les moyens sont bons ! On a changé le règlement pour imposer la parité. Il faut que les femmes soient partout, dans la haute administration mais aussi dans les mairies. Tout simplement parce qu'elles représentent plus de la moitié de la population. Elles doivent réussir en politique sans imiter ou s'adapter à un modèle masculin.

ELLE. Depuis deux ans, avez-vous perçu des progrès ?

Yaël Braun-Pivet. Le renouvellement des générations et la féminisation de tous les groupes à l'Assemblée - nous sommes passés de 27 % à 39 % de femmes lors de la dernière élection - ont eu des effets positifs. Je tiens à souligner que la grande majorité des élus s'engage aujourd'hui. Heureusement, l'aspiration à l'égalité transcende les partis. Mais tant qu'elle n'est pas évidente pour tout le monde, on doit continuer à en parler, à dénoncer ces insultes et ces réflexes.

Cet article a été publié dans le magazine ELLE du 31 octobre 2019. Abonnez-vous