RECHERCHEDes floraisons en automne ? C'est la faute au dérèglement climatique

Vos plantes fleurissent en automne ? C'est la faute au dérèglement climatique

RECHERCHEA Montpellier, l'Observatoire des saisons lance un appel pour mieux comprendre ce phénomène
Une Ophrys des lupercales, une espèce d'orchidée, sensible au dérèglement climatique, observée en 2010.
Une Ophrys des lupercales, une espèce d'orchidée, sensible au dérèglement climatique, observée en 2010. - Philippe Feldmann / 2010
Nicolas Bonzom

Nicolas Bonzom

L'essentiel

  • Si certaines espèces, qui d'ordinaire fleurissent au printemps, font des fleurs en automne, c'est la faute au dérèglement climatique : l'été est sec et l'automne doux.
  • A Montpellier, l'Observatoire des saisons lance un appel pour récolter des informations pour tenter de comprendre ce phénomène de plus en plus fréquent.
  • Ce phénomène serait particulièrement néfaste pour la végétation.

Vos plantes, vos fleurs ou vos arbres fleurissent en automne ? C’est probablement un signe qu’ils sont victimes du changement climatique. Pour décrypter ce phénomène botanique encore un peu obscur, l'Observatoire des saisons, ouvert par le CNRS en 2008 à Montpellier, lance un appel pour récolter de précieuses informations pour mieux comprendre ce dérèglement du rythme saisonnier qui touche certains végétaux.



Ainsi, à Roubaix, dans le Nord, des molènes bouillon-blanc ont refleuri au mois d’octobre, après que leurs fleurs ont subi un gros coup de chaud cet été, s’étonne un contributeur sur le site de Tela Botanica, une association de sciences participatives montpelliéraine, qui fait partie des organismes qui portent l'Observatoire des saisons. A Poulx, dans le Gard, la floraison des sternbergias, des fleurs à bulbes semblables aux crocus, est « en retard de trois à quatre semaines », indique un autre. « Mes poiriers sont en fruits et en fleurs », constate un autre internaute, en plein mois d'octobre.

« Cela devient récurrent »

« Depuis quelques années, nous remarquons des phénomènes anormaux, comme des floraisons en automne chez des espèces qui, normalement, fleurissent au printemps, ou des espèces qui font de nouvelles feuilles, donc une seconde pousse », explique Isabelle Chuine, directrice de recherche au Centre d’écologie fonctionnelle et évolutive du CNRS, à Montpellier, et responsable scientifique de l’Observatoire des saisons.

« C’est quelque chose qui est déjà arrivé par le passé, mais très rarement, indique-t-elle. En 1976, par exemple, après la grande sécheresse, chez les arbres fruitiers, notamment. Mais aujourd’hui, cela devient récurrent, parce que les conditions estivales actuelles sont stressantes pour les plantes, et que les conditions d’automne leur sont plus favorables. C’est un phénomène que l’on n’arrive pas encore bien à expliquer. Nous n’avons pas encore assez de recul pour bien analyser la situation. »

Les orchidées sont parmi les plus sensibles

Ces anomalies constatées chez de nombreuses espèces en France, notamment les arbres fruitiers ou forestiers et les plantes à fleurs, ne seraient pas anodines puisqu’elles affaibliraient la végétation, selon Isabelle Chuine. « Les plantes puisent des réserves qu’elles n’arrivent pas à reconstituer », indique la chercheuse montpelliéraine.

Les orchidées figurent parmi les espèces les plus touchées par ce dérèglement saisonnier. « Les orchidées, notamment les orchidées précoces, celles qui fleurissent très tôt, sont très sensibles aux conditions de température, confie Philippe Feldmann, chercheur au Cirad. Nous avons observé que certaines années, elles fleurissaient extrêmement tôt. Au lieu de février ou mars, on en a déjà vu fleurir à Noël. Cela permet d’anticiper ce qui pourrait arriver de manière plus régulière avec l’augmentation des températures. » A Montpellier, des ophrys, des orchidées méditerranéennes, peuvent fleurir par exemple beaucoup plus tôt à la faveur d’un automne doux.

« Très sensibles, elles meurent en masse »

« C’est à leur détriment, car le fait qu’elles aient fleuri très tôt, lorsqu’un froid normal arrive en février, elles sont en végétation, donc très sensibles, et meurent en masse », reprend Philippe Feldmann. Ainsi en 2012, indique ce spécialiste des orchidées, une floraison très précoce a été interrompue par un gel prolongé, tuant plus de 90 % des populations. « Cette année, elles ne sont toujours pas reconstituées au niveau d’avant. »

Si vous avez constaté de telles anomalies dans votre jardin ou en nature, l’Observatoire des saisons a besoin de vous pour faire avancer la recherche. Informations par ici.

Sujets liés