Au ministère de la Culture, un haut fonctionnaire empoisonnait les femmes aux diurétiques

Le ministère de la Culture, 3 rue de Valois à Paris.

Le ministère de la Culture, 3 rue de Valois à Paris. CAPTURE D'ÉCRAN, GOOGLE MAPS.

Christian N. a intoxiqué aux diurétiques des dizaines femmes en dix ans, pour les pousser à uriner devant lui. « Libération » a retrouvé plusieurs de ses victimes.

En mai 2019, le « Canard enchaîné » titrait : « Le parquet saisi d’une histoire à se pisser dessus ». Cette « histoire à se pisser dessus », c’est celle d’un fonctionnaire du ministère de la Culture, sous-directeur des politiques de ressources humaines, qui a, entre 2009 et 2018, photographié et/ou intoxiqué à leur insu plus de 200 femmes aux diurétiques afin de les voir uriner devant lui.

Choquées par la légèreté du titre de l’hebdomadaire satirique, plusieurs femmes ont décidé d’aller porter plainte depuis sa publication. « Libération » a retrouvé plusieurs des victimes, qui racontent le mode opératoire de l’ancien reponsable des ressources humaines de la rue de Valois, et la difficulté de se faire entendre des policiers au moment du dépôt de plainte.

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La plupart des femmes qui ont témoigné ont rencontré Christian N. à l’occasion d’entretiens d’embauche, aux cours desquels il commençait par leur proposer un thé ou un café. Dans la boisson, une dose de Furosémide, un diurétique. Après avoir pris des photos de leurs jambes sous le bureau, le responsable des ressources humaines propose ensuite une promenade dans le quartier.

« C’est alors le début d’un chemin de croix qui pour certaines durera plus de trois heures. Car le diurétique commence à agir et le plan est bien rodé : Christian N. va choisir un itinéraire permettant d’isoler ses victimes et de les éloigner des cafés ou des musées où elles pourraient trouver des toilettes », peut-on lire dans « Libération ».

« Au bord du malaise »

« Je sentais mon ventre gonfler, j’étais au bord du malaise. Sous un pont, j’ai baissé mon pantalon et ma culotte, et j’ai uriné. Pendant ce temps, il tenait son manteau devant moi pour me cacher et regardait mon visage », raconte ainsi Karine, une des victimes qui témoigne auprès du quotidien. Elise, une autre victime, « [s’] écroule de douleur ». Elle refusera d’uriner devant Christian N. Quatre jours plus tard, elle sera hospitalisée pour une infection urinaire liée aux agissements du recruteur.

La justice a été saisie après que Christian N. a été pris sur le vif en juin 2018 en train de photographier les jambes d’une sous-préfète lors d’une réunion à la Direction régionale des Affaires culturelles du Grand-Est, dont il était le directeur régional. Sur son ordinateur, les enquêteurs de l’administration ont ensuite découvert un fichier très organisé, listant une partie de ses victimes, avec des informations sur leur réaction aux diurétiques et des photos.

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Après avoir été suspendu de la fonction publique, Christian N. a été révoqué en janvier 2019, date de l’ouverture de l’enquête par le parquet de Paris. Il a, selon « Libération », été placé sous contrôle judiciaire et mis en examen des chefs d’« administration de substance nuisible, d’agression sexuelle par personne abusant de l’autorité conférée par sa fonction, d’atteinte à l’intimité de la vie privée par fixation d’image, de violence par une personne chargée de mission de service public et d’infractions à la législation sur les médicaments ».

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