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Pourquoi Uber nous incite à prendre le bus

La multinationale californienne fait évoluer son application pour permettre, dans douze villes, de consulter les horaires des transports publics, et même d’acheter des billets à Denver. Son objectif: devenir incontournable pour les trajets et accroître ses revenus

Une vue de New York. — © 123rf
Une vue de New York. — © 123rf

Uber, vu de Suisse romande, c’est bien sûr ce conflit de plus en plus dur avec les autorités genevoises. Mais au niveau mondial, la multinationale ne cesse d’évoluer. Avec désormais une nouvelle ambition pour son application pour smartphone: qu’elle devienne le point d’entrée unique non seulement pour les déplacements en voiture, mais aussi pour des trajets effectués en transports publics. Depuis quelques jours, ce sont les utilisateurs new-yorkais d’Uber qui peuvent ainsi consulter les horaires de métro et de bus au sein de l’application.

La multinationale, spécialisée dans le transport par chauffeur privé, qui incite ses clients à prendre le bus? Ce qui peut sembler paradoxal ne l’est pas, assure Chris Pangilinan, responsable transports publics au sein de la multinationale. «Notre ambition est de devenir le point d’entrée unique pour vos transports, affirme-t-il au Temps. Dans certaines villes comme New York ou Boston, vous pouvez souvent vous rendre plus vite d’un point A à un point B en transports publics. Si c’est ce qui est pertinent, cela ne nous pose aucun problème. Notre ambition a toujours été de faciliter les déplacements de nos clients.»

Achat de billets à Denver

La société a ainsi lancé depuis fin septembre son service «Transit» dans douze villes, telles Denver, Boston, Sydney, Chicago, San Francisco (là où se trouve son siège), Mexico, Paris, New Delhi ou encore São Paulo. La multinationale affirme que c’est désormais dans la capitale française que ses clients disposent du plus grand nombre d’options pour se déplacer, notamment via un partenariat avec Cityscoot, qui loue des scooters électriques. L’entreprise affirme qu’en l’espace de quelques semaines, 500 000 de ses clients, au niveau mondial, ont utilisé l’option «transports publics» au sein de l’application.

Mais indiquer des horaires de bus et de métro, Google (via Maps) et d’autres le font déjà. «Nous voulons aller beaucoup plus loin en permettant à nos clients d’acheter directement dans notre application des billets de transports publics, poursuit Chris Pangilinan. C’est déjà possible à Denver, une première au niveau mondial. Cette ville a été extrêmement coopérante et nous espérons bientôt lancer ce service avec d’autres cités.» Selon le responsable d’Uber, les mégalopoles ont tout à gagner de tels partenariats. «Leurs services de transports publics peuvent ainsi avoir accès à une nouvelle clientèle, qui s’intéressait peut-être d’abord à des trajets en voiture. Quant à nous, nous prélevons une commission sur le prix des billets vendus.» C’est un modèle proche de celui en vigueur pour les trajets en voiture que met ainsi en place Uber – il perçoit actuellement entre 20 et 30% du prix des courses en voiture.

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Point d’entrée unique

Via ce nouveau service, Uber veut ainsi élargir son audience, trouver de nouvelles sources de revenus et surtout devenir un point d’entrée unique – il est possible qu’à l’avenir, le service Eats de livraison de plats à domicile soit fusionné avec l’application principale. Uber l’assume, il veut devenir une sorte de WeChat occidental, du nom de cette application chinoise qui permet d’effectuer un nombre incalculable de tâches.

Pour cela, il faudra qu’Uber convainque de nouvelles villes de coopérer à son service «Transit». «C’est en bonne voie, même si des négociations prennent parfois du temps, poursuit Chris Pangilinan. Je suis très confiant sur le fait que nous pourrons ainsi étendre nos activités en Europe et même pourquoi pas en Suisse, même si je n’ai rien à annoncer pour l’heure à ce sujet.»

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Davantage de voitures

Reste une question de taille: Uber va-t-il vraiment faire diminuer ainsi le nombre de voitures dans les villes? A son arrivée à la tête d’Uber, en août 2017, Dara Khosrowshahi avait affirmé que son but était que ses clients se débarrassent de leur voiture. Or d’après une étude commanditée par Uber et Lyft et publiée cet été, le trafic automobile a augmenté dans des villes telles que San Francisco, Washington DC ou Boston à cause de leurs services. Et seulement 58% des miles parcourus par les voitures de chauffeurs Uber et Lyft le sont avec un passager à bord. «Cela montre surtout que les gens continuent à posséder une voiture particulière, ce qui représente 95% du trafic, alors qu’ils pourraient utiliser les services d’Uber, répond Chris Pangilinan. Je pense qu’il faudra du temps pour que les gens commencent à renoncer à leur voiture et nous voulons y contribuer – intégrer les transports publics au sein de notre application est un pas clair dans cette direction.»

Chiffres rouges

En filigrane, la multinationale demeure dans le rouge. Lors du troisième trimestre, elle a perdu 1,2 milliard de dollars, soit près de 200 millions de plus que l’année dernière. Le chiffre d’affaires a quant à lui augmenté à 3,8 milliards, en hausse de 30%. La plateforme compte 101 millions d’utilisateurs actifs mensuels (+26%) et a réalisé 1,77 milliard de courses sur les trois mois, soit 31% de plus qu’il y a un an.