C’est inédit. La France a infligé une amende de 192 000 euros à une société de courtage pour avoir envoyé 20 conteneurs de déchets plastiques en Malaisie, qui les avait ensuite renvoyés dans l'Hexagone.

Fini les tours de passe-passe frauduleux pour exporter nos déchets vers l’Asie. C’est le message envoyé par le ministère de la Transition écologique et solidaire qui vient d’infliger une amende de 192 000 euros à une société de courtage en déchets. Une première. Cette société – dont le nom n’a pas été dévoilé- avait envoyé 20 conteneurs de déchets plastiques cet été en Malaisie. Le pays les a immédiatement renvoyés, les jugeant non conformes en prenant soin de bien le notifier à la France, a précisé le ministère, confirmant une information du Parisien.
Un signal clair pour mettre fin à l’exportation
Le ministère est ensuite remonté jusqu’à la société de courtage en déchets, basée dans le sud de la France. Le nom de l’entreprise n’a pas été communiqué. Cette "amende administrative", qui s’accompagne d’un signalement à la justice, constitue une première en France. Elle est loin d’être anodine. Elle intervient alors que les pays d’Asie du Sud-Est commencent à dire stop à ces exportations. Et joignent le geste à la parole. Depuis quelques mois, la Chine, l’Indonésie et la Malaisie notamment ont multiplié les retours à l’envoyeur en vertu de la convention de Bâle sur les déchets dangereux.
Avec cette amende, la France leur signifie qu’elle les a entendu et que les sociétés concernées ne resteront plus impunies. Le gouvernement sera "intraitable", affirme ainsi la secrétaire d’État à la Transition écologique, Brune Poirson. "En infligeant cette amende très forte, la France envoie un signal clair à certaines sociétés de courtage, et à leurs clients -les entreprises du recyclage – pour qu’elles mettent fin à ces pratiques", souligne-t-on au ministère.




L’Asie ne veut plus de nos déchets
Depuis juin, Jakarta a ainsi renvoyé plusieurs centaines de conteneurs de déchets jugés non conformes (mélange d’ordures, emballages plastiques et déchets dangereux) vers leur pays d’origine, essentiellement les États-Unis, la Grande-Bretagne, l’Allemagne, la France mais aussi Hong Kong ou l’Australie. La décision de la Chine en 2017 de cesser l’importation de déchets plastiques a suscité le chaos sur le marché mondial du recyclage. Les pays développés ont dû trouver de nouveaux débouchés pour leurs déchets, submergeant plusieurs pays du sud-est asiatique, qui se sont à leur tour rebiffés. Paris s’attend ainsi à recevoir encore de nouveaux conteneurs, avec d’autres pays. Quant aux deux refoulés cet été d’Indonésie en direction de la Malaisie, la société de courtage indique avoir fait recycler leur contenu sur place, selon le ministère.
Pour l’éco-organisme Citeo, en charge du recyclage des emballages ménagers, la part envoyée au grand export reste cependant "marginale". En France, cela concerne  1% des 3,5 millions de tonnes d’emballages recyclés, souligne-t-il dans un communiqué. La grande majorité est recyclée en France (84%) et une partie en Europe (15%). Citeo prévoit cependant de "renforcer ses contrôles portant sur le recyclage et la traçabilité" des déchets à recycler et de communiquer à chaque collectivité la part de leurs déchets d’emballages ménagers envoyés au grand export, pour chaque catégorie de déchets. "De cette façon, les collectivités seront en mesure de demander des précisions à leurs repreneurs, voire d’exiger un recyclage de proximité", ajoute Citeo.
Béatrice Héraud avec AFP

Découvrir gratuitement l'univers Novethic
  • 2 newsletters hebdomadaires
  • Alertes quotidiennes
  • Etudes