Société

La ville allemande qui s'est déclarée en « état d’urgence nazi »

Dresde est un foyer de l’extrême droite.
Dresde, ville d'extrême droite

Une ville d’Allemagne de l’Est, foyer de l’extrême droite, a décrété un « état d’urgence nazie » pour s’attaquer au problème. La semaine dernière, Max Aschenbach, conseiller municipal de Dresde et membre du parti politique satirique appelé « Le Parti », a proposé au conseil municipal de décréter l'Etat d'urgence. « Cette ville a un problème avec les nazis », leur a-t-il lancé.

Aschenbach a ajouté que le langage utilisé dans la résolution – faisant écho aux mises en garde des écologistes qui parlent d’« urgence climatique » – est largement symbolique mais promet de renforcer la culture démocratique, de protéger les minorités et de soutenir les victimes de la violence de l’extrême droite. Le conseil, qui a adopté mercredi la résolution à 10 votes près seulement, veut faire comprendre la gravité de la menace extrémiste à Dresde, capitale de la Saxe, où l’on peut souvent croiser des skinheads et des hooligans. « Les politiciens doivent commencer à condamner [cette tendance] et dire "non, c’est inacceptable" », a justifié Aschenbach.

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La résolution du conseil indique en particulier que des « attitudes et actions, parfois violentes, anti-démocratiques, anti-pluralistes, misanthropiques et d’extrême-droite se produisent de plus en plus souvent. » Mais tout le monde n’est pas d’accord. L’Union démocratique chrétienne – parti centre-droit qui gouverne l’Allemagne et détient le plus grand nombre de sièges au conseil municipal de Dresde – a voté contre le mouvement et a jugé que c’était une mascarade.

« De notre point de vue, c’était avant-tout une provocation délibérée », a expliqué à la BBC Jan Donhauser, représentant de l’Union démocratique chrétienne au conseil municipal. Les Etats d’urgence sont généralement déclarés en réponse à une menace sérieuse à l’ordre public, a-t-il déclaré – ce qui n’est pas le cas de l’extrême droite à Dresde.

Néanmoins, la ville de 540 000 habitants est considérée par beaucoup comme une citadelle de l’extrême droite en Allemagne, réel casse-tête pour le gouvernement du pays. Depuis les années 1990, Dresde a été le théâtre de protestations régulières de l’extrême-droite commémorant les lourds bombardements de la ville durant la Seconde Guerre mondiale. Ces événements mettent en avant une vision révisionniste de l’histoire dans laquelle les Allemands seraient supposés être les vraies victimes.

Plus récemment, en 2014, un mouvement urbain islamophobe a été créé : Pegida, ou les Européens patriotes contre l’islamisation de l’Occident. A plusieurs reprises, le groupe a rassemblé des dizaines de milliers de manifestants dans les rues pour protester contre l’immigration musulmane. Pegida s'est étendu en Europe et notamment en France.

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La Saxe enregistre des soutiens à l’extrême droite et aux partis populistes de droite, dont le parti néo-nazi NPD. Cette année, le parti anti-immigrant AfD a remporté 27,5 % des suffrages en Saxe.

Des sondages ont montré que les Saxons penchent beaucoup plus à droite politiquement que les Allemands d’autres parties du pays. Un sondage de 2016 par exemple, a trouvé que presque 40% des personnes interrogées dans l’Etat pensent que les musulmans doivent être interdits d’immigration en Allemagne, contre 16% au niveau national.

L’Etat est aussi un foyer pour les sous-cultures d’extrême droite qui s’entrecroisent, dont les skinhead et les hooligans ; « le coup de poing de l’est », groupe de hooligan néo-nazi violent soutient l’équipe de football locale, leDynamo Dresden.

L’extrême droite est devenue un grave problème politique en Allemagne récemment. Il y a eu des attaques comme l’assassinat de Walter Luebcke au mois de juin et une tentative de fusillade de masse dans une synagogue à Halle le mois dernier par des extrémistes. En mars dernier, une cellule terroriste de huit membres a été emprisonnée suite à sa campagne de bombardement contre des réfugiés et des personnes de gauche dans la ville de Freital, à environ 25 minutes de Dresde.

Le pays tout entier d’Allemagne a environ 12 700 radicaux d’extrême-droite qui sont préparés à utiliser la violence selon le plus récent rapport par ses services de renseignements nationaux. L’année dernière, l’extrême-droite a menée 60 attaques à Dresde, contre 52 l’année dernière.

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