Album posthume de Leonard Cohen : "Peut-être mieux que son dernier disque", assume son fils

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Album posthume de Leonard Cohen : "Peut-être mieux que son dernier disque", assume son fils

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Léonard Cohen, en 2013, au Montreux Jazz Festival.
Léonard Cohen, en 2013, au Montreux Jazz Festival.
© AFP - Fabrice Coffrini

Adam Cohen, le fils et producteur de Leonard Cohen, disparu en 2016, a rassemblé les dernières compositions inédites de son père pour en faire un album posthume. Interview exclusive.

Il était plus que son fils. Adam Cohen, producteur du chanteur, mort en 2016, Leonard Cohen, a rassemblé les dernières compositions inédites de son père pour réaliser un album posthume. Ce dernier album s'appelle Thanks For The Dance, et paraît en ce mois de novembre. Nous avons rencontré Adam Cohen pour une interview exclusive. 

FRANCE INTER : Dans quel contexte avez-vous entamé la réalisation de ce disque ? 

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ADAM COHEN : "Avec le dernier disque qui s'appelait You Want it Darker les thèmes de la mortalité et de Dieu étaient très présents. Il n'y avait pas vraiment de place pour les chansons plus voluptueuses, plus érotiques, plus romantiques. La qualité du travail réalisé ensemble, père et fils, était tellement agréable, et a eu tellement de succès qu'avant sa mort il m'a demandé : 'Il faut absolument que tu termines le travail que l'on a commencé ensemble'. C'est devenu comme une communion. Au début c'était émotionnel, avec en plus la responsabilité d'accompagner cette voix et de l'envisager comme un bateau qui sort d'un port et qui part visiter d'autres ports, d'autres continents, le monde entier."

De quoi disposiez-vous pour faire cet album ? 

"Dans certains cas, c'était une simple prise de voix, des notions, des idées, pas grand-chose. Il existe des réalisateurs bien plus accomplis que moi, mais il y a très peu de personnes qui connaissent les goûts de Leonard Cohen. Moi, je savais exactement ce qu'il aimait et ce qu'il n'aimait pas. Donc, lorsque j'étais là avec sa voix , c'était simple pour moi de me dire : 'Oh ça, tiens, je vais l'utiliser à la manière du titre  Avalanche, une chanson des années 70. Je vais utiliser ce genre d'arrangements à la manière de Field commander Cohen. On va enregistrer Feist et ça va rappeler un peu Dancing to the End of Love. J'étais guidé par ses goûts, en fait."

Dans ce disque, on retrouve beaucoup d'invités mais, au départ, vous n'avez travaillé qu'avec le guitariste de votre père, Javier Mas. 

"Je me rappelle la première fois qu'il a mis le casque pour écouter la voix de mon père. Il utilisait la guitare de mon père dont j'ai hérité. Il avait les larmes aux yeux et il a dit : 'Je n'aurais jamais pensé jouer de la musique avec ton père une fois de plus'.

En deux semaines, on avait presque 90 % de l'album. Mais soudain le doute s'est abattu sur moi. Je me suis dit que c'était trop facile, que je n'avais pas assez travaillé pour lui. Que ce n'était assez digne de lui. C'est là que j'ai commencé à me demander si je ne devrais pas partager ce disque avec Damien Rice, avec Beck, avec Daniel Lanois, Rick Rubin, avec des gens que j'aime, mais qui correspondent d'une certaine manière avec Leonard Cohen. Ma confiance est revenue grâce à eux. Tout d'un coup je me suis rendu compte qu'on était en possession de quelque chose d'exceptionnel. Peut-être quelque chose de mieux que son dernier disque. Son dernier disque était un au revoir. Mais c'était un au revoir en vous serrant la main. Il regardait la mort dans les yeux. Ce disque, c'est aussi un au revoir, mais c'est comme une main sur l'épaule. C'est plus doux. Il y a un côté romantique. Une certaine douceur."

Le titre Puppets restera probablement dans l'histoire de Leonard Cohen. On n'a pas fini de l'analyser ! 

"Il y a deux titres sur ce disque où je me suis presque mis à genoux en disant : 'Papa s'il te plait, je sais qu'on n'a pas encore de musique encore mais juste lis ce texte. On a besoin d'avoir ta voix enregistrée. Ce sont des poèmes exceptionnels : Puppets et The Night of Santiago. Je n'ai jamais entendu une position aussi féroce, aussi courageuse et métaphysique que Puppets."

Les paroles de Puppets, dans l''album posthume de Leonard Cohen, "Thanks for the Dance"
Les paroles de Puppets, dans l''album posthume de Leonard Cohen, "Thanks for the Dance"
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Il y a aussi de grandes chansons d'amour sur ce disque comme "Moving on"... 

"Quand on a fait la prise de voix de ce titre, il venait d'apprendre que Marianne n'était plus là. Il n'a pas écrit cette chanson pour Marianne, mais en la chantant on sentait une certaine communion. Je l'ai vu changer quelques mots. Quand j'ai recommencé à retravailler la musique , il était clair que je devais mettre Marianne et mon père dans une petite taverne grecque, et qu'on devait mettre une voix féminine dans la distance presque comme un fantôme. On devait percevoir cette 'romance' entre les deux."

Avec le recul, que pensez-vous de cet album ? 

"Si on écoute ce disque, on a la sensation d'avoir passé du temps avec un grand maître en complète possession de ses pouvoirs."

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