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Sur les retraites, le Rassemblement national a transformé son discours

Marine Le Pen à l'Assemblée nationale le 5 novembre.
Marine Le Pen à l'Assemblée nationale le 5 novembre. © Stephane Allaman/SIPA
Adrien Gaboulaud , Mis à jour le

L'ex-Front national ne cache pas aujourd'hui son opposition à la réforme des retraites préparée par le gouvernement Macron. Mais la position du parti d'extrême droite semble bien différente de celle qu'il affichait il y a encore dix ans.

Une Le Pen, favorable à une grève contre une réforme des retraites? Il y a quelques années, l'idée aurait semblé incongrue. Mardi pourtant, Marine Le Pen, présidente du Rassemblement national, a apporté son soutien au vaste mouvement d'opposition à la réforme que s'apprête à présenter le gouvernement d'Emmanuel Macron. «Je soutiens la grève, la mobilisation, la manifestation du 5 décembre», a-t-elle déclaré. Des propos qui tranchent radicalement avec ceux de son père qui, en 1995, avait proclamé son opposition au «plan Juppé», déclencheur d'une grève massive... tout en dénonçant les syndicats qui selon lui défendaient «leurs privilèges de castes».

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Vingt-quatre ans plus tard, le Rassemblement national, ex-Front national, a profondément adapté son discours sur la question des retraites. Dans son programme de 2017, toujours présenté comme étant le programme du parti, Marine Le Pen affirme ainsi dans son engagement numéro 52 qu'elle veut «fixer l’âge légal de la retraite à 60 ans avec 40 annuités de cotisations pour percevoir une retraite pleine», contre 62 ans actuellement avec 43 annuités pour la retraite à taux plein d'un salarié né en 1973 ou après. Pour financer cette mesure, le RN compte sur des économies que permettraient la suppression de la contribution française à l'Union européenne et une baisse des dépenses liées à l'immigration. La création d'un million d'emploi contribuerait également au financement, selon Marine Le Pen, qui a affirmé sur LCI fin novembre que «c'est 25 milliards de recettes supplémentaires». Sur BFMTV cette semaine, elle avait également affirmé que la «natalité» était un élément essentiel du financement des retraites.

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Ce positionnement n'a pas toujours été celui du FN et il semble que certains cadres aient eu du mal à embrasser la cause de la retraite à 60 ans, grande conquête sociale de la gauche. En 2017, un conseiller économique de la candidate Le Pen, Jean-Richard Sulzer, semblait ainsi en désaccord avec l'âge légal à 60 ans mentionné dans le programme. «La retraite à 60 ans était assortie de conditions qui faisaient que c'étaient uniquement les (...) très anciens salariés, ceux qui ont travaillé très jeunes dans des métiers pénibles, les bénéficiaires du compte pénibilité qui en bénéficiaient», avait-il affirmé au «Figaro », en contradiction avec la formulation retenue par le projet.

En 2007, Le Pen père brocardait les régimes spéciaux et prônait la retraite à 65 ans

Il est vrai que le parti a connu dans la dernière décennie une transformation très importante de son programme économique. Le FN de Jean-Marie Le Pen affichait des tendances ultra-libérales d'inspiration reaganienne, qui ont été petit-à-petit escamotées au profit d'une ligne plus étatiste et protectionniste après l'accession à la présidence du parti de Marine Le Pen, épaulée par l'ancien énarque chevènementiste Florian Philippot, qui a depuis quitté le parti. En 2007, le programme de Jean-Marie Le Pen était ainsi fondamentalement différent sur la question des retraites.

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Quoique déjà préoccupé des questions de natalité et d'immigration, le projet du candidat FN prônait alors la fin des régimes spéciaux et la création d'un régime unique, mesure au cœur de la réforme qui a déclenché le mouvement actuel. Pis, il posait une formait d'ultimatum aux salariés des régimes spéciaux : «Soit ils s’incluent avec les mêmes obligations et prestations dans le régime national et bénéficient de la solidarité nationale, soit ils prévoient un financement spécial, hors fonds publics, pour maintenir leurs spécificités.» Jean-Marie Le Pen proposait également un âge de départ à 65 ans, alors qu'il était à l'époque encore fixé à 60 ans, avec 40 années de cotisation. Une vision sans rapport avec celle que le Rassemblement national revendique aujourd'hui.

Déterminé à ne pas rester à l'écart de la mobilisation initiée par les syndicats, le parti d'extrême droite a demandé jeudi que le projet de réforme des retraites soit soumis à référendum. «Emmanuel Macron s’entête et est prêt à plonger la France dans une situation de blocage généralisé pour mettre en œuvre son projet de précarisation des retraites. Dans ce contexte, il faut rendre la parole au seul souverain : le peuple!», affirme le RN dans un communiqué. Un appel qui semble n'avoir plus de point commun avec la rhétorique anti-syndicale de 1995.

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