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En AlgĂ©rie, les anciens premiers ministres Ă  la barre pour « le procès de l’ère Bouteflika Â»

Accusés de dilapidation de deniers publics, Abdelmalek Sellal et Ahmed Ouyahia comparaissent aux côtés d’ex-ministres, de hauts fonctionnaires et d’hommes d’affaires.

Par  (Alger, correspondance)

Publié le 06 décembre 2019 à 10h29

Temps de Lecture 3 min.

Abdelmalek Sellal (Ă  gauche)et Ahmed Ouyahia lors d’un meeting du Rassemblement national dĂ©mocratique, Ă  Alger, le 5 mai 2016.

Un procès inĂ©dit s’est ouvert, mercredi 4 dĂ©cembre, au tribunal de Sidi M’Hamed, Ă  Alger. A la barre, Abdelmalek Sellal, 71 ans, ancien premier ministre et proche d’Abdelaziz Bouteflika, et Ahmed Ouyahia, 67 ans, fidèle de l’ancien prĂ©sident, Ă  la tĂŞte du gouvernement lorsque le mouvement de protestation a commencĂ©, en fĂ©vrier. Les deux hommes, d’autres ministres, de hauts fonctionnaires et des hommes d’affaires comparaissent dans un dossier de corruption dans le milieu du montage automobile, une filière industrielle dĂ©veloppĂ©e par les autoritĂ©s pendant le quatrième mandat de Bouteflika.

Ce procès est surtout celui de ceux que le gĂ©nĂ©ral Ahmed GaĂŻd Salah, chef d’état-major et dĂ©sormais homme fort du pays, appelle « la bande Â» et qu’il a promis de « maĂ®triser Â». Le 25 septembre dĂ©jĂ , après un procès de 48 heures, SaĂŻd Bouteflika, le frère de l’ancien prĂ©sident, Mohamed Mediène et Athmane Tartag, anciens responsables du renseignement, et Louisa Hanoune, secrĂ©taire gĂ©nĂ©rale du Parti des travailleurs, ont Ă©tĂ© condamnĂ©s Ă  quinze ans de prison par le tribunal militaire de Blida pour « atteinte Ă  l’autoritĂ© de l’armĂ©e Â» et « complot contre l’autoritĂ© de l’Etat Â».

Des liens financiers Ă©troits

En pleine campagne Ă©lectorale – la prĂ©sidentielle doit avoir lieu le 12 dĂ©cembre –, l’audience est retransmise en direct par des chaĂ®nes de tĂ©lĂ©vision privĂ©es, qui filment les Ă©crans installĂ©s dans le hall du tribunal. Un avocat secoue la tĂŞte : « C’est totalement interdit par la loi. Â» Rien n’y fait, les images pixĂ©lisĂ©es d’Ahmed Ouyahia et Abdelmalek Sellal, en manteau sombre, entourĂ©s d’avocats et de policiers, seront Ă©galement reprises par les journaux. Kamel Boumehdi, l’un des avocats de la dĂ©fense, dĂ©plore un procès « politique et expĂ©ditif Â». Le bâtonnier de Blida, Abdelaziz Medjdouba, a quant Ă  lui dĂ©noncĂ© lui des « conditions dĂ©favorables Â» et annoncĂ© se retirer du procès avec plusieurs autres membres du collectif de dĂ©fense.

Au fil de l’audience, les liens financiers Ă©troits entre des entreprises, des ministres et l’ancien chef de l’Etat sont mis en Ă©vidence. Le juge interroge les prĂ©venus sur les mĂ©canismes qui ont permis Ă  plusieurs hommes d’affaires d’obtenir des autorisations pour lancer une activitĂ© de montage automobile ainsi que des exonĂ©rations fiscales pour ces activitĂ©s, alors mĂŞme que les dossiers ne rĂ©pondaient pas aux normes lĂ©gales. « Je n’avais pas le pouvoir de privilĂ©gier des concessionnaires ou des opĂ©rations Â», a rĂ©pondu Ahmed Ouyahia, affirmant qu’il respectait les procĂ©dures. De son cĂ´tĂ©, Abdelmalek Sellal assure qu’il n’avait « aucune autoritĂ© sur les ministres Â».

Les avantages accordĂ©s Ă  cinq concessionnaires ont pourtant coĂ»tĂ© 770 millions de dinars (environ 5,8 millions d’euros) au TrĂ©sor public, selon le procureur. « Le montage automobile visait Ă  prĂ©server l’économie nationale et Ă  crĂ©er de nouveaux emplois. Il n’y a pas eu de dilapidation de deniers publics Â», rĂ©torque l’ancien ministre de l’industrie et des mines Youcef Yousfi.

InterrogĂ© sur le patrimoine qu’il n’a pas dĂ©clarĂ© et qui atteindrait 300 millions de dinars selon l’enquĂŞte, Ahmed Ouyahia rĂ©pond : « Cet argent n’a aucun lien avec mon poste. Â» Sur les vĂ©hicules et le foncier qu’il n’a pas non plus dĂ©clarĂ©s, Abdelmalek Sellal affirme qu’il « n’aime pas conduire ce genre de vĂ©hicule Â».

Des patrons en campagne

Dans cette affaire, les prĂ©venus sont aussi accusĂ©s de « financement clandestin de partis politiques Â», selon l’agence de presse APS. Ahmed Mazouz, PDG du groupe du mĂŞme nom incarcĂ©rĂ© depuis le 4 juillet, est interrogĂ© sur l’origine des fonds se trouvant sur un compte bancaire Ă  son nom et dont le solde s’élève Ă  4,93 milliards de dinars, ainsi que sur ses diffĂ©rents biens immobiliers, dont certains sont au nom de son Ă©pouse. « Je suis commerçant depuis 1987. J’ai gagnĂ© mon argent Ă  la sueur de mon front dans le commerce et l’industrie Â», rĂ©pond-il.

Il admet avoir participĂ© au financement de la campagne de Bouteflika pour un cinquième mandat. « Je suis allĂ© au siège du Forum des chefs d’entreprise [FCE, principale organisation patronale], oĂą j’ai remis un chèque de 39 milliards de centimes [environ 2,9 millions d’euros] Ă  Ali Haddad Â», dĂ©clare-t-il, affirmant que celui qui dirigeait alors le FCE Ă©tait chargĂ© de rĂ©colter les fonds pour la campagne.

La veille, l’ancien ministre Abdelghani Zaalane, Ă©phĂ©mère directeur de cette campagne, avait affirmĂ© que 750 millions de dinars avaient Ă©tĂ© donnĂ©s par des hommes d’affaires et dĂ©posĂ©s sur des comptes bancaires ouverts par Abdelmalek Sellal. Ces hommes d’affaires auraient, selon lui, retirĂ© leur argent au dĂ©but du mouvement de protestation. L’audience doit se poursuivre samedi.

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