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À La Une - Liban

Convois, marche de femmes, sit-in : un samedi de forte mobilisation dans tout le Liban

Un homme tente de se donner la mort en s'immolant par le feu sur la place Riad el-Solh parmi la foule de manifestants.

Des manifestants contre les violences sexuelles, lors d'une marche,, le 7 décembre 2019 à Beyrouth. Photo AFP / ANWAR AMRO

Un convoi reliant les places de la contestation du Sud au Nord, une marche des femmes contre les violences sexuelles, un sit-in à Koraytem pour un gouvernement de technocrates : la journée de samedi au Liban, la 52e de cette révolte populaire sans précédent contre la classe politique, était placée sous le signe d'une forte mobilisation alors que le pays s'enfonce dans une crise gouvernementale et économique aiguë.

En début de soirée, des centaines de manifestants se sont rassemblés place Riad el-Solh, haut lieu de la contestation, afin de maintenir la pression sur les autorités. Ils ont été rejoints par plusieurs centaines de protestataires, en majorité des femmes, qui s'étaient réunies dans l'après-midi dans le quartier beyrouthin de Hamra, d'où est partie une marche qui se voulait silencieuse, visant à dénoncer le harcèlement sexuel. Sous le titre "Nous entendez-vous crier", l'appel à ce rassemblement, largement diffusé sur les réseaux sociaux, appelait "toutes les femmes rebelles" à rejoindre la marche "avec leurs mères, sœurs, filles et amies". Bien que la procession ait été annoncée comme silencieuse, de nombreux slogans étaient lancés pour dénoncer les violences faites aux femmes et réclamer le respect de leurs droits. A leur arrivée sur la place des Martyrs, dans le centre-ville de Beyrouth, les manifestantes ont prévu de "briser le silence et chanter leur cause". L'organisation de cette marche intervient après la récente dénonciation par de nombreuses jeunes femmes d’un harceleur présumé. Cet homme aurait même été aperçu lors de certaines manifestations organisées dans la capitale.

Photo Clotilde Bigot


Un homme s'immole par le feu

Vers 17h30, sur la place Riad el-Solh, et au milieu d'une foule dense, un homme s'est immolé par le feu, provoquant la panique. Selon les images de la LBCI, retransmises en direct, un homme s'est aspergé d'essence avant de s'immoler parmi la foule. Celle-ci a immédiatement jeté de l'eau et des habits sur l'individu afin d'éteindre les flammes. Des ambulances sont accourues sur place en se frayant difficilement un chemin parmi les protestataires. L'état de santé de la victime n'est toujours pas connu. L'homme a été évacué par les secouristes.

Le lieu où un homme a tenté de se donner la mort en s'immolant par le feu, samedi. Photo Clotilde Bigot

Un témoin cité par la LBCI affirme que l'homme serait âgé d'une cinquantaine d'années et avait menacé de s'immoler plus tôt dans la journée. Ce témoin affirme que la victime souffre de brûlures au niveau des jambes.

Plusieurs cas de suicides sur fond de crise économique et sociale ont été enregistrés ces derniers jours, provoquant l'émoi dans le pays.


Rassemblement à Koraytem

Parallèlement, des dizaines de manifestants se sont rassemblés à Koraytem, dans la capitale, afin de réclamer la formation d'un gouvernement de technocrates et l'organisation d'élections législatives anticipées.

Le Liban, où plus du quart de la population vit sous le seuil de pauvreté et qui affiche une dette publique représentant 150% de son PIB, connaît sa pire crise économique depuis la guerre civile des années 1975-1990, et la situation s'est encore dégradée avec le mouvement de contestation entamé le 17 octobre. Depuis lors, le pays vit au rythme des manifestations populaires réclamant le départ de l'ensemble de la classe dirigeante, jugée corrompue et incapable de sortir le Liban de l'ornière.

La journée de demain, dimanche, s'annonce chargée. Une série de manifestations sont prévues à travers le territoire, à la veille des consultation parlementaires contraignantes lancées par le président de la République Michel Aoun, pour former un nouveau gouvernement après la démission du Premier ministre Saad Hariri, sous la pression de la rue le 29 octobre. Le chef de l’État et ses alliés sont en faveur d'un gouvernement dit "techno-politique", alors que la rue réclame un cabinet formé intégralement d'experts indépendants. Le nom de Samir Khatib, un homme d'affaires à la tête de la compagnie Khatib & Alami, est donné favori pour le moment, mais sa nomination n'a toujours pas été tranchée. La rue a déjà fait savoir qu'elle s'opposait à sa désignation à la tête du prochain cabinet.

Au nord de Beyrouth, sur l'autoroute de Jal el-Dib-Antélias, des dizaines de protestataires, drapeaux libanais en main, se sont rassemblés sur le côté de la voie afin de célébrer l'installation du "poing de la révolution", une sculpture en bois devenue l'un des symboles de la contestation et qui a été déjà installée dans plusieurs autres villes, notamment dans le centre-ville de la capitale.

Photo ANI

Des sit-in nocturnes ont également été enregistrés à Halba, dans le Akkar (Nord), ainsi qu'à Nabatiyé au Liban-Sud. D'autres rassemblements ont également eu lieu dans la journée, notamment devant la cimenterie de Sibline, dans l'Iqlim el-Kharroub, afin de protester contre la pollution causée par cette exploitation, ou encore devant le siège du Conseil du développement et de la reconstruction (CDR) afin de dénoncer, selon les manifestants, la dilapidation des fonds publics dans des projets d'infrastructure. En matinée, une marche a également a eu lieu à 11h, de la place Riad el-Solh vers la Banque du Liban, afin de réclamer que soit épongée la dette publique du Liban.


Convoi de "la révolution"

Par ailleurs, des bus aux couleurs du pays, partis de plusieurs places du sud du Liban, notamment de Tyr et de Kfar Remmane, se sont élancés sur les routes dès le matin afin de relier les places de la contestation, du Sud au Nord. Les bus, certains ceints d'un drapeau libanais, ont démarré en début de journée de la place Alam de Tyr et du rond-point de Kfar Remmane, près de Nabatiyé, pour rejoindre Saïda, première étape du trajet. Là, plus de 200 personnes s'étaient réunies sur le rond-point Élia, rebaptisé "place de la révolution du 17 octobre", pour rejoindre le convoi, selon notre correspondant sur place, Mountasser Abdallah.

Un des organisateurs de cette initiative, Issam Hajj Ali, très actif dans le mouvement de contestation à Tyr, a souligné que ce "convoi de la révolution veut affirmer que les Libanais ne sont qu'un seul peuple, qui réclame un État qui soutient ses citoyens". "Nous refusons toute tentative de provoquer des dissensions entre les composantes du peuple libanais", a-t-il ajouté, indiquant que l'une des principales revendications que veut transmettre l'action de ce samedi est "l'établissement d'un État de droit juste".  

Le convoi roulant au niveau de l'autoroute de Batroun, dans le Nord. Photo ANI

Lancé sur la route côtière, rejoint en chemin par plusieurs véhicules, le convoi s'est arrêté à Khaldé, où un hommage a été rendu à Ala' Abou Fakhr, qui avait été tué dans la nuit du 12 au 13 novembre alors qu'il manifestait dans cette localité située au sud de Beyrouth. Après que les organisateurs de l'événement ont décidé de ne pas s'arrêter dans le centre-ville de Beyrouth en raison de la faible mobilisation à cet endroit, les participants au convoi ont été accueillis dans la localité d'Antélias, au nord de la capitale.

Peu après 18h, le convoi de bus est arrivé sur la place Abdel Hamid Karamé à Tripoli, également connue sous le nom de "place al-Nour". Un cortège de protestataires, dont certains étaient munis de casseroles, ont sillonné les rues de Tripoli, en marquant des arrêts devant les maisons de responsables politiques qu'ils conspuaient. Une dispute a éclaté devant le domicile du député Fayçal Karamé. Toutefois, le bureau de presse du député a démenti "tout incident ou coups de feu" devant son domicile.

Le convoi a ensuite poursuivi son chemin vers la place de Abdé, avant d'arriver à Halba, sa destination finale.

Le 16 novembre, un bus s'était déjà élancé sur les routes, en provenance cette fois du Akkar, au Liban-Nord. Il avait achevé prématurément son trajet à Saïda, les organisateurs craignant d'être attaqués sur leur route vers Nabatiyé. Les organisateurs de cette action avaient en effet été accusés d'être proches des États-Unis et constitué la cible de menaces.


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commentaires (3)

TRES BONNE INITIATIVE. LE LIBAN EST UN N,EN DEPLAISE A CERTAINS FAKIHISTES.

LA LIBRE EXPRESSION

14 h 45, le 07 décembre 2019

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Commentaires (3)

  • TRES BONNE INITIATIVE. LE LIBAN EST UN N,EN DEPLAISE A CERTAINS FAKIHISTES.

    LA LIBRE EXPRESSION

    14 h 45, le 07 décembre 2019

  • Je lisais l'evangile de Luc que les gens de Tyr et de Saida allaient a la montagne pour écouter le Christ. Il ne faut pas oublier que le sud du Liban et la Galilée

    Eleni Caridopoulou

    12 h 51, le 07 décembre 2019

  • Un arret du coté de Nabaa et un saut representatif a Ersal ne serait pas mauvais et ce à la mémoire de ces jeunes qui se sont suicidé à cause de leur stupides danses et coupures de routes.Des fleurs à deposer devant ces structures débiles du centre ville sans oublier les bougies. A partir du 1/1/2020 des nouveaux convois de TOUT le Liban remplis de CHOMEURS : il ne reste que 24 jours .....

    aliosha

    11 h 18, le 07 décembre 2019

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