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Cinq mots que nous malmenons sans le savoir au quotidien

Image d’illustration Robert Viglasky/Rue des Archives/ Everett

«Ennuyeux» ou «ennuyant»? «Pallier» ou «remédier»? Ces confusions parsèment nos conversations et nos courriels. Florilège.

Les mots ont un sens. Bien sûr, celui-ci évolue. Les définitions changent avec le temps, avec l’usage; elles prennent une nouvelle épaisseur, connaissent même un second souffle. Cependant, rappelle Alfred Gilder, auteur d’Écrire sans fautes, sans faute et avec style (Éditions Glyphe) sur lequel s’appuie cet article, «notre langue est de haute précision». Il faut choisir «le terme juste, l’expression appropriée». «Amener» n’est pas «apporter»; «baser» n’a pas le même sens que «fonder». Florilège.

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«Pallier» ou «remédier»?

Les confondre revient à ignorer leur définition exacte. Et l’on ne peut pas dire que la nuance soit fine. Comme l’explique Alfred Gilder, pallier est un verbe qui, au figuré, s’emploie au sens d’«atténuer». Exemple: pallier le désordre des finances. Au sens propre, en revanche, le terme a pour définition «ne guérir qu’en apparence». Exemple: pallier le mal. En définitive, «on ne peut donc pallier de manière durable».

S’agissant de remédier, il vient du latin remediare «guérir» et signifie «traiter par les remèdes appropriés», peut-on lire dans Le Trésor de la langue française informatisé (TLFI). Il a donc un «sens plus positif». Ainsi, nous pouvons l’employer de cette manière: le travail remédie à l’ennui. Notons également le joli verbe «obvier» qui signifie «prendre les précautions nécessaires pour prévenir un mal». L’on peut obvier à un malheur, à un inconvénient, à un danger ou encore, à des difficultés.

«Ennuyeux» ou «ennuyant»?

Voilà deux adjectifs que nous sommes nombreux à confondre. Revenons un instant sur leurs définitions respectives. Est plutôt ennuyant«ce qui importune, qui contrarie, qui fatigue». Exemple que l’on peut trouver dans le TLFI: c’est bien ennuyant de vieillir. Le sens «qui, ennuie; qui provoque un sentiment de lassitude» est possible mais vieilli, lisons-nous encore.

Ce qui est ennuyeux est «ce qui est propre à ennuyer, qui ennuie habituellement». L’adjectif a, cette fois, pour premier sens «qui suscite un sentiment de lassitude». On parle donc d’un livre ennuyeux, d’une personne ennuyeuse.

«Vicissitudes» ou «péripéties»?

Ainsi que le rappelle avec justesse Alfred Gilder, nous pensons les vicissitudes malheureuses, nuisibles ou malvenues. Serait-ce parce que nous y entendons le mot «vice»? Qu’à cela ne tienne! Rappelons simplement que les vicissitudes désignent «une succession de choses différentes, qu’elles soient bonnes ou mauvaises». Ainsi que nous le lisons dans le TLFI, le mot est emprunté au latin classique vicissitudo «alternative, échange, passage successif d’un état dans un autre».

À ne pas confondre avec les péripéties, ces «événements imprévus provoquant de brusques revirements de situation». À l’origine, elles étaient le nom d’un «changement subit de situation dans une action dramatique, un récit», sens attesté dès 1605. Avant de caractériser un «événement de caractère inéluctable amenant le dénouement d’une pièce, d’une narration» puis enfin, par extension, un incident.

«Suppléer quelque chose» ou «suppléer à quelque chose»?

La nuance est fine. Légère. Imperceptible pour la plupart d’entre nous. Et pourtant, elle a toute son importance. En effet, ainsi que le rappelle l’auteur, suppléer quelque chose,«c’est ajouter ce qui manque, fournir ce qu’il faut de surplus». Exemple donné par Alfred Gilder: ce sac doit être de mille francs, et ce qu’il y aura de moins, j’y suppléerai.

Suppléer à quelque chose est une formule que nous employons pour insister sur l’idée qu’il faut «remplacer» quelque chose pour «en réparer le manquement, le défaut». En guise d’exemple, cette phrase citée par Le Trésor de la langue française: l’éléphant (...) supplée aux mains par sa trompe.

«Réhabiliter» ou «rénover»?

Votre maison tombe en ruines? N’espérez pas la voir un jour réhabilitée. En effet, le verbe signifie «restituer sa capacité, rétablir dans ses droits, dans l’estime générale». La définition «remettre en état, rénover (un quartier, un immeuble» apparaît à la fin du XXe siècle, note le TLFI, et vient de l’anglais to rehabilitate du même sens. Préférons donc le terme rénover. Ainsi, «on réhabilite des personnes, on rénove des biens: le capitaine Dreyfus fut réhabilité; les HLM furent rénovées...», note l’auteur.

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5 commentaires
  • Rene Mettey

    le

    Qui pourrait me dire la différence (que j'ai du mal à la connaître) entre "colérique" et "coléreux" ?
    Ou alors utiliser "colère" en adjectif !Comme l'écrivit la comtesse de Ségur : "Marie, vous êtes colère, vous erez fessée"!

  • jo zefka

    le

    Il y a une erreur dans cet article; dans le passage qui suit : "suppléer quelque chose,«c’est ajouter ce qui manque, fournir ce qu’il faut de surplus». Exemple donné par Alfred Gilder: ce sac doit être de mille francs, et ce qu’il y aura de moins, j’y suppléerai."
    Dans cet exemple, c'est bien "suppléer à" qu'on utilise, comme le montre le pronom "y".... Si c'était la forme transitive directe ("suppléer quelque chose"), on dirait : "je LE suppléerai".

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