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Myanmar : une experte de l’ONU dénonce les menaces en ligne contre les activistes défendant les Rohingya

Des réfugiés rohingyas fuyant les affrontements et les persécutions au Myanmar.
Photo OIM/Mohammed
Des réfugiés rohingyas fuyant les affrontements et les persécutions au Myanmar.

Myanmar : une experte de l’ONU dénonce les menaces en ligne contre les activistes défendant les Rohingya

Droits de l'homme

La Rapporteure spéciale des Nations Unies sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, Yanghee Lee, a condamné les menaces en ligne contre les activistes qui militent pour la justice et la responsabilité, exhortant le gouvernement et les entreprises de médias sociaux à faire davantage pour protéger leurs militants et respecter les droits de l’homme. 

« Je demande à tous les organes de l’État du Myanmar de veiller à ce qu’aucune représailles ne soit exercée à l’encontre d’un groupe ou d’un individu qui prône la justice et la responsabilité au Myanmar », a déclaré Mme Lee dans un communiqué de presse rendu public ce mardi à Genève. 

Ces menaces font suite à l’annonce d’une procédure judiciaire internationale concernant les atrocités commises contre les Rohingya par l’armée et les autres forces de sécurité du Myanmar en 2016 et 2017, et à leur persécution continue.

« Les menaces en ligne, y compris celles qui visent les militants éminents Maung Zarni et Nay Say Lwin de la Free Rohingya Coalition, sont très préoccupantes », a dit Mme Lee. 

Rhétorique en ligne hostile après l’annonce de la plainte de la Gambie devant la CIJ

Selon l’experte indépendante onusienne, des « discours abusifs » continuent d’être diffusés sur les médias sociaux ciblant les minorités ethniques du Myanmar, y compris les Rohingya, ainsi que les défenseurs des droits humains, les femmes et autres. « Ces messages sont destinés à répandre la haine et la peur et, comme nous le savons, peuvent avoir des conséquences désastreuses dans le monde réel », a-t-elle ajouté.

Le mois dernier, la Gambie a déposé « une requête historique » contre le Myanmar devant la Cour internationale de Justice (CIJ) en vertu de la Convention sur le génocide, tandis que la Cour pénale internationale a autorisé une enquête sur les crimes contre l’humanité qui seraient commis de l’autre côté de la frontière entre le Myanmar et le Bangladesh. Des plaintes pénales pour génocide et crimes contre l’humanité ont été également déposées en Argentine conformément au principe de compétence universelle.  

Après l’annonce de ces développements importants, Mme Lee indique avoir « noté la propagation d’une rhétorique en ligne de plus en plus hostile qui propage un récit faux et diviseur d’être "avec nous" ou "contre nous" ».

La Rapporteure spéciale sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, Yanghee Lee.
Photo : ONU/Eskinder Debebe
La Rapporteure spéciale sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, Yanghee Lee.

« Ne pas offrir de plates-formes pour la haine et l’incitation à la violence »

Dans ces conditions, Mme Lee a exhorté les entreprises de médias sociaux à redoubler d’efforts pour s’acquitter de leur responsabilité en matière de respect des droits de l’homme, notamment en s’assurant qu’elles n’offrent pas de plates-formes pour la haine et l’incitation à la violence.

Notant enfin le rôle que les médias sociaux ont joué dans l’aggravation de la violence de 2016 et 2017, l'experte onusienne a appelé le gouvernement à prendre des mesures urgentes et globales pour combattre l’incitation à la violence, à la discrimination et à la haine et à promouvoir activement une culture de tolérance et de modération. « Le gouvernement du Myanmar doit veiller à ce que tous ceux qui le font soient à l’abri de l’intimidation, de la violence et des représailles », a-t-elle dit.  

La Cour internationale de Justice examine jusqu’à jeudi les accusations de la Gambie à l’encontre de Naypyidaw pour son «traitement brutal» infligé aux Rohingya. La Gambie a été mandatée par les 57 États membres de l’Organisation de la coopération islamique et estime que le Myanmar a violé la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, un traité de droit international approuvé en 1948. La CIJ, organe judiciaire principal des Nations unies, a été créée en 1946 pour régler les différends entre Etats membres.
 

NOTE

Les Rapporteurs spéciaux font partie de ce que l’on appelle les Procédures spéciales du Conseil des droits de l'homme. Les procédures spéciales, le plus grand groupe d'experts indépendants du système des droits de l'homme de l'ONU, représentent un ensemble de mécanismes d’enquête et de suivi indépendants établis par le Conseil des droits de l’homme et qui traitent soit de situations nationales spécifiques soit de questions thématiques au niveau mondial. Les experts des procédures spéciales travaillent sur la base du volontariat ; ils ne font pas partie du personnel de l'ONU et ne reçoivent pas de salaire pour leur travail. Ils sont indépendants de tout gouvernement ou organisme et siègent à titre personnel.