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Politique

Corinne Lepage porte plainte contre François Bayrou

Mise en cause par des déclarations de François Bayrou devant la police, l'ancienne ministre Corinne Lepage le poursuit pour "dénonciation calomnieuse". Le président du MoDem était interrogé dans l'affaire des assistants parlementaires du parti centriste au Parlement européen, dans laquelle Corinne Lepage est la première accusatrice.

Pascal Ceaux , Mis à jour le
François Bayrou et Corinne Lepage en 2008 lors d'une conférence nationale du MoDem à Paris.
François Bayrou et Corinne Lepage en 2008 lors d'une conférence nationale du MoDem à Paris. © Christophe Morin/IP3/MAXPPP

Corinne Lepage est en colère. L'ancienne ministre de l'Environnement (1995-1997) de Jacques Chirac s'apprête à déposer plainte pour "dénonciation calomnieuse" contre François Bayrou après avoir découvert la semaine dernière dans le JDD que le président du MoDem l'avait mise en cause devant la police. Interrogé le 11 septembre dans l'enquête sur l'affaire des assistants de son parti au Parlement européen, le leader centriste avait accusé Corinne Lepage d'avoir tenté d'"escroquer" les maires des communes bretonnes touchées par la marée noire de l'Amoco Cadiz dans les années 1970.

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Lire aussi - Affaire des assistants parlementaires : comment François Bayrou s'est défendu devant les juges

"Je n'admets pas que ma probité soit mise en cause dans cette affaire où les décisions de justice m'ont été favorables", réplique-t-elle. Son avocat, Richard Malka, devrait déposer la plainte en son nom au début de la semaine. Bayrou a notamment affirmé que Corinne Lepage, avocate engagée de longue date dans l'écologie, aurait obtenu "une somme astronomique" des élus dont elle assurait la défense, et que le conseil de l'Ordre des avocats l'avait ensuite "condamnée à rendre l'argent". Documents à l'appui, l'intéressée réfute ces propos.

"Les difficultés qu'il rencontre ne sont pas une ­raison pour perdre son sang-froid", affirme Corinne Lepage

Si elle a en effet assisté, de 1978 à 1992, le syndicat mixte repré­sentant les 176 communes et les deux départements touchés par la pollution, elle a perçu un peu moins de 1 million d'euros d'honoraires qui n'ont pas été contestés. Au terme de quatorze ans de bataille juridique, elle avait souhaité se désengager en raison d'un désaccord avec ses clients. Mais l'issue favorable du procès méritait à ses yeux une rétribution supplémentaire. Sollicité par elle, le bâtonnier avait fixé le montant de cet "extra" à un peu plus de 600.000 euros, en saluant "l'ingéniosité des moyens développés [et] la détermination ­manifestée dans l'intérêt de ses clients" par Me Lepage.

Le syndicat mixte a cependant contesté et obtenu gain de cause devant la Cour de cassation. Aussi Corinne Lepage a-t-elle remboursé la somme perçue, mais elle a porté l'affaire devant la Cour européenne des droits de l'homme, qui lui a donné raison en mai 2005 (sans récupérer les fonds pour autant).

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"Je trouve bête le procédé de ­François Bayrou, nous a indiqué Corinne Lepage. Les difficultés qu'il rencontre ne sont pas une ­raison pour perdre son sang-froid. Les déclarations qu'il a faites contre moi n'ont aucun rapport avec ce qui lui est reproché."

La brouille ne date pas d'hier entre le chef de file du MoDem et l'ancienne ministre

La brouille ne date pas d'hier entre le chef de file du MoDem et l'ancienne ministre, élue sous ses couleurs au Parlement européen (2009-2014). Plusieurs sujets alimentent leur contentieux, et, d'abord, l'enquête française sur les assistants du Parlement européen.

Bayrou a été mis en examen, le 6 décembre, pour "complicité de détournement de fonds publics" par la juge Charlotte Bilger. La magistrate cherche à vérifier si des collaborateurs payés sur les fonds européens ne travaillaient pas pour le MoDem. Or Corinne Lepage avait été la première à brandir cette accusation dans un livre paru en 2015. Elle racontait avoir été elle-même sollicitée pour mettre l'un de ses assistants à disposition du parti et avoir refusé.

Devant la police, Bayrou a présenté une autre version. Selon lui, la seule demande adressée à l'eurodéputée Lepage portait sur le versement d'une partie de sa dotation du Parlement européen au bénéfice du groupe où siégeaient les ­centristes. "C'est un engagement signé par Mme Lepage", a-t-il déclaré, assurant que celle-ci aurait cédé durant deux ans "un tiers de ses indemnités de secrétariat" avant de mettre fin aux paiements.

Autre sujet de discorde entre Bayrou et Lepage, les conditions de leur divorce politique

Corinne Lepage, aussi questionnée durant l'enquête, a contesté avoir signé le moindre engagement et avoir versé la moindre somme ­durant son mandat. Ses relevés de dépense au Parlement européen – que le JDD a pu consulter – ne mentionnent aucun transfert au profit du groupe centriste ou du MoDem.

Autre sujet de discorde entre Bayrou et Lepage, les conditions de leur divorce politique. Quand l'ex-ministre a rejoint le MoDem, en 2007, elle présidait le mouvement Cap21. Elle avait obtenu de Bayrou une compensation financière pour renoncer à présenter ses propres candidats aux législatives. Selon Cap21, l'engagement aurait été tenu en 2008, avec le versement de 48.993 euros, mais pas entre 2009 et 2012. Le litige avait été tranché par la cour d'appel de Paris en 2013, condamnant le MoDem à 3.000 euros de ­dommages et ­intérêts, mais seulement pour "exécution tardive de ses obligations ­financières" en 2008 et 2009.

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