Quelques clés? Exprimer son avis, quand c’est possible. Prendre conscience que, souvent, la contrariété ressentie n’est pas intentionnelle. Et se relaxer à travers sa technique de prédilection, méditation, sophrologie, acupuncture, autohypnose, etc.
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Mardi, tout commence d’ailleurs par un exercice de détente. Sylvie Salignac nous demande de rester assis dans notre position naturelle, de fermer les yeux et de ressentir chaque point d’appui du corps qu’elle énumère de haut en bas. Ensuite, chacun est invité à adopter une posture de relâchement, paumes tournées vers le haut, nuque dégagée, les yeux toujours fermés. La respiration se pose, les esprits aussi. De quoi entamer la discussion de manière libérée.
L’angoisse de la différence
Un habitué de l’atelier se lance. «Je me prends la tête avec un problème, je ne trouve pas d’issue. Ça fait comme un disque rayé. Je prends des tranquillisants, je téléphone à La Main tendue, mais c’est épuisant.» Plus tard, le même interlocuteur donne un visage à son problème. «Quand on doit se voir, mon frère et moi, il dit toujours: peut-être, on verra, éventuellement… Moi je suis un angoissé, j’aimerais avoir une réponse claire, être fixé.»
Sylvie Salignac intervient: «La rumination est un flot incessant de pensées négatives qui génèrent de la souffrance. Elle naît souvent de dysfonctionnements de communication. Ici, par exemple, quelqu’un a besoin d’un cadre défini, alors que son interlocuteur étouffe dans une relation trop programmée. Le mieux est de prendre du recul.»
«Je ne suis pas d’accord», conteste une participante. «J’ai une amie dans les nuages qui me qualifie de psychorigide et me déstabilise toujours avec son flottement. Je ne vais pas prendre du recul. J’ai décidé de voir les personnes qui sont bonnes pour moi et nos chemins vont se séparer.»
La thérapeute suggère doucement: «On peut tout à fait se séparer des relations conflictuelles. On peut aussi se demander ce que cette situation touche chez soi. Si ça fait mal, c’est que quelque chose n’a pas guéri.» Le monsieur du début acquiesce. «C’est clair, on manque de confiance en soi, on manque d’estime. Mais c’est parce qu’on n’existe vraiment que par les autres, non?» «Non, on existe aussi d’abord pour soi», assure Sylvie Salignac.
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Intitulé «Parlons-en!», cet atelier au sommaire du très riche programme de Cité Seniors porte bien son nom, car c’est une conversation libre et parfaitement documentée qui roule entre les participants et l’animatrice. A ce stade, la psychothérapeute liste avec les aînés les raisons de cette rumination mentale. Parmi les fauteurs de troubles, il peut y avoir un sentiment de ne pas être à la hauteur, des propos blessants, une absence de cadre rassurant, ou, plus généralement, des problèmes sans solution.
Une participante en témoigne: «Quand un proche, un enfant souffre, ça me touche et je n’arrive pas à dormir.» «Là, on fait ce qu’on peut pour mieux vivre cette situation», suggère l’animatrice. «On travaille sur l’acceptation. Mais attention, accepter ne signifie pas être d’accord. Accepter, c’est ce qui est le mieux lorsqu’on ne peut pas changer ce qui arrive.» Plus loin, Sylvie Salignac, qui est aussi sophrologue, conseille de ne pas trop «s’approprier» les difficultés. «Parfois, en séance, on me dit, «c’est mon problème», «c’est mon enfant», «c’est ma maladie», etc. Or, nous ne sommes pas ce problème, ni cette maladie.»
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Une jeune retraitée apporte une autre vision. «On ne parle que de rumination négative. Moi, ruminer me permet de regarder la situation sur toutes ses facettes et de prendre la bonne décision.» «Alors, c’est plus de la réflexion que de la rumination», nuance la thérapeute. «Non, reprend l’intéressée. C’est une vraie rumination avec le sentiment d’être submergée par mes émotions. Mais, à force d’y penser, tout se décante et j’y vois très clair, j’arrive à une solution.»
Un autre participant pense que l’action peut être une réponse à la rumination. «Je procrastine, je me sens comme dans une roue de hamster. Puis, enfin, j’agis – par exemple je me mets à rédiger mon courrier – et l’horizon se dégage.» Le même intervenant conseille aussi de marcher, bouger, pour chasser les idées noires. Une participante plus âgée sourit, un peu triste. «J’étais très active par le passé et, oui, j’ai toujours beaucoup bougé pour évacuer le spleen. Mais maintenant, mon corps me lâche et j’en suis réduite à bouger dans ma tête.» «Ce qui est aussi très bien, saisit Sylvie Salignac au bond. Souvenez-vous que le cerveau ne fait pas la différence entre une image réelle et une image inventée. Si vous imaginez que vous bougez, vous pourrez bénéficier de sensations identiques et agréables.»
Miracles et plasticité cérébrale
Dans cet esprit de visualisation, la thérapeute suggère une série de pratiques pour se «défocaliser». Elle rappelle que le cerveau ne peut pas faire deux choses à la fois. Ainsi, le temps passé à méditer, quel que soit le type de méditation, permet de réduire la ronde des pensées. De plus, des études ont montré que la plasticité cérébrale est telle qu’il suffit de quelques minutes d’émotions positives par jour pour reprogrammer son cerveau dans la bonne direction. «Après, poursuit l’animatrice, j’ai croisé beaucoup de personnes qui se sont construites sur une base de souffrance et qui craignent de laisser leurs vieilles croyances, car, pour elles, le bonheur, c’est l’inconnu.»
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Les ruminations existent à travers l’importance qu’on leur donne, résume la sophrologue. Si la méditation n’est pas votre pratique préférée, vous pouvez aussi écrire ou pratiquer d’autres exercices qui visent l’instant présent. «Vous allez sur votre balcon, vous regardez le paysage et vous fermez les yeux en essayant de vous remémorer les éléments observés. La pleine présence, le ressenti permettent de sortir de la spirale obsessionnelle.» Et pas besoin d’être retraité(e) pour tirer parti de ces conseils avisés.