La Chine a suggéré lundi 16 décembre au footballeur Mesut Ozil de se rendre au Xinjiang, après son tweet polémique sur cette région où Pékin mène une politique systématique de répression contre la minorité musulmane des Ouïgours. Dimanche, la chaîne publique chinoise CCTV avait retiré de sa programmation le match de Premier League anglaise entre Manchester City et Arsenal, où le joueur allemand devait jouer.
« Si M. Ozil en a l’occasion, nous serons heureux qu’il se rende au Xinjiang pour se rendre compte » de la situation, a déclaré devant la presse lundi un porte-parole de la diplomatie chinoise, Geng Shuang, estimant que le footballeur d’origine turque avait été trompé par « de fausses informations ».
Ozil, international allemand d’origine turque, a condamné vendredi sur les réseaux sociaux la répression de la Chine contre la minorité musulmane dans sa région occidentale, tout en critiquant les pays musulmans pour ne pas l’avoir dénoncée.
Un joueur qui défend Erdogan
« Des corans sont brûlés… des mosquées détruites… les écoles islamiques interdites… des intellectuels religieux tués les uns après les autres… Des frères envoyés par la force dans des camps », s’est-il indigné dans un message diffusé en langue turque sur Twitter et Instagram.
« Les musulmans restent silencieux. On n’entend pas leur voix », a-t-il ajouté dans son message, où figure à l’arrière-plan le drapeau de ce que les séparatistes ouïgours appellent le Turkestan oriental. Samedi, Arsenal a pris ses distances vis-à-vis des propos d’Ozil, affirmant que le club a « toujours adhéré au principe de ne pas s’impliquer dans la politique ».
Le joueur, no 10 des Gunners, 31 ans, s’est rapproché ces dernières années du président turc, Recep Tayyip Erdogan, à la tête d’un des rares pays à majorité musulmane critique du traitement des Ouïghours en Chine.
Internements massifs de populations musulmanes dans le Xinjiang
Dans la région du Xinjiang, dans l’ouest de la Chine, la minorité musulmane ouïgoure est l’objet de rétentions arbitraire, de conditions de détention extrêmes, de pratiques visant au lavage de cerveau… La répression systématique de cette minorité, objet depuis quelques années des critiques des organisations non gouvernementales, a été récemment confirmée par une vaste enquête de médias du monde entier, dont Le Monde.
Les documents récoltés confirment que la Chine de Xi Jinping entretient un vaste réseau de centres d’internement secrets où sont détenues au moins un million de personnes. Pékin dément ce chiffre et parle de « centres de formation professionnelle », destinés à aider la population à trouver un emploi et à l’éloigner de la tentation de l’islamisme et du terrorisme.
Le basket-ball américain s’était également vu infliger des mesures de rétorsion du diffuseur chinois à la suite du soutien du directeur général des Houston Rockets, Daryl Morey, aux manifestants prodémocratie de Hongkong, entraînant des tensions diplomatiques entre les deux pays.
En partenariat avec le Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ), Le Monde et 16 médias internationaux dévoilent en détail le fonctionnement de la répression des Ouïgours par le régime chinois. Ces informations ont été obtenues par la fuite de documents secrets de Pékin.
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