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Voici le palmarès des pays avec le meilleur système de retraite

Alors que les grévistes continuent de s'opposer à la réforme des retraites voulue par le gouvernement, deux rapports récents tentent de mesurer l'efficacité des systèmes de pensions à travers le monde. Explications.

Bruna Basini , Mis à jour le
Pour l'indice Mercer, les Pays-Bas (ici la capitale Amsterdam) ont le meilleur système de retraite au monde.
Pour l'indice Mercer, les Pays-Bas (ici la capitale Amsterdam) ont le meilleur système de retraite au monde. © Sipa

L'un classe, l'autre compare. Un mois sépare la publication, fin octobre, du Melbourne Mercer Global Pension index 2019 de celle du Panorama des pensions 2019 de l'OCDE, fin novembre. Les deux rapports étaient très attendus, surtout en France où le débat s'envenime autour de l'architecture du futur régime de retraite "universel" . Le rapport établi par Mercer note les systèmes de 37 nations. Il s'appuie sur trois critères : la performance, la viabilité et l'intégrité propres à chaque modèle de retraite (voir encadré ci-dessous). C'est la seule solution pour dépasser leurs spécificités et pour faire abstraction du grand schisme philosophique entre les pays de culture anglo-saxonne, adeptes des régimes par capitalisation, et les pays latins, attachés à un système par répartition ; sans oublier ceux qui panachent : les fameux modèles mixtes.

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Christel Bonnet, consultante retraite senior chez Mercer France, insiste sur la dimension globale de l'approche : "Outre les niveaux de revenus servis, nous prenons en compte le taux d'épargne et d'endettement moyen d'une population ainsi que son patrimoine immobilier ou encore le taux d'emploi des personnes âgées."

Les Pays-Bas champions

Résultat : les meilleurs élèves de la classe sont les Pays-Bas, suivis du Danemark et de l'Australie. Qu'est-ce qui fait la force du modèle néerlandais? La combinaison entre un régime obligatoire par capitalisation et des systèmes complémentaires privés à prestations définies (les salariés cotisent et, en fin d'activité, leur pension est calculée en ­fonction de leur carrière et d'un pourcentage sur leurs salaires passés).

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En France, on compte 1,7 actif pour financer un retraité, c'est très peu

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L'indice Mercer accorde une grande ­importance à la solidité financière des dispositifs. À cette aune, la France – ­18e au classement général – ne fait pas le poids. En cause : un ratio actifs-retraités très déséquilibré aggravé par le vieillissement de la population. "En France, on compte 1,7 actif pour financer un retraité, c'est très peu", justifie Christel Bonnet. Autre faiblesse : les cotisations prélevées à hauteur de 80% sur les salaires des actifs ne sont pas préfinancées. "Le paiement des retraites absorbe chaque année en France 330 milliards d'euros, soit 14% du PIB", chiffre la consultante.

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Carte de l'efficacité des systèmes de retraite dans 37 pays, d'après l'indice Mercer

Carte de l'efficacité des systèmes de retraite dans 37 pays, d'après l'indice Mercer

(Le JDD)

En matière d'intégrité, la France est encore plus mal notée (30e). Son système est jugé peu lisible pour les citoyens et opaque en matière de gouvernance. "Plus de 75% des Français se disent perdus : qu'il s'agisse de l'âge minimum requis pour partir à taux plein ou du calcul de leurs trimestres ou des organismes qui gèrent leur régime", appuie ­Chistel Bonnet.

Capitalisation ou répartition

Pour Hervé Boulhol, responsable de l'équipe retraite à la direction de l'emploi et des affaires sociales de l'OCDE, le classement Mercer tend à avantager les systèmes par capitalisation. Et de rappeler que ce modèle, dit "béveridgien", a principalement pour objectif de lutter contre la pauvreté des personnes âgées et de leur "assurer un filet de sécurité financé par l'impôt, une sorte de RSA du troisième âge". Dans le modèle "bismarkien", venu d'Allemagne, la retraite est perçue comme une assurance vieillesse assise sur des cotisations prélevées sur les salaires dans le but d'éviter une baisse trop forte de revenus à la retraite.

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Le modèle danois fonctionne bien car il combine une allocation universelle élevée financée par l'impôt et une couche de capitalisation

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Sur les 36 pays membres de l'OCDE, 18 pays ont un système par répartition, 9 un système par capitalisation et 9 des régimes mixtes. Hervé Boulhol décrypte : "Le modèle danois fonctionne bien car il combine une allocation universelle élevée financée par l'impôt et une couche de capitalisation ; le néerlandais est très dépendant des marchés financiers et donc fragilisé aujourd'hui par un environnement de taux bas ; enfin le modèle australien, qui permet aux retraités de liquider leur pension en capital, aboutit à ce que bien souvent ses bénéficiaires qui sous-estiment leur espérance de vie soient exposés à des risques accrus de vulnérabilité. Un quart des plus de 65 ans vivent au-dessous du seuil de pauvreté en Australie."

Les atouts de la France

Selon l'OCDE, les modèles les plus performants sont ceux des pays ayant des taux importants de cotisation, comme la France ou l'Italie, ou un âge élevé de départ à la retraite, comme les Pays-Bas ou la Norvège, et qui peuvent financer un haut niveau de pensions. Le ­modèle français figure ainsi parmi les plus généreux envers les retraités. "Les plus de 65 ans ont des revenus égaux à 103% de la moyenne de la population ; cela représente environ 2.200 euros par mois", précise Hervé Boulhol.

Classement de l'efficacité des systèmes de retraite dans 37 pays, d'après l'indice Mercer

Classement de l'efficacité des systèmes de retraite dans 37 pays, d'après l'indice Mercer

(Le JDD)

Les Français partent aussi plus tôt en retraite. Comme les Slovaques et Luxembourgeois, ils sortent du marché du travail à 60,8 ans en moyenne, quatre ans plus tôt que dans les autres pays de l'OCDE. La France fixe l'âge légal minimum pour partir à la retraite à 62 ans, contre 65 ans et 67 ans dans la plupart des pays de l'OCDE. En pratique, les Français partent à la retraite en moyenne à taux plein à 63,3 ans après 41,3 années d'activité (dans le régime général des salariés du privé). Autre carotte française : le calcul des retraites sur les vingt-cinq meilleures années d'une carrière, alors que la plupart des pays de l'OCDE le font sur toutes les années travaillées.

Les femmes discriminées

Tous les ­régimes restent inégalitaires entre les femmes et les hommes, du fait des écarts de ­salaires, du poids des temps partiels et des interruptions qui émaillent leur parcours. Dans 27 pays sur 36, l'écart de pension est en moyenne de 25% et de l'ordre de 40% en Allemagne, au Luxembourg, en Autriche et aux Pays-Bas. En France, la retraite moyenne des hommes est de 1.739 euros, contre 1.065 euros pour les femmes, et de 1.322 euros avec réversion. En matière de pension de réversion, les taux vont de 50 à 60% et dépendent de conditions de ressources, d'âge ou de non-remariage.

Certains pays comme l'Autriche et l'Italie ne pratiquent pas de critères d'âge permettant à certaines femmes de bénéficier de pensions de réversion à vie à un âge précoce. En Suède, à l'inverse, au nom de l'égalité femmes-hommes, la réversion a été supprimée du système par répartition. L'écart d'âge pour partir à la retraite se resserre partout mais persiste dans 12 pays de l'OCDE, allant de cinq ans en ­Pologne et en Israël à un an en Suisse. Les femmes partent plus tôt, mais leur pension est plus faible car elles accumulent moins de droits.

Trois critères pour un indice mondial

La 11e édition de l'indice Mercer vient de paraître. Il permet de ­comparer 37 systèmes de retraite à travers le monde, en se fondant sur la moyenne pondérée de trois sous-indices pour pouvoir les comparer : leur performance, leur viabilité et leur intégrité.

  • L'indice de performance mesure si un retraité peut vivre décemment avec la pension qu'il reçoit. Il compte pour 40% du score final. Les indicateurs pris en considération pour évaluer la performance d'un système sont le montant des pensions servies, le poids de la fiscalité, le traitement des ruptures de carrière (démission, chômage et mobilité professionnelle), de vie personnelle (séparation et divorce) ou d'intégrité physique (­invalidité, maladie) ainsi que le niveau d'épargne, le patrimoine immobilier et l'endettement.
  • L'indice de viabilité apprécie si un système est solide financièrement. Il compte pour 35% du score final. Cet indice intègre dans son calcul le taux de remplacement, autrement dit quelle part du revenu précédent est conservée, les cotisations versées, le ratio cotisants-retraités, le niveau d'endettement d'un État et le niveau de croissance de son économie.
  • L'indice d'intégrité s'intéresse à la lisibilité d'un régime et à la confiance que lui accorde la collectivité. Il compte pour 25% du score final. Cet indice évalue la régulation, la gouvernance et les mécanismes de protection et d'information associés à un système de retraite ainsi que son coût de fonctionnement.

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