Le ventre vide, le cœur gros et deux euros

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Quelque part en France, une mère et ses trois enfants, une puéricultrice et un professeur des écoles ont dû faire face au manque de nourriture et à la précarité extrême. Un jour, à la fin du mois ou à répétition, côtoyée, constatée ou subie, ils racontent la faim.

En France, une personne sur cinq ne mange pas à sa faim tandis que 21% des Français ont du mal à prendre trois repas par jour, faute de moyen financier. C’est encore l’INSEE qui nous rappelait en 2017 que 14,2 % de la population vivait sous le seuil de pauvreté, soit 9 millions de personnes. 

Au-delà des chiffres alarmants, il est question, ici, de l’expérience de la faim, ce que cela fait au corps, comment on en sort. 

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"Elle a volé mon goûter parce qu’elle avait faim"

A Marseille, un jeune professeur des écoles s’aperçoit que son encas, soigneusement rangé dans le tiroir de son bureau, est subtilisé régulièrement par une élève de 13 ans qui ne reçoit pas l’alimentation dont elle a besoin. 

"On a découvert que son quotidien était très difficile et qu’elle ne mangeait pas à sa faim. J’achetais des goûters à mettre dans mon tiroir pour lui permettre de prendre son petit-déjeuner".

"Ce qui est encore plus triste, c’est que mon quotidien est fait d’élèves qui ne remplissent pas les besoins les plus élémentaires pour vivre. C’est une élève parmi tant d’autres et ça me déprime. Je n’ai pas de solution face à ça". 

"Quand j’ouvre le frigo, il n’y a rien et mes enfants réclament à manger"

Sans emploi et logée dans un hôtel social, une mère parvient à peine à nourrir suffisamment ses trois enfants. 

"J’ai 372 euros par mois. Je n’ai pas les moyens d’acheter des trucs équilibrés. A midi, j’ai fait des pates avec de la sauce tomate et le soir, des frites avec du pain et de la mayonnaise. Je fais avec les moyens du bord. Si j’ai du pain, je mange du pain". 

"Il m’arrive des fois d’être à sec : je n’ai pas un euro sur moi ni un truc à manger. Alors je ne mange pas. Une fois, j’ai été à Cora. J’ai ouvert un paquet de gâteau que j’ai mangé avec mes enfants dans le supermarché. On a déposé le paquet dans le rayon et on est reparti".

"Elle reçoit 2 euros par jour et par enfant"

Jocelyne est puéricultrice et doit régulièrement faire face à des cas d’extrême précarité. Pour venir en aide à une mère en détresse, elle en vient à dépasser le cadre de sa profession. 

"Quand ils ne mangent pas, elle ne sort pas les enfants pour ne pas les tenter par les vitrines, les vendeurs de crêpes et de gaufres". 

"Elle n’a pas d’argent pour nourrir ses enfants. J’ai décidé de leur acheter des gâteaux, des jus de fruits, des compotes. Je lui ai donné 5 euros pour acheter du pain. A ce moment, j’agissais moins en puéricultrice qu’en maman". 

"Aujourd’hui je lui rends visite régulièrement pour la soutenir. J’espère une issue heureuse".

Merci à Jocelyne Mathieu, Jean-Louis Gérhard, Huguette Boisonnat.

  • Reportage : Valérie Borst
  • Réalisation : Anne-Laure Chanel

Référence musicale de fin d'émission : Soutbouk - Jawhar

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