Contrairement aux États-Unis, où l'industrie du schiste a connu un boom spectaculaire, en Angleterre, les projets ont vite tourné court. Après plusieurs secousses sismiques et un rapport officiel faisant le lien entre risques de séismes et fracturation hydraulique, le gouvernement britannique a fait marche arrière et lancé un moratoire. L'opposition et les ONG environnementales demandent une interdiction définitive de ce procédé contesté.

Il aura fallu près de dix ans au gouvernement britannique pour suspendre la fracturation hydraulique. Alors qu’il espérait ouvrir 20 puits d’ici 2020 et réduire sa dépendance au gaz, importé de Norvège et du Qatar, ce ne sont finalement que trois puits qui auront été forés dans ce laps de temps, sans jamais être exploités. Certains projets ont dû être interrompus dès 2011 après des séismes dans le nord-ouest de l’Angleterre.
Un rapport de l’Oil and Gas Authority (OGA), publié début novembre, a justement étudié l’activité sismique survenue près d’un site où est pratiquée la fracturation hydraulique. En août et octobre 2018, de vives secousses y avaient été ressenties, suspendant indéfiniment le forage. Dans ses conclusions, l’autorité britannique souligne les risques de séismes en lien avec la pratique controversée de la fracturation. C’est ce qui a fait basculé le gouvernement.
Des conséquences inacceptables pour les populations
"Après avoir examiné le rapport de l’OGA (…), il est clair que nous ne pouvons pas exclure de nouvelles conséquences inacceptables pour la population locale", a déclaré dans un communiqué la ministre chargée des Entreprises et de l’Energie, Andrea Leadsom. "Pour cette raison, j’ai conclu que nous devrions instaurer un moratoire sur la fracturation hydraulique en Angleterre avec effet immédiat", a-t-elle annoncé.
Le gouvernement assure qu’il ne donnera pas son consentement à de nouveaux projets de fracturation hydraulique "à moins que de nouvelles preuves convaincantes que le gaz de schiste peut être acheminé en sécurité ici ne soient apportées". La fracturation hydraulique – interdite en France depuis plusieurs années et en Allemagne – consiste à injecter des quantités massives d’eau afin de fracturer la roche mère dans laquelle est emprisonné le gaz ou le pétrole.
D’après un autre rapport du National Audit Office (NAO), l’organe chargé de contrôler les dépenses publiques, la fracturation hydraulique se révèle en outre coûteuse pour les autorités locales et les forces de l’ordre, en raison des nombreuses manifestations qu’elles suscitent, des perturbations du trafic routier et de la nécessité d’assurer la sécurité sur les sites.
Un pari qui s’est révélé être un fiasco
Pour Les Amis de la Terre UK, le moratoire constitue une "victoire immense pour les populations et pour l’environnement". "Pendant près d’une décennie, les populations locales partout dans le pays ont mené un combat de David contre Goliath contre cette industrie puissante", a souligné le directeur exécutif de l’ONG, espérant maintenant qu’une loi rendra l’interdiction de la fracturation hydraulique permanente.
"Le grand pari du gouvernement sur la fracturation hydraulique est un fiasco" a également réagi Rebecca Newsom, cheffe de programme au sein de Greenpeace. La décision du gouvernement britannique intervient à la veille des élections générales de décembre, faisant dire aux travaillistes qu’il s’agit surtout d’une mesure électoraliste. Ils réclament eux aussi une véritable interdiction plutôt qu’un moratoire.  
Concepcion Alvarez @conce1 

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