Dans les principales régions de culture légale d’opium, des hordes de perroquets mènent des razzias sur les champs de pavot pour se délecter des gousses. Résultat : des oiseaux drogués, impossibles à contrôler et d’énormes pertes pour les agriculteurs.


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    L'Inde est le premier producteur mondial d'opium légal, utilisé principalement dans l'industrie pharmaceutique pour la production de codéine et de morphine. Dans le centre du pays, la province du Madhya Pradesh concentre à elle seule 75 % de ce juteux commerce : 38.000 hectares de pavot y sont cultivés avec 30.000 agriculteurs disposant d’une licence spéciale. Mais voilà que ces derniers sont confrontés à un ennemi inattendu : les perroquets.

    Ces derniers temps, la vie des agriculteurs indiens s'est transformée en film à la Hitchcock, avec des raids d'oiseaux fondant en piqué sur les champs. « Une fleur de pavot donne entre 20 à 25 grammes d'opium. Mais un large groupe de perroquets se nourrit entre 30 à 40 fois quotidiennement, certains emportant même les gousses. Tout cela affecte la production », se lamente ainsi un cultivateur local auprès de NDTV, une chaîne d'information indienne. Les volatiles pullulent sur les arbres et les toitstoits des fermes et attaquent les champs à l'aubeaube, grignotant les gousses pour siroter le liquideliquide banc et laiteux riche en opium.
     

    Des oiseaux « groggis » complètement accros

    Si les oiseaux sont tellement déterminés, c'est que l'opium leur fait le même effet que le café chez l'être humain. « Il leur procure instantanément un boost d'énergieénergie, explique au Daily Mail le Dr Chundawat, spécialiste de l'opium au Collège d'horticulture de Mandsaur. Une fois qu'ils ont expérimenté cette sensation, ils tombent rapidement dans une addictionaddiction. » « Les vols bancals et désorientés des perroquets rendent leur état d'intoxication évident », rapporte le journal local DNA India, qui s'inquiétait déjà du phénomène en 2018. Ils finissent souvent par s'écraser sur les arbres et les branches ou sont retrouvés groggis dans les champs après un étourdissement, s'envolant une fois l'effet estompé avant de revenir à nouveau. »

    Haut-parleurs et feux d’artifice : rien n’y fait

    Tout cela inquiète énormément les agriculteurs, déjà menacés par une sécheresse persistante. « Nous perdons jusqu'à 10 à 15 % de notre récolte à cause de ces perroquets. Il n'y a aucun moyen de se protéger contre eux », s'alarme ainsi Narendra Singh, un cultivateur d'opium de Pratapgarh, une ville de l'Uttar Pradesh juste au nord du Madhya Pradesh. Mégaphones, feux d'artifice... les tentatives pour faire fuir les oiseaux n'ont pour l'instant donné aucun résultat.

    Certains pains au pavot contiendraient d’importantes quantités d’alcaloïdes. © mehmet, Fotolia
    Certains pains au pavot contiendraient d’importantes quantités d’alcaloïdes. © mehmet, Fotolia

    En France, on peut aussi se shooter avec du pain au pavot

    Pas besoin toutefois d'être un perroquet et d'habiter en Inde pour se shooter au pavot : le 1er mars dernier, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) a lancé une alerte sur la consommation de pain au pavot, après des tests montrant des quantités anormalement élevés d'alcaloïdesalcaloïdes chez des personnes ayant récemment consommé ce type de pain. « La consommation d'un seul des sandwichs analysés équivaut à 4 mg de morphine, l'équivalent d'un demi-comprimé de Skenan, le médicament que l'on donne aux malades qui souffrent d'un cancercancer ! », s'étonne ainsi Jean-Claude Alvarez, chef du service de pharmacologie-toxicologietoxicologie du centre hospitalier universitaire Raymond-Poincaré (AP-HPHP), à Garches (Hauts-de-Seine), à l'origine de l'alerte, dans Le Parisien. Les graines de pavot ne contiennent pas elles-mêmes d'alcaloïdes, mais peuvent être contaminées par le latexlatex de la plante.