The He Lab / Creative Commons

Le 30 décembre dernier, le chercheur chinois He Jiankui a été condamné à trois ans de prison par un tribunal de la ville de Shenzhen, dans le sud du pays. L’homme avait défrayé la chronique un an plus tôt en annonçant avoir créé les premiers bébés génétiquement modifiés.

Enlever et remplacer les parties indésirables du génome

Dans un procès s’étant tenu à huis clos, le tribunal a estimé que He Jiankui, âgé de 35 ans, et deux de ses associés avaient « illégalement procédé à la manipulation génétique d’embryons à des fins de reproduction ». En novembre 2018, le chercheur avait déclaré avoir réussi à mettre au monde deux jumelles à l’ADN modifié, surnommées Lulu et Nana, afin de les rendre résistantes au virus du sida, dont leur père était porteur. Outre une peine de prison de trois ans, Jiankui a également écopé d’une amende de trois millions de yuans, soit environ 384 000 euros.

Formé à l’université de Stanford, aux États-Unis, He Jiankui avait eu recours à la méthode révolutionnaire Crispr-Cas9, des « ciseaux génétiques » permettant d’enlever et de remplacer des parties indésirables du génome. Comme le précise l’agence de presse Chine nouvelle, qui a suivi le procès, « la cour a considéré que les trois accusés n’avaient pas obtenu de qualifications médicales et recherchaient la célébrité et le profit », et estimé qu’ils avaient « délibérément violé la réglementation sur la recherche scientifique et la gestion de la médecine ».

Une méthodologie douteuse

Controversée, la méthode d’édition de gène Crispr-Cas9 est susceptible d’engendrer des mutations connexes involontaires potentiellement néfastes pour le sujet traité, qu’il est généralement impossible de détecter avant la naissance. Courant décembre, le MIT Technology Review avait publié des extraits du manuscrit original de l’expérience menée par Jiankui et ses collègues, révélant d’importantes failles, tant sur le plan scientifique qu’éthique : jamais révisée par des pairs, celle-ci avait été modifiée à plusieurs reprises et la méthodologie employée ne s’appuyait sur aucune donnée vérifiée.

Les déclarations faites par He Jiankui fin 2018 avaient déclenché un véritable tollé à l’échelle internationale, qui avait poussé la Chine à suspendre ses recherches et à le placer sous enquête policière. Avant cette affaire, le pays ne disposait en effet d’aucune loi réglementant ce type de manipulations génétiques.

Si une brève réglementation du ministère de la Santé, remontant à 2003, interdisait bien ces expériences sur les embryons, elle ne prévoyait aucune sanction pour les contrevenants. Depuis février 2019, toute personne se livrant à de telles expériences est passible d’une amende de 100 000 yuans, soit environ 13 000 euros.

Selon l’agence Xinhua Chine nouvelle, un troisième bébé génétiquement modifié serait également né à la suite de ces recherches courant 2019.

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