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Esther Duflo : « Plus on aide les gens, plus ils sont aptes à sortir de la trappe à pauvreté »

La lauréate du prix Nobel d’économie 2019 explique, dans un entretien au « Monde », comment la méthode expérimentale qu’elle et ses colauréats pratiquent depuis quinze ans a révolutionné la façon de faire de l’économie.

Propos recueillis par  et

Publié le 03 janvier 2020 à 14h32, modifié le 04 janvier 2020 à 13h04

Temps de Lecture 12 min.

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La lauréate du prix Nobel d'économie 2019, Esther Duflo, à Paris, le 16 décembre 2019.

Esther Duflo, chercheuse au Massachusets Institute of Technology (MIT), a reçu le 14 octobre 2019 le prix de la Banque de Suède en sciences économiques en l’honneur d’Alfred Nobel. Elle est ainsi la plus jeune (46 ans), l’une des deux seules femmes (après Elinor Ostrom en 2009) et le quatrième lauréat français (contre 62 Américains) de ce prix. C’est l’originalité de ses travaux sur la pauvreté dans les pays en développement que le jury du prix Nobel d’économie a voulu récompenser.

De quelle façon votre travail renouvelle-t-il la façon de faire de l’économie du développement ?

Je travaille sur la vie économique des plus pauvres dans le monde. Notre démarche au sein du Laboratoire d’action contre la pauvreté (Abdul Latif Jameel Poverty Action Lab, J-PAL) a consisté à cesser de se poser de grandes questions pas très définies, comme « quel type de croissance faut-il promouvoir dans les pays en développement ? » ou « quelles sont les “bonnes” politiques de développement ? » ou « quelles sont les causes de la pauvreté ? », pour aller vers des questions beaucoup plus précises avec, du coup, la possibilité d’y apporter des réponses plus précises et donc plus utiles. Il s’agit d’une rupture méthodologique par rapport à ce qui se pratique communément dans ce domaine.

Par exemple, l’un des premiers sujets sur lesquels nous avons travaillé est l’éducation, car nous savons que les pays où le capital humain est important croissent plus vite. Mais l’économiste ne peut pas se contenter de dire à un gouvernement qu’il doit éduquer sa population. Il doit répondre à des questions plus précises : comment faire pour que les enfants aillent à l’école ? Mais cela ne suffit pas non plus : comment faire pour qu’ils y apprennent quelque chose ? Quelle organisation, quels moyens permettent d’y parvenir ? Et, plus précisément encore, faut-il diminuer le nombre d’élèves par classe ? Faut-il plus de livres, de tables, de cahiers ? Il se trouve que sur ces deux sujets les expériences que nous avons menées ont contredit les croyances.

Nous avons pris des échantillons significatifs d’écoles, que nous avons réparties en deux groupes. Dans les unes, on a fortement réduit la taille des classes, mais pas dans les autres. C’est comme pour les essais cliniques de médicaments, où le groupe test bénéficie d’un traitement, mais pas le groupe témoin. On peut ainsi comparer les résultats, au bout d’une certaine période. Ces groupes sont composés de manière aléatoire sur des échantillons suffisamment grands pour qu’il soit possible d’en tirer des conclusions. Certes, on laisse au passage beaucoup d’autres questions qui ne sont pas traitées, mais on récolte au moins deux informations utiles : 1) est-ce que réduire la taille des classes améliore ou pas les résultats scolaires ? 2) est-ce que les difficultés scolaires viennent d’autres difficultés que la taille des classes ?

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