Exclu : Notre-Dame, Avignon à Paris, ateliers d’artistes… Le programme culturel de Cédric Villani

Jusqu’alors obnubilé par la question écologique, le candidat dissident aux municipales parisiennes veut désormais mettre la culture au cœur de son programme. Pour « Vanity Fair », il dévoile ses premières mesures en matière d’arts, d’éducation et de patrimoine.
Cdric Villani cover VF
Baratoux Loic/ABACA

Grande absente de cette campagne pour les municipales, la culture n’intéresse-t-elle plus personne ? Elle est pourtant le cœur vivant de Paris. Ce pour quoi les gens y viennent, et parfois y restent. Les touristes sont attirés par ses musées, ses ponts, ses monuments. Les étudiants de nos régions « montent à la capitale » – comme disent les jeunes Rastignac – pour ses cinémas, ses théâtres, ses librairies ouvertes jusqu’à tard dans la nuit. Pourtant, les programmes (qui sont encore en train de s’écrire) des postulants à l’Hôtel de Ville laissent sur le côté cette culture avec un grand « C »… « Elle est loin d’être la priorité des Parisiens, si vous les interrogez », nous explique d’emblée Cédric Villani. « Ils s’inquiètent d’abord des questions de propreté, de sécurité et d’espace public. Je ne peux pas vous donner un chiffre exact, mais la culture arriverait, disons, à la vingt-cinquième place. Tout comme l’éducation qui est plutôt absente des discussions. » Ajoutant également : « Une ville où on s’inquiète plus de la propreté des trottoirs que de l’éducation des enfants, c’est une ville qui ne tourne pas rond. » Le candidat dissident, élu député LRM en 2017, propose donc de mettre « la culture au cœur de son programme ».

Notre-Dame, symbole de notre patrimoine en danger

« On est en train de réparer l’église la plus emblématique de l’Occident et on ne met pas ce chantier en valeur », s’exclame Villani. Le candidat veut ainsi créer un musée sur l’Île de la Cité, autour de la rénovation de la cathédrale, afin « de mettre en lumière et de valoriser les savoir-faire exceptionnels des artisans, ingénieurs, historiens et archéologues. »

Selon lui, l’incendie de Notre-Dame a prouvé que les monuments parisiens étaient mal protégés. « Si les théâtres et musées ont été restaurés, le patrimoine cultuel n’a pas été rénové comme il aurait dû l’être. Des travaux ont été réalisés durant la mandature qui se termine. Ils étaient souvent devenus indispensables, tant le retard pris était grand. » Cédric Villani veut donc entreprendre un plan de sauvetage des églises de la capitale avec une programmation financière réévaluée : « Il est très significatif que l’incendie de Notre-Dame, qui a montré le délabrement du patrimoine cultuel parisien, ait amené la Mairie à voter un plan d’urgence supplémentaire de 42 millions d’euros. »

Après la tragédie du 15 avril 2019, Cédric Villani compte également améliorer la protection incendie de l’ensemble des bâtiments classés à Paris, pour protéger la vieille pierre mais également les visiteurs.

Son programme patrimonial s’appuie donc sur un financement plus important et une protection plus large. Dans ce but, il veut accentuer le mécénat et remanier le « Fonds pour Paris » pour en faire « un Fonds pour le patrimoine parisien. » Il réformera également la Commission du Vieux Paris – un comité consultatif qui conseille la Maire en matière de patrimoine – pour affirmer son indépendance.

Afin de faire connaître les richesses de la capitale, le candidat imaginera une application mobile « Paris et son Histoire », qui, grâce à la réalité augmentée, permettra d’illustrer le destin des grands et petits monuments. « Cette église en face de vous, par exemple, vous pourriez voir quelle forme elle avait il y a 100 ans, 200 ans… », explique-t-il. Une technologie qui n’a rien de surprenant puisque Cédric Villani aborde l’ensemble de sa politique – de l’écologie à la sécurité – par le prisme du numérique et des sciences.

Une capitale de festivals

L’ancien mathématicien, médaille Fields, insiste sur un point : il n’augmentera pas l’offre culturelle dans la capitale, qui est, selon lui, déjà très importante, mais il la renforcera en faisant des liens entre les arts, les techniques, les évènements… Malgré tout, son programme comporte plusieurs créations de manifestations en tous genres. Le projet le plus alléchant est, sans nul doute, le festival baptisé « De retour d’Avignon », qui proposera, à Paris, le meilleur des pièces de théâtre présentées dans la ville du Vaucluse durant l’été. Un autre festival sera consacré au cinéma, et plus particulièrement aux longs et court-métrages évoquant la Ville Lumière. « ll y a à Paris un public pour un grand festival populaire de séries, et il existe les salles, partout dans la ville, pour les faire voir dans un cadre nouveau », annonce également Villani, qui compte soutenir la création télévisuelle. Au rayon des nouveautés, on note également un « Grand Prix du Roman de la Ville de Paris » et un nouveau Carnaval de Paris, à la manière de « celui de Notting Hill en Grande-Bretagne », précise-t-il, qui se clôturera par un feu d’artifice.

La ville des artistes

Si les artistes ont tendance à fuir un Paris certainement devenu trop cher, Cédric Villani ambitionne de les faire revenir. La ville doit, selon lui, « redevenir un creuset, comme le sont Berlin ou Los Angeles. » Il souhaite ainsi aménager 500 ateliers-logements supplémentaires, dont une partie sera dédiée à la résidence d’artistes internationaux. Il soutiendra également la création de cités d’artistes dans tous les arrondissements et proposera un concours international d’idées pour ces nouvelles « Villas des Arts ».

Deux lieux sont mis en évidence dans ce programme. Le premier, la Gaîté Lyrique, existe déjà, mais deviendra un laboratoire où se croiseront les approches les plus innovantes. Le second reste à fonder : une Cité de l’Europe, où seraient regroupés des centres culturels, des salles de spectacle, des galeries d’art, des restaurants et des logements étudiants.

La culture pour tous

« Démocratiser l’accès à la culture, c’est mon premier objectif », assure le candidat. Dans une logique de décloisonnement, il veut favoriser les liens entre les grandes institutions culturelles et les lieux plus modestes dédiés aux pratiques amateurs, mais également entre les écoles et les établissements culturels. Parmi ses mesures phares, on note un « Passeport pour la culture et pour les arts dédiés à tous les élèves des écoles primaires et des collèges parisiens. »

Lui-même pianiste durant sa jeunesse, Cédric Villani met l’accent sur l’apprentissage de la musique. Pour désengorger les conservatoires actuels qui manquent de places, il veut en créer de nouveaux, à rayonnement municipal, afin que chaque enfant puisse apprendre l’instrument de son choix. Le budget dédié à la pratique de la musique pour tous les Parisiens sera d’ailleurs augmenté.

Toujours dans cet esprit d’accessibilité, il veut élargir les horaires des bibliothèques et des musées, pour les adapter aux modes de vie des Parisiens.

Il envisage également un espace d’exposition itinérant, afin de présenter les trésors des musées, des archives et de la bibliothèque historique de la ville, dans les arrondissements périphériques et les communes du Nouveau Paris. « Le Grand Paris, c’est mon obsession sur tous les sujets », assure-t-il.