Quand Franck Riester propose de créer une Maison du dessin de presse… qui existe déjà

    Le ministre de la Culture a proposé à l’occasion du cinquième anniversaire des attentats de Charlie Hebdo, de créer une maison du dessin de presse et du dessin satirique. Sauf qu’elle existe déjà en Haute-Vienne.

     Franck Riester, a été fustigé sur les réseaux sociaux après sa proposition de création d’une maison du dessin de presse et du dessin satirique.
    Franck Riester, a été fustigé sur les réseaux sociaux après sa proposition de création d’une maison du dessin de presse et du dessin satirique. AFP/Stéphane de Sakutin

      En Haute-Vienne, élus locaux et internautes attachés à leur territoire en sont tombés de leur chaise… À l'occasion du cinquième anniversaire des attentats de « Charlie Hebdo », le ministre de la Culture, Franck Riester, a annoncé vouloir la création d'une « maison du dessin de presse et du dessin satirique », un « lieu de rencontre, de formation, d'exposition » destiné à les valoriser « alors que des menaces pèsent sur eux dans le monde ».

      Un beau projet, ô combien louable… mais qui existe déjà depuis de nombreuses années à une vingtaine de kilomètres de Limoges, en Haute-Vienne. « Pouvez-vous informer Franck Riester de l'existence de Saint-Just-le-Martel ? » a lancé la twitto Myrtille, à destination de son collègue du gouvernement Jean-Baptiste Djebbari, actuel secrétaire d'Etat aux Transports mais ancien député de la Haute-Vienne.

      C'est dans cette commune de 2600 habitants, qu'il y a 38 ans, une bande de copains a décidé de créer un salon du dessin de presse annuel qui a pris la forme en 2011, d'un centre permanent, baptisé Espace Loup, du nom du dessinateur Jean-Jacques Loup.

      Au fil des années, Saint-Just est devenu le centre du monde de tous les amateurs de dessin satiriques. Cabu, Wolinski, Tignous…, les anciens de Charlie Hebdo étaient eux-mêmes des habitués du salon qui se tient chaque année, fin septembre. Coco, dessinatrice à Charlie, y est, elle, revenue après les attentats, en 2015, pour y recevoir le traditionnel « Prix de l'humour vache ».

      Le bureau de Wolinski exposé

      Dans un bâtiment de 2000 mètres carré, 10 000 pièces, dont 5000 dessins originaux, sont conservées. L'emblématique bureau de Wolinski, offert par sa veuve Maryse en avril 2015, y est exposé, preuve de l'attachement des dessinateurs à Saint-Just-le-Martel.

      Mais il a beau s'affubler du titre « international », ce « Salon de la caricature, du dessin de presse et de l'humour », unique en France voire en Europe n'est, semble-t-il, pas connu rue de Valois, le siège du ministère de la Culture. Pire, Bordeaux la voisine, nouvelle capitale régionale, a fait mine d'ignorer son existence en se portant candidate, par l'intermédiaire de son maire, Nicolas Florian, pour accueillir la nouvelle structure voulue par le ministre. Les réactions, depuis, pleuvent sur les réseaux. Et les politiques, comme la presse locale s'engagent pour défendre leur salon.

      Philippe Henry (à g.) et Guy Hennequin, coprésidents du salon du dessin de presse, invitent le ministre à leur rendre visite./LP/Franck Lagier
      Philippe Henry (à g.) et Guy Hennequin, coprésidents du salon du dessin de presse, invitent le ministre à leur rendre visite./LP/Franck Lagier AFP/Stéphane de Sakutin

      « Pas la peine de parler des territoires pour les méconnaître à ce point », « Une fois de plus, le Limousin s'étonne et se plaint : à Paris le Prince ne le voit pas »… Les internautes y vont à cœur joie, certains s'étonnant de « l'ignorance » du ministre de la Culture. « On a évidemment très mal pris cette annonce », avouent les coprésidents du salon, Philippe Henry et Guy Hennequin. « Cela fait 38 ans qu'il existe, 200 dessinateurs internationaux sont reçus chaque année sur 10 jours, fin septembre. Saint-Just-le-Martel est un événement qui n'existe nulle part ailleurs. »

      L'annonce du ministre ne les a pas fait rire… si ce n'est jaune. « Mais à Saint-Just, l'humour primera toujours », nuancent-ils. « Que le ministre vienne nous voir, on l'accueillera avec plaisir pour lui faire visiter les lieux. »