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René Magritte en 2 minutes

En bref

Peintre d’origine belge, associé au surréalisme, René Magritte (1898–1967) est le maître des énigmes. Connu pour ses toiles qui fonctionnent comme des rébus ou des métaphores, il met en évidence, avec humour et poésie, notre difficulté à faire coïncider la réalité du monde avec nos images mentales, en somme ce qui compose l’esprit humain. Magritte a développé un véritable alphabet pictural en usant de motifs récurrents : la pomme, l’oiseau, l’homme au chapeau melon, les corps morcelés… Ses images sont souvent cachées derrière ou dans d’autres images, alliant deux niveaux de lecture possibles, le visible et l’invisible.

Duane Michals, René Magritte
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Duane Michals, René Magritte, 1965

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© Duane Michals / Courtesy Pace/McGill gallery

Il a dit

« Tout dans mes œuvres est issu du sentiment de certitude que nous appartenons, en fait, à un univers énigmatique. »

Sa vie

Fils d’un tailleur et d’une modiste, René Magritte fréquente à l’âge de 12 ans un cours de dessin. Grand lecteur de bandes dessinées, amateur de cinéma et de photographie, le jeune garçon est incontestablement un amoureux des images.

Orphelin de mère (elle se suicide alors qu’il n’a que 14 ans), Magritte réalise ses premières toiles pendant la Grande Guerre. La région belge de Charleroi, où il habite, est occupée par l’armée allemande. Il s’installe dès lors à Bruxelles et entre à l’Académie royale des Beaux-arts. Peignant dans une veine impressionniste, il reçoit des cours dispensés par les artistes attachés à l’Art nouveau.

Magritte vit de rentes paternelles, mais aussi de ses travaux en tant que décorateur et affichiste. Déjà, l’artiste montre un tempérament farceur, volontiers moqueur et proche des idées anarchistes, dans la veine du mouvement Dada. Inspiré par les avant-gardes, en particulier le cubisme et le futurisme, il peint des compositions abstraites.

Le dadaïsme, et la peinture métaphysique de Giorgio de Chirico, produisent sur Magritte un bouleversement. Travaillant pour la publicité, il se lie parallèlement avec Francis Picabia, directeur de la revue 391. En 1926, Magritte débute son parcours dans l’orbite du surréalisme, rencontre André Breton, Paul Éluard, Max Ernst et Salvador Dalí. Les rapports avec Breton sont houleux, bien que l’artiste illustre un de ses ouvrages dans les années 1930 avec son dessin Le Viol (1934).

L’artiste belge joue sur les mots comme sur les images, interrogeant notre compréhension de la réalité et de ses représentations. L’une de ses œuvres les plus célèbres, La Trahison des images (1929), représente une pipe associée à l’injonction contradictoire « Ceci n’est pas une pipe ». Ce que nous désignons comme réel, est-ce bien ce que nous percevons ?

Magritte, à la différence de Dalí, n’a jamais été un amateur des théories psychanalytiques et s’intéresse davantage aux symboles, mythes et croyances, qu’il décortique ou parodie avec humour. Son style est volontairement neutre et d’une grande précision, un héritage peut-être de son travail dans le monde publicitaire.

Dans les années 1940, Magritte renoue avec la technique impressionniste et n’hésite pas à verser dans un certain kitsch : c’est « la période vache ». Peintre très apprécié, bien que déroutant, il expose à travers le monde et bénéficie d’une rétrospective au MoMA de New York en 1965. Deux ans plus tard, malade d’un cancer, il s’éteint en Belgique. Un musée dédié à son œuvre est ouvert à Bruxelles en 2009, la plupart des œuvres exposées appartenant aux musées royaux des Beaux-Arts de Belgique. Sa maison bruxelloise se visite également.

Ses œuvres clés

René Magritte, La Trahison des images
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René Magritte, La Trahison des images, 1929

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Huile sur toile • 59 × 65 cm • Los Angeles County Museum of art, Los Angeles • © Bridgeman Images

La Trahison des images, 1929

Le texte contredit notre impression première en affirmant que ce que nous voyons n’est pas une pipe. Comme l’a expliqué Magritte, la représentation d’un objet n’est pas l’objet en lui-même, et la pipe peinte ne pourra jamais être bourrée ni fumée… Magritte se montre sémioticien (spécialiste des signes) et philosophe. Existe-il une hiérarchie entre les mots et les images, comme le pensait le philosophe Maurice Merleau-Ponty ? Magritte récusait ce point de vue. En travaillant sur la notion de vocabulaire, le peintre se différencie des autres surréalistes, qui préconisent l’exploration de l’inconscient. Pour Magritte, c’est le langage et notre rapport au réel qui méritent d’être questionnés.

René Magritte, Le Modèle en rouge
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René Magritte, Le Modèle en rouge, 1935

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Huile sur toile • 56 × 46 cm • Paris, Musée national d’art moderne • © Bridgeman Images

Le Modèle en rouge, 1935

Cet autre toile archi-célèbre de Magritte témoigne de l’attirance du peintre pour le thème du trompe-l’œil, donc de l’illusionnisme. Cette curieuse paire de souliers est aussi une paire de pieds, mêlant l’inanimé et le vivant, à l’exemple des métamorphoses si fréquentes dans les mythes antiques. Le rouge évoqué dans le titre prolonge le mystère car cette couleur n’apparaît pas dans l’œuvre. Magritte, qui nous confronte à nos questions, livre aussi un clin d’œil à l’une des toiles fameuses de Vincent Van Gogh représentant des souliers, forme d’autoportrait de l’artiste bohème.

René Magritte, Le Fils de l’homme
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René Magritte, Le Fils de l’homme, 1964

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Huile sur toile • 116 × 89 cm • Coll. Part. • © Christie’s Images / Bridgeman Images

Le Fils de l’homme, 1964

Personnage emblématique de l’univers magritien, l’homme au chapeau melon présente un visage en grande partie caché par un fruit (à l’exception de l’œil gauche). Derrière lui, un muret, puis la mer sous un ciel brumeux. S’agit-il ici d’un autoportrait ? Magritte ne donne pas totalement la clé puisqu’il dissimule son visage (sa « poire » en argot) derrière une pomme. On reconnaît là le sens du calembour cher au peintre. C’est aussi une image relativement angoissante : l’identité de l’homme, qui  se tient de manière statique devant un paysage potentiellement mortifère, demeure inconnue.

Par • le 27 janvier 2020
Retrouvez dans l’Encyclo : Surréalisme René Magritte

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