Fondation Beyeler

Travelling sur les paysages mythiques d’Edward Hopper

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Publié le , mis à jour le
Avec ses personnages solitaires piégés dans des décors vides et immobiles, ses scènes d’une netteté inquiétante et ses contrastes dramatiques d’ombre et de lumière, le peintre réaliste américain Edward Hopper (1882 – 1967) a inspiré les plus grands cinéastes. À la Fondation Beyeler, en Suisse, une exposition rassemble soixante-cinq de ses tableaux, aquarelles et dessins de paysages. Aperçu en sept chefs-d’œuvre… et un film !
Edward Hopper, Gas
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Edward Hopper, Gas, 1940

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Entre chien et loup

Ce tableau à l’ambiance mystérieuse figure parmi les plus célèbres du peintre. Perdue au milieu d’une route déserte, une station-service diffuse sa lueur blafarde à la tombée du jour. Dressées au centre de l’image, trois pompes à essence rouge vif dominent la scène de leur présence inquiétante. Que fait exactement ce pompiste à l’air las ? Seul face aux machines et au vide de la route avalée par une forêt sombre, l’homme apparaît bien vulnérable et solitaire. Magistrale, la toile fait surgir l’étrange d’une situation banale, tout en posant un regard mélancolique sur la face sombre de la modernité américaine…

19,5 x 30 cm • Museum of Modern Art, New York

Edward Hopper, Lee Shore
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Edward Hopper, Lee Shore, 1941

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Toutes voiles dehors

Fasciné par les bateaux – l’artiste a grandi à Nyack, une petite ville sur l’Hudson spécialisée dans la construction navale –, Hopper se plaît ici à détailler des voiliers dont les contours nets contrastent avec la douceur mouvante de l’eau et de l’herbe ondulante. Gonflées par le vent, leurs voiles d’un blanc lisse et lumineux évoquent l’atmosphère paisible d’une régate ou d’une balade en mer. Mais leurs coques, poussées vers la côte, penchent dangereusement sous l’effet de la houle. Dans le ciel, un nuage tourbillonnant, léger comme un souffle, fait écho aux voiles blanches, comme un rappel de leur fragilité…

19,7 x 30 cm • Collection privée

Edward Hopper, Portrait of Orleans
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Edward Hopper, Portrait of Orleans, 1950

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Suspense au carrefour

Pour ce tableau, l’artiste s’est inspiré d’un croquis réalisé depuis la fenêtre de sa voiture à une intersection située à Orleans, dans le Massachusetts. De la route immaculée aux façades des maisons, tout est si dépouillé qu’on se croirait dans un décor de cinéma. Le feu est vert : quelle route allons-nous prendre ? Que va-t-il se produire ? Trop calme pour ne pas cacher un danger imminent, la scène semble sortie d’un film noir. On songe aux décors vides prisés par le cinéaste Alfred Hitchcock (très inspiré par Hopper) pour ses scènes de filature, de Vertigo (1958) à L’Homme qui en savait trop (1956) en passant par la route déserte de La Mort aux Trousses (1959), où Cary Grant finit par se faire attaquer par un avion tueur…

19,5 x 30 cm • Fine Art Museums of San Francisco

Edward Hopper, Cape Ann Granite
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Edward Hopper, Cape Ann Granite, 1928

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Rochers dramatiques

Ce tableau fait partie des rares œuvres de Hopper vides de toute construction humaine. Tel un projecteur de théâtre, l’éblouissant soleil estival transforme ce paysage côtier de Cape Ann (péninsule du Massachusetts) en un décor dramatique aux contrastes saisissants. D’impressionnantes formations de granite, dont le peintre souligne avec gourmandise les formes rondes et les volumes accidentés, projettent leurs ombres obliques sur l’herbe verte qui, figurée par des aplats lisses, évoque un tapis feutré s’étirant doucement vers la mer.

20,5 x 30 cm • collection privée

Edward Hopper, Second Story Sunlight
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Edward Hopper, Second Story Sunlight, 19160

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Maisons de poupée

Durant ses dernières années, Hopper se concentre sur ce qu’il préfère par-dessus tout : peindre l’effet de la lumière du soleil sur les maisons, dont les arêtes et les contours nets sont ici soulignés par des contrastes tranchants entre la blancheur éclatante des façades, les ombres bleutées, le toit sombre et les persiennes vert acide. Sur le balcon de l’un des pavillons, une femme aux cheveux blancs lit un livre, tandis qu’une jeune blonde en maillot de bain, assise en amazone sur la balustrade, regarde au loin. Rêvant, peut-être, de s’échapper de cet ordre impeccable…

24 x 30 cm • Whitney Museum of American Art, New York

Edward Hopper, Cape Cod Morning
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Edward Hopper, Cape Cod Morning, 1950

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Hors-champ

Penchée en avant, les mains en appui sur une table, une femme au visage mélancolique regarde par la fenêtre de sa maison, absorbée par l’extérieur. Mais que voit-elle ? Hopper a bien pris soin de ne pas nous le révéler grâce à un cadrage bien choisi ! Encadrée par les lignes de la fenêtre en saillie, l’inconnue semble piégée dans une boîte dont elle aimerait sortir. La division du tableau en deux parties opposées (intérieur et extérieur) ajoute à la tension de la scène que construisent de forts contrastes de couleurs, de lumière et d’ombre. À droite, une forêt impénétrable accentue le mystère…

25,4 x 30 cm • Smithsonian American Art Museum, Washington

Edward Hopper, Lighthouse Hill
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Edward Hopper, Lighthouse Hill, 1927

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Phare solitaire

Hopper avait une prédilection pour les phares qui, par leur immobilité verticale, fonctionnent comme des repères salvateurs dans l’immensité d’un paysage mouvant, tout en étant liés à la notion de danger et de solitude. La primauté de la terre sur le ciel et l’absence de la mer contribuent à l’impression d’enfermement véhiculée par le tableau. Dressées sur une colline du Maine, la tour et la maison attenante – aussi isolées que le motel de Psychose (Hitchcock, 1960) – évoquent deux personnages solitaires qui ne parviennent pas à communiquer – un motif récurrent dans l’œuvre de l’artiste.

21,6 x 30 cm • Dallas Museum of Art

Wim Wenders, Plan du film “Two or three things I know about Hopper”
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Wim Wenders, Plan du film “Two or three things I know about Hopper”, 2020

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Hommage en 3D

Grand amateur des salles obscures, Hopper a lui-même inspiré de nombreux cinéastes. « Son affinité avec le cinéma est sans pareille, tant dans ses thèmes – le paysage américain ou la vulnérabilité existentielle de l’homme du XXe siècle – que dans sa lumière et ses cadrages », rappelle le réalisateur allemand Wim Wenders, qui signe le clou de l’exposition : un court métrage en 3D, hommage planant et jazzy à l’univers du peintre, dont les tableaux prennent vie le temps d’une promenade douce-amère…

14 minutes • © Road Movies

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Edward Hopper

Du 26 janvier 2020 au 20 septembre 2020

www.fondationbeyeler.ch

Retrouvez dans l’Encyclo : Edward Hopper Hyperréalisme

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