Tous les jours, l'humanité tire la chasse d’eau. Et tous les jours, des matières essentielles se perdent. Et ce gaspillage ne cesse d’augmenter. Aujourd’hui, 380 milliards de m3 d’eaux usées sortent des toilettes, soit l’équivalent du flux du Gange à son embouchure, selon les calculs de l’Université des Nations-Unies. Ce volume devrait augmenter de 24% en 2030, de 51% en 2050 pour culminer à 574 milliards de m3.
Les eaux usées dans le monde © ONU
La production d'eau usée par habitant et par an dans les différentes régions du monde. Du fait de sa démographie, l'Asie représente 42% du volume annuel, mais ce sont les Nord-Américains qui en produisent le plus individuellement. Les 300 millions d'Américains produisent autant d'eaux usées que les 547 millions d'Européens. Aux Etats-Unis, la contenance du réservoir des toilettes est de 12 litres contre 6 litres en Europe. © United Nations University (UNU)
L’explication de cette croissance exponentielle ne tient pas seulement à la démographique. Aujourd’hui, 892 millions de personnes défèquent à l’air libre et 2,4 milliards manquent de toilettes et de latrines, soit un bon tiers de l’humanité. Les Objectifs du développement durable (ODD) adoptés par les 195 Etats membres de l’ONU en 2015 ambitionnent de garantir à chaque homme des services d’alimentation en eau et en assainissement gérés de façon durable. L’accès aux toilettes sera d’autant plus facilité que l’exode rural dans les pays en voie de développement va concentrer les populations dans des villes qu’il faudra bien équiper en égouts. Tous ces phénomènes cumulés vont faire augmenter les débits.
Par traitement chimique et biologique, on détruit des nutriments précieux
Aujourd’hui, la boucle des matières organiques est loin de se refermer. Dans le meilleur des cas, les flux urbains sont traités en station d’épuration où des réactifs font précipiter 80% du phosphore tandis que les procédés de dénitrification abattent la moitié du nitrate.
Tous les jours, l'humanité tire la chasse d’eau. Et tous les jours, des matières essentielles se perdent. Et ce gaspillage ne cesse d’augmenter. Aujourd’hui, 380 milliards de m3 d’eaux usées sortent des toilettes, soit l’équivalent du flux du Gange à son embouchure, selon les calculs de l’Université des Nations-Unies. Ce volume devrait augmenter de 24% en 2030, de 51% en 2050 pour culminer à 574 milliards de m3.
Les eaux usées dans le monde © ONU
La production d'eau usée par habitant et par an dans les différentes régions du monde. Du fait de sa démographie, l'Asie représente 42% du volume annuel, mais ce sont les Nord-Américains qui en produisent le plus individuellement. Les 300 millions d'Américains produisent autant d'eaux usées que les 547 millions d'Européens. Aux Etats-Unis, la contenance du réservoir des toilettes est de 12 litres contre 6 litres en Europe. © United Nations University (UNU)
L’explication de cette croissance exponentielle ne tient pas seulement à la démographique. Aujourd’hui, 892 millions de personnes défèquent à l’air libre et 2,4 milliards manquent de toilettes et de latrines, soit un bon tiers de l’humanité. Les Objectifs du développement durable (ODD) adoptés par les 195 Etats membres de l’ONU en 2015 ambitionnent de garantir à chaque homme des services d’alimentation en eau et en assainissement gérés de façon durable. L’accès aux toilettes sera d’autant plus facilité que l’exode rural dans les pays en voie de développement va concentrer les populations dans des villes qu’il faudra bien équiper en égouts. Tous ces phénomènes cumulés vont faire augmenter les débits.
Par traitement chimique et biologique, on détruit des nutriments précieux
Aujourd’hui, la boucle des matières organiques est loin de se refermer. Dans le meilleur des cas, les flux urbains sont traités en station d’épuration où des réactifs font précipiter 80% du phosphore tandis que les procédés de dénitrification abattent la moitié du nitrate. Les eaux plus ou moins dépolluées repartent à la rivière avec des taux résiduels parfois importants qui polluent le milieu naturel. Les boues sont majoritairement épandues sur les terres agricoles. C’est le cas de 75% du volume en France. La méthanisation se développe principalement sur les grosses unités. Or, note le rapport "un changement de paradigme est nécessaire entre une attitude qui consiste à considérer les eaux usées comme un déchet à épandre et un intérêt proactif de récupération des nutriments, de l’énergie et de l’eau dans l’esprit de l’économie circulaire".
Le potentiel est gigantesque. En se basant sur le consensus de la littérature scientifique, les auteurs estiment que chaque litre d’eau usée contient 43,7 milligrammes (mg) de nitrate, 7,8 mg de phosphore et 16,5 mg de potassium. Rapporté aux 380 milliards de m3 issus des toilettes, on pourrait récupérer tous les ans 16,6 millions de tonnes de nitrate, 3 millions de tonnes de phosphore et 6,3 millions de tonnes de potassium. Cela représente au total 13,4% de la consommation annuelle d’engrais dans le monde. Soit une économie de près de 13 milliards d’euros par an !
Il serait judicieux d'instaurer un tri sélectif des urines dans les toilettes
Même calcul pour l’énergie produite par la méthanisation par anaérobie des effluents. Avec une moyenne de 0,14 m3 de méthane capté pour un m3 d’eaux usées à la température de 20°C, plus de 53 milliards de m3 de gaz qui, brûlés produiraient 530 milliards de kWh pourraient être récupérés. Soit de quoi fournir en électricité 158 millions de ménages ou en moyenne 500 millions d’individus. En 2050, 239 millions de ménages pourraient être éclairés par les méthaniseurs des stations d’épuration.
Les études scientifiques sont arrivées sur le sujet à un consensus : 80% du nitrate et 50% du phosphore qui arrive dans les stations d’épuration provient de l’urine humaine. "Ôter ces nutriments au bon moment ne serait pas seulement bénéfique pour l’environnement, affirme le rapport. Cela réduirait également le coût du traitement des eaux tout en créant un process en circuit fermé". En clair, il serait judicieux de capter l’urine… dans les toilettes pour les acheminer dans un circuit distinct des égouts.
Cette vertueuse idée est très sérieusement étudiée dans le monde entier et des villes africaines possèdent depuis des années des toilettes publiques qui récupèrent les urines. En France, le programme OCAPI mené par le laboratoire eau environnement systèmes urbains (leesu, Ecole nationale des ponts et chaussées, UPEC, AgroParisTech) explore les voies d’une récupération des urines. Chaque Français expulse chaque année 4,5 kilos de nitrate et 500 grammes de phosphore. Les récupérer passe par la conception de nouveaux WC et urinoirs ainsi que par l’extension des toilettes sèches. Des essais d’épandage direct d’urine se sont par ailleurs déroulés sur le plateau de Saclay en banlieue sud de Paris et l’Institut pour l’environnement de Stockholm vient de publier un ouvrage de conseils pratiques pour l’utilisation de l’urine en agriculture. On ne tirera bientôt plus la chasse d’eau.