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Comment Netanyahou a poussé Trump à reconnaître la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental

Selon la chaîne israélienne Channel 13, le Premier ministre israélien aurait tenté plusieurs fois en 2019 de faire avancer un accord tripartite entre Israël, les États-Unis et le Maroc
Le secrétaire d’État Mike Pompeo et le chef de la diplomatie marocaine Nasser Bourita, à Rabat, le 5 décembre 2019 (AFP)
Par MEE

Israël aurait fait pression sur les États-Unis pour qu’ils reconnaissent la souveraineté marocaine, contestée, sur la région du Sahara occidental. En échange, Rabat s’engagerait à normaliser ses relations avec Israël, a rapporté la chaîne israélienne Channel 13.

Le Premier ministre Benyamin Netanyahou aurait donc tenté de faire avancer cet accord tripartite plusieurs fois au cours de l’année écoulée, après avoir entamé des pourparlers avec des responsables marocains et américains, à la suite de son discours lors d’une réunion de l’Assemblée générale des Nations unies, en septembre 2018.

Netanyahou aurait même secrètement rencontré le ministre marocain des Affaires étrangères, Nasser Bourita, pour discuter de cette proposition.

Netanyahou aurait même secrètement rencontré le ministre marocain des Affaires étrangères, Nasser Bourita, pour discuter de cette proposition

Officiellement, le Maroc n’entretient pas de liens diplomatiques avec Israël ; des liens ont été formellement établis en 1993, après la signature de l’accord d’Oslo, puis rompus après la deuxième Intifada en 2000.

En 2017, Mohammed VI avait dénoncé dans une lettre adressée à António Guterres, secrétaire général de l’ONU, la politique « inacceptable » d’Israël à Jérusalem, en « violation flagrante des décisions de la légalité internationale ».

Selon Channel 13, c’est Yariv Elbaz, un homme d’affaires juif marocain, qui aurait été responsable de l’organisation de la réunion. Ce magnat de l’agroalimentaire serait proche du gendre du président américain Donald Trump, Jared Kushner, qu’il a rencontré en mai 2019 lors de sa visite à Casablanca.

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Les responsables israéliens ont déclaré à Channel 13 que la proposition de Netanyahou était avantageuse pour toutes les parties : Israël ajouterait ainsi un autre État à sa liste de pays avec lesquels les relations ont été normalisées. Le roi du Maroc Mohammed VI verrait les États-Unis reconnaître la souveraineté de Rabat sur la région du Sahara occidental et Trump serait considéré comme le champion des relations arabo-israéliennes.

Channel 13 a également rapporté que, alors que l’ancien conseiller à la sécurité nationale de Donald Trump, John Bolton, était fermement opposé à cet accord, après son départ en septembre, Netanyahou aurait à nouveau soulevé la question avec le secrétaire d’État Mike Pompeo. Mais la Maison-Blanche n’avait, à l’époque, pas accepté le compromis.

« Le Sahara reste la première cause du Maroc »

Le gouvernement israélien n’a pas confirmé les informations concernant ce projet d’accord tripartite de Netanyahou. En décembre, le roi Mohammed VI a refusé une visite de Netanyahou à Rabat.

Un responsable israélien a déclaré à Channel 13 que les Marocains n’étaient pas satisfaits de la progression des promesses de Netanyahou et des résultats obtenus jusqu’à présent, ni de ses espoirs de relations clandestines avec Rabat à ses propres fins politiques.

Ce n’est pas la première fois que des sources évoquent un possible rapprochement conditionné par la reconnaissance de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental.

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Mohammed VI « est parfaitement conscient qu’il a besoin d’Israël afin de bénéficier du soutien des États-Unis à la position du Maroc sur la question du Sahara occidental. À maintes reprises, d’ailleurs, le roi n’a pas manqué de souligner l’importance de l’héritage judaïque dans la formation de la culture marocaine dans le cadre des relations historiques privilégiées qui lient le royaume et Israël », écrivait Aziz Chahir, docteur en sciences politiques et enseignant-chercheur, sur Middle East Eye en décembre 2019 à la veille de la visite de Mike Pompeo au Maroc.

Le site Yabiladi rapporte que mardi, Nasser Bourita, interrogé par des élus du Parti de la justice et du développement (PJD) au sujet du plan de Donald Trump pour le Moyen-Orient, a répondu : « Le Sahara reste la première cause du Maroc et non la Palestine ».

Dans un entretien accordé au quotidien italien Il Manifesto, Brahim Ghali, secrétaire général du Front Polisario, a rappelé que le peuple sahraoui « utilisera tous les moyens légitimes pour atteindre ses objectifs. Sans exclure la lutte armée, comme un droit universellement reconnu pour les peuples qui se défendent d’une force coloniale d’occupation ».

MEE a contacté le Front Polisario pour des commentaires mais n’a pas reçu de réponse au moment de la publication.

Traduit partiellement (original) de l’anglais.

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