Incendies, hautes températures, vents violents… la Corse a vécu un fol hiver

L’aéroport d’Ajaccio inondé par une crue centennale, un record de 25,6 °C à Bastia en février et des incendies qui ont ravagé près de 5000 ha… vivement le printemps sur l’île de Beauté.

 Plusieurs incendies ont éclaté en Haute-Corse les 10 et 11 février.
Plusieurs incendies ont éclaté en Haute-Corse les 10 et 11 février. AFP/Pascal Pochard-Casabianca

    « La France vient de connaître un événement tout à fait extraordinaire! Pendant plus de 24 heures consécutives (du 10 au 11 février), la température n'est pas descendue en dessous de 22 °C à Bastia en liaison avec la tempête Ciara. »

    Dans ce message posté ce mercredi sur Twitter, Météo France parle carrément de « nuit tropicale ».

    A vrai dire, cette chaleur exceptionnelle pour un mois de février commence à devenir un phénomène récurrent sur l'île de Beauté. Au même titre que les incendies et les tempêtes hivernales dévastatrices.

    25,6 °C en plein hiver. C'est le nouveau record de chaleur enregistré le 11 février à Bastia. La veille, le thermomètre affichait déjà 24,6 °C à 8 heures du matin et il faisait 24,3 °C le 4. Des températures habituelles du mois de juin ou du mois de septembre. Au cours de ce mois de février, l'ancien record de chaleur qui datait de 1990 a donc été battu trois fois de suite. D'après l'UICN (Union internationale de conservation de la nature) qui s'est penchée sur l'impact du changement climatique en Corse, « le littoral présentera le climat de Tunis d'ici vingt à cinquante ans ».

    Davantage de tempêtes « majeures ». Habituée à être balayée par les vents, l'île de Beauté a subi coup sur coup des tempêtes extrêmes ces trois dernières années. « Parmi les vingt tempêtes majeures que l'île a connues depuis vingt ans, une s'est produite en 2017, cinq en 2018 et deux en 2019 » explique Patrick Rebillout, chef du centre Météo France d'Ajaccio. « Le dérèglement climatique a un effet majeur : des événements extrêmes d'une amplitude de plus en plus forte », indique Antoine Orsoni, hydrobiologiste à l'université de Corse.

    Des records absolus de vent. Le 22 décembre, le vent a soufflé à 223 km/h sur le cap Corse. Mais ces rafales spectaculaires se produisent aussi désormais en pleine ville. Comme en octobre 2018 où le vent a soufflé à 122 km/h sur Ajaccio, battant le précédent record enregistré à 117 km/h lors de la tempête de 1999.

    4 °C de plus en montagne depuis 1970. « En Corse, la température moyenne annuelle de l'air a augmenté, depuis 1970, d'environ 1 °C sur le littoral et de plus de 2 °C au-dessus de 500 m d'altitude » relève le rapport de l'UICN. « Mais en montagne, au printemps, il fait quasiment 3 à 4 °C plus chaud qu'il y a cinquante ans, ce qui est terrible », considère Antoine Orsoni.

    Les cours d'eau à sec 5 mois dans l'année. D'après le rapport de l'UICN, le cumul annuel de précipitations est inférieur à la normale annuelle une année sur deux. « Cette évolution impacte le débit des cours d'eau dont la baisse atteint 20 à 30 % depuis le milieu des années 1980 ». « Les périodes de basses eaux sont passées de trois mois à cinq mois en moyenne, ajoute Antoine Orsoni. Et depuis trois ans, on subit des périodes d'étiage (NDLR : le plus bas niveau des eaux) de sept mois ».

    Des vagues de 9 mètres le long du littoral. La Corse, comme l'ensemble de la planète, subit les effets de la montée des eaux liée au réchauffement climatique. « Le niveau de la Méditerranée augmente de 4,1 mm tous les ans depuis les années 1970, relève Antoine Orsoni. Mais en Corse, il n'est désormais pas rare de voir déferler des vagues de neuf mètres, soit trois étages ».

    L'aéroport d'Ajaccio… trop bas. L'île de Beauté subit comme d'autres territoires côtiers des problèmes de submersion et de crue exceptionnelle lors des tempêtes. L'aéroport d'Ajaccio a ainsi été fermé en décembre suite à une crue centennale qui a inondé une partie du tarmac. « Cela fait dix ans que je plaide pour une surélévation de l'aéroport qui n'est qu'à 2 m au-dessus du niveau de la mer », explique Antoine Orsoni.

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