Patrick Oualid (Monoprix) "Pourquoi Monoprix veut se mettre aux bitcoins dès cette année"

Les bitcoins ne sont pas un feu de paille et il est important de débuter sa courbe d'apprentissage sans attendre, estime le directeur e-commerce de Monoprix.

JDN. Vous souhaitez que Monoprix accepte bientôt les paiements en bitcoins. Pourquoi ?

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Patrick Oualid, directeur e-commerce de Monoprix © S. de P. Monoprix

Patrick Oualid. Monoprix a toujours eu un positionnement de défricheur et cherché à apporter à ses clients ce qu'on ne voit pas forcément ailleurs. Il y a 2 500 ans, les Phéniciens se rendaient sur d'autres mers pour rapporter des produits différenciants aux pays bordant la Méditerranée. Nous voulons remplir le même rôle. Cela nous a par exemple conduits à être les premiers à lancer une MDD bio. Depuis 4 ans, nous apportons aussi des produits locaux au cœur de la ville, car nous pensons que la consommation locale est une tendance de fond, comme lorsque le bio a démarré il y a 10 ans.

Notre démarche vis-à-vis des bitcoins est identique. L'idée n'est pas de figurer absolument parmi les premiers qui s'y lanceront, mais de réfléchir à ce qu'ils peuvent changer dans la vie de nos clients. Ceci même s'il est bien trop tôt pour en espérer un chiffre d'affaires significatif. Chez Monoprix, nous sommes plusieurs à y croire. Les bitcoins ne sont pas un feu de paille. Peut-être que finalement, c'est une autre monnaie alternative, un moyen de paiement autre que le bitcoin qui se généralisera. Mais ce n'est pas le plus important. Nous devons nous y mettre car c'est dans notre ADN. Si le bitcoin ne nous apporte pas de ventes sonnantes et trébuchantes, cela n'a pas d'importance.

Mises à part ces considérations, quel intérêt concret voyez-vous à accepter les bitcoins dès à présent ?

Dans 3 à 5 ans, les consommateurs auront changé de façon de payer, leur rapport à l'argent aura évolué. En nous positionnant dès maintenant sur le bitcoin, nous démarrons notre courbe d'apprentissage. Au contraire des acteurs qui attendront 3 à 5 ans et essuieront les plâtres au moment où il sera peut-être déjà entré dans les mœurs.

Envisagez-vous d'accepter les bitcoins uniquement sur le site marchand de Monoprix, ou également en magasin via une application mobile ?

"Les magasins seraient sans doute concernés"

La priorité serait le site, mais nous abordons toujours simultanément les canaux Web et mobile. Donc par extension, les magasins seraient sans doute concernés aussi. D'autant que nous travaillons par ailleurs sur un projet de paiement mobile en magasin.

Que ferez-vous des bitcoins que vous aurez acquis ?

Pour l'instant je n'en sais rien. Ceci dit, les bitcoins ont une valeur et s'échangent. On peut donc faire travailler de la trésorerie en bitcoins de la même façon qu'en euros. Et demain, il y aura peut-être de nouvelles possibilités.

Quasiment personne en France ne possède de bitcoins. Cela ne vous chiffonne pas ?

En France, le bitcoin fait effectivement l'objet d'une défiance monumentale. On pense que c'est la monnaie du blanchiment, la monnaie des voleurs. On n'a pas encore bien compris l'ampleur du sujet. Pourtant, je suis convaincu que ne pas y croire, ce serait comme ne pas croire aux réseaux sociaux il y a quelque temps. Certes il n'y a pas de transactionnel dans les réseaux sociaux, mais il y a du relationnel dans le transactionnel... et les réseaux sociaux y contribuent grandement. Ne pas croire à l'apport du bitcoin dans le transactionnel, c'est également une erreur.

A quelle échéance imaginez-vous voir Monoprix accepter les bitcoins ?

Peut-être d'ici la fin de l'année 2014. Techniquement, cela ne me paraît pas très difficile à intégrer. De cette manière, si l'éclosion se produit en 2015, nous serons prêts.

Edition spéciale Bitcoin : 

Patrick Oualid, 41 ans, débute sa carrière par 5 années en agences Web entre 1995 et 2000, en France et aux Etats-Unis. A son retour en France en 2000, il démarre l'aventure Pixmania auprès des frères Rosenblum. Pendant 7 ans, il crée et anime la direction marketing et CRM, les équipes trafic, fidélisation et communication online de Pixmania. A partir de la fin 2007, il dirige la division "new business". Il rejoint le groupe Monoprix fin 2011 à la tête de sa nouvelle direction e-commerce, afin d'y développer le commerce multicanal alimentaire et mode.