Hauts-de-Seine : un réseau exploitait une centaine de chauffeurs VTC sans papiers

Le réseau exploitant ces chauffeurs non déclarés passait par des applications comme Uber, Kapten, Bolt ou Heetch.

 Les chauffeurs précaires travaillaient sur des horaires très larges et sous pression. (illustration)
Les chauffeurs précaires travaillaient sur des horaires très larges et sous pression. (illustration) LP/Arnaud Journois

    Leur salaire horaire ne dépassait pas quelques euros. Ils travaillaient douze heures par jour, sans congés et sans mot dire à cause leur situation irrégulière sur le territoire français. Pour avoir exploité environ cent de ces chauffeurs de VTC sans papiers, cinq hommes ont été arrêtés en milieu de semaine, puis mis en examen et placés en détention provisoire ce vendredi, dans le cadre de l'information judiciaire ouverte pour une kyrielle d'infractions : « aide au séjour irrégulier, blanchiment, exécution d'un travail dissimulé, recel, traite des êtres humains commise à l'égard de plusieurs personnes, faux en écriture, faux et usage de faux documents administratifs et abus de biens sociaux », le tout « en bande organisée », indique le parquet de Nanterre.

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    Les suspects, originaires du Maroc et établis en Seine-Saint-Denis et dans Val-d'Oise, faisaient fructifier leur trafic à plusieurs centaines de milliers d'euros via une société basée à Nanterre. Le coup de filet de la sous-direction de la lutte contre l'immigration irrégulière de la préfecture de police de Paris a conduit à l'interpellation du gérant de paille, du gérant de fait de l'entreprise, mais aussi notamment au faussaire de la bande. Cet homme s'occupait de préparer les autorisations - fausses -, comme les cartes d'identité des chauffeurs, les fausses immatriculations des véhicules composant la flotte du réseau, soit une cinquantaine de berlines

    Près de 200 000 euros saisis

    Lors de la perquisition, les enquêteurs ont également saisi près de 130 000 € en espèces et des véhicules appartenant aux suspects représentant quelque 65 000 €.

    L'enquête avait débuté en juin 2019, après qu'un « tuyau » est arrivé aux oreilles de la police. Elles ont mis en lumière ce réseau fonctionnant avec une centaine de chauffeurs « soumis à la pression de leurs employeurs arguant de leur situation précaire au regard du droit au séjour », précise le parquet, mais aussi des flux financiers vers le Maroc.

    Au cours de l'enquête, un transporteur de fonds a d'ailleurs été arrêté dans le sud de la France avec plusieurs dizaines de milliers d'euros qu'il devait apporter de l'autre côté de la Méditerranée.

    Ils payaient eux-mêmes l'essence et les contraventions

    En France, le fonctionnement était assez simple. C'est la société « employant » les chauffeurs qui était inscrite sur les plates-formes de réservation, telles Uber, Bolt, Heetch ou Kapten. Les courses payées par les clients étaient donc reversées à la société de Nanterre, prélevées de la commission que gardent les plates-formes. Mais aux chauffeurs, il n'était reversé ensuite que quelques centaines d'euros par mois. Et ils devaient payer eux-mêmes l'essence et les éventuelles contraventions.

    Les investigations vont désormais se poursuivre sous la direction d'un juge d'instruction, notamment à l'étranger, où une deuxième société serait impliquée. L'enjeu consiste aussi, entre autres, à établir comment les chauffeurs étaient « recrutés », via une filière d'immigration clandestine ou pas.