C’était l’un des combats des partisans du Brexit : après la sortie du pays de l’Union européenne (UE) et plus de trente ans sous les couleurs « bordeaux européen », les passeports britanniques vont retrouver leur couleur pré-UE. Les premiers, « bleu sombre », seront délivrés à partir du mois de mars, a annoncé la ministre britannique de l’intérieur, Priti Patel, samedi 22 février.
« Quitter l’UE nous a donné une occasion unique de restaurer notre identité nationale et de tracer une nouvelle voie dans le monde », écrit Priti Patel dans un communiqué. « En revenant au design emblématique bleu et or, le passeport britannique sera à nouveau lié à notre identité nationale et j’ai hâte de voyager avec celui-ci », a-t-elle ajouté.
Ce nouveau passeport sera aussi « le plus vert », a encore précisé le ministère, l’empreinte carbone liée à sa production étant réduite à zéro, et aussi le plus sûr, grâce à l’utilisation de technologies innovantes.
Fabriqué à Tczew, en Pologne
Pied de nez aux partisans du Brexit, c’est le groupe français Gemalto qui a remporté le contrat de 260 millions de livres sur onze ans (311 millions d’euros) face à son concurrent britannique De La Rue, qui affirme avoir été obligé de licencier 170 salariés. Qui plus est, Gemalto produira ces passeports sur son site de Tczew, en Pologne.
« Je ne me souviens pas du slogan “Des emplois britanniques pour les travailleurs polonais”, mais le voici en action. D’une certaine manière, c’est un succès », a écrit avec ironie le journaliste Paul Lewis sur son compte Twitter.
Ce paradoxe n’a pas échappé aux commentateurs. « J’aime bien le nouveau passeport britannique imprimé en Pologne et conçu en France », a ainsi déclaré l’ancien député européen Seb Dance. « Bien sûr, le précédent – qui permettait aux Britanniques de travailler, d’étudier et de prendre leur retraite librement sur leur propre continent – était probablement plus utile ».
Theresa May avait défendu ce retour à la couleur d’antan
Sujet d’apparence anodine, la couleur du passeport avait déjà enflammé les débats au Parlement. « Je pense que c’est merveilleux si les gens retrouvent ce passeport bleu, avait déclaré Boris Johnson dès le mois de décembre 2017 sur ITV News. Je me souviens d’un sentiment de perte personnelle et d’indignation lorsqu’il a été remplacé. » Theresa May, alors chef du gouvernement, avait défendu ce retour à la couleur d’antan, jugeant que le passeport était la « marque de notre indépendance et de notre souveraineté ». Le tabloïd pro-Brexit The Sun avait fait campagne pour le retour de la couleur bleue, utilisée pour la première fois en 1921 sur les passeports, puis abandonnée en 1988.
« obsession rétrograde et étriquée »
Pourtant, rien n’obligeait Londres à changer la couleur de ses passeports, des Etats membres de l’UE telle la Croatie ayant des passeports bleus. La première ministre écossaise, Nicola Sturgeon, avait moqué l’« obsession rétrograde et étriquée en faveur d’un passeport bleu ».
Le compte humoristique intitulé Parody Boris Johnson s’est fendu d’un tweet assassin : « Tous ceux qui ont voté pour le Brexit savaient exactement pour quoi ils votaient. Attendre trois fois plus longtemps au contrôle, avec un passeport qui a créé des emplois en Pologne et des licenciements en Grande-Bretagne. »
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