La Bulgarie aurait totalement inventé son rapport Natura 2000

Loups en Bulgarie [Zaprirodata.com]

L’Académie des sciences bulgare (BAN) a affirmé que le rapport envoyé à Bruxelles par le gouvernement sur le projet européen Natura 2000 était « une véritable imposture ». Ce qui confirme les résultats de l’investigation d’Euractiv Bulgarie.

Le rapport de 9 millions de lev (4,5 millions d’euros) sur l’état des espèces et des habitats naturels en Bulgarie, payé grâce à l’argent du contribuable européen, est en réalité une imposture, avait découvert en décembre la journaliste Valia Ahchieva, d’Euractiv BulgarieUn autre de ses articles d’investigation a récemment provoqué l’arrestation du ministre de l’Environnement Neno Dimov, à propos d’un barrage asséché dans des conditions opaques.

Le rapport envoyé par la Bulgarie, et pour lequel Bruxelles avait versé des centaines de millions d’euros de fonds européens dans le cadre de Natura 2000 pour une période de six ans, aurait été écrit par des personnes sans aucune connaissance du sujet, qui n’ont elles-mêmes consulté aucun spécialiste.

Natura 2000 est le plus grand réseau coordonné de zones de protection de la nature dans le monde. Il couvre plus de 18 % des terres de l’UE et près de 6 % de son territoire maritime.

La tâche de rédiger ce rapport avait été attribuée à ENVIMON, une société du secteur privé n’ayant aucune expertise sur des sujets comme la biodiversité, les espèces ou les habitats naturels.

La Cour des comptes tacle les États dans son bilan de Natura 2000

La Cour européenne des comptes a publié un rapport très critique sur la politique de l’UE en matière de sauvegarde de la biodiversité, accusant les États de bâcler sa mise en oeuvre. Un article de notre partenaire, le JDLE. 

La communauté scientifique a confirmé que l’information envoyée à Bruxelles n’était en aucun cas basée sur des données scientifiques, et qu’il s’agissait d’un faux grossier.

« La surveillance de la biodiversité de 2013-2018 en Bulgarie afin d’établir des rapports nationaux en vertu de l’article 17 de la directive sur les habitats n’a pas été réalisée, le ministère de l’Environnement et des Eaux et l’Agence exécutive pour l’environnement n’ayant pas réussi à l’organiser. En revanche, un rapport sur les résultats de cette surveillance a été préparé et soumis à l’Agence européenne pour l’environnement ! » affirme l’Agence des sciences bulgare dans un communiqué officiel.

Dégât pour l’autorité du pays

« Nous refusons de participer aux groupes de travail qui prétendent avoir produit une étude scientifique sans avoir effectué les recherches appropriées. Nous ne voulons pas légitimer une telle approche, car nous craignons les dommages causés à la nature bulgare, à la société et à l’autorité de notre pays à l’échelle européenne », écrit la BAN.

Interrogée par Euractiv, la porte-parole de la Commission, Vivian Loonela, a affirmé que Sofia était en train d’essayer de réparer son erreur.

Selon elle, la Bulgarie a rendu son rapport pour la période 2013-2018 à l’Agence européenne de l’environnement en août 2019, et a ensuite soumis en janvier des parties  corrigées du rapport, notamment sur les données des espèces. L’agence européenne analyse en ce moment le rapport.

« Ce n’est pas à moi de dire pourquoi les autorités bulgares ont fait ça », a ajouté la porte-parole.

Mais les données mises à jour et envoyées par les autorités bulgares à Bruxelles en janvier  dernier sont aussi contestées par la BAN.

Reste à savoir si les auteurs du rapport devront rendre l’argent : sa rédaction aurait coûté 4,5 millions d’euros. Ce à quoi Vivian Loonela a répondu qu’il s’agissait d’une question pour les autorités bulgares.

Boris Karakushev, manager d’ENVIMON, a réfuté les critiques de la BAN sur un site Internet réputé pour être un instrument de diffamation des critiques du gouvernement.

Euractiv Bulgarie a demandé aux autorités du pays si ENVIMON devrait rendre cet argent. À l’heure de la publication de cet article, aucune réponse n’avait été reçue.

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